Peut-on réellement considérer que les doctorants sont des précaires de l’ESR ? Il est incontestable qu’ils n’ont pas un poste permanent, donc ils sont clairement en situation de précarité. Mais d’un autre côté, ils préparent un diplôme et donc on peut considérer qu’ils ne sont pas en situation d’être en CDI (il me semble …).
Avec le conflit sur la loi travail, le thème de la précarité est fortement discuté. Certains doctorants se mobilisent pour dénoncer leur situation qu’ils estiment précaire. Je n’arrive pas bien à comprendre l’évolution qu’ils aimeraient (j’imagine que ça serait avoir un poste en CDI « à vie » dès le début de leur thèse). D’après eux, « l’accès au doctorat doit être un droit pour tout·e·s : les doctorant·e·s doivent être rémunéré·e·s décemment pour réaliser leur travail de production de connaissances, sans limitation a priori de la durée des thèses et avec exonération des frais d’inscription ! » (source ici). Là je trouve que ça va un peu loin : après la licence et le master pour tous, le doctorat pour tous ! et sans limitation de durée de la thèse, avec salaire. On imagine que dans ces conditions, peu seront très pressés d’écrire leur manuscrit. Là où je suis d’accord, c’est que la thèse est un vrai travail de recherche et que donc ça mérite une rémunération décente. Par ailleurs, je n’arrive pas à comprendre pourquoi il y a des droits d’inscription pour les doctorants. A mon sens, les universités devraient vraiment les supprimer.
La confédération des jeunes chercheurs (CJC) donnent leur définition de la précarité des jeunes chercheurs (incluant les catégories de doctorants, ATER et post-doctorants) : « Les jeunes chercheurs représentent l’essentiel des « forces vives » des unités de recherche, et – dans beaucoup de disciplines – une part indispensable du personnel enseignant. Les doctorants, qui participent à la production de connaissances, à l’enseignement et à l’amélioration de la compétitivité de la recherche française, sont trop souvent considérés comme des étudiants, usagers du système, par le milieu académique » (source ici). Bref ils revendiquent le caractère professionnel du doctorat. A mon sens ils ont raison, la preuve étant le contrat doctoral qui est un vrai contrat de travail. Ils demandent donc de ne pas faire « l’amalgame entre doctorants et étudiants ». Ils considèrent alors que les doctorants sont des travailleurs précaires. Précisons que le texte cité était en réaction aux propos de G. Fioraso en 2012 (alors ministre de l’ESR) qui avait déclaré « Il parait abusif d’intégrer dans les précaires les docteurs et les post-docs même si leur insertion doit être favorisée et valorisée ».
Et si les problèmes venaient d’une petite partie des doctorants de l’ESR ? La CJC rappelle que « 40% des doctorants en Sciences Humaines et Sociales n’ont pas de contrats de travail alors qu’ils sont définis comme des professionnels de la recherche en début de carrière » […] « La Confédération des Jeunes Chercheurs tient à affirmer que les doctorants sont précaires lorsqu’ils ne sont pas contractualisés » (source ici). En science dure, il ne me semble pas qu’il y a des doctorants dans les labos sans contrat de travail. Je ne sais pas s’il est vraiment autorisé d’inscrire un étudiant en thèse sans avoir vérifié ses conditions de ressources ? que disent les textes du code du travail à ce sujet ?
On en revient certainement à la question qui nous avait beaucoup fait discuter : « la thèse est-elle un vrai travail ? » (vol. 1. et vol. 2)
Pour certains, le doctorant n’est qu’une petite main sans expérience et sans autonomie et qu’il faut le former. Le doctorat n’est-il pas une formation à la recherche par la recherche ? Donc les doctorants sont des étudiants. On pourrait quand même rappeler que tout nouvel arrivé dans un environnement a besoin d’une formation plus ou moins longue. C’est la même chose pour un ingénieur nouvellement recruté. Il va passer une période en CDD, faire des formations en local pour découvrir le contexte spécifique de son poste. Je doute fort qu’il soit opérationnel dès le lendemain de son recrutement.
Pour d’autres, la thèse est un vrai travail, la preuve est que le doctorant a un contrat de travail. On pourra rappeler que la situation des doctorants a été profondément améliorée, grâce à V. Pécresse, avec le contrat doctoral de type CCD. Ce contrat permet aux doctorants de cotiser à la sécu, retraite et chômage. Le doctorant est jeune fraichement sorti de master, il a besoin d’être accompagné, au moins durant la première année de sa thèse. Le but est qu’il soit autonome et productif ensuite. Mais reconnaissons aussi que si on enlève les doctorants des labos, l’activité de recherche et la productivité s’en retrouveraient très fortement diminuées.
Bon on ne va pas refaire le débat … si ?
72 commentaires
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6 juin 2016 à 23:17
Dan -visseur utilitariste
Il y a au moins deux visions :
– la fameuse vison de Simon Leys – aucun contrôle sur la recherche et l’université – on les paye à faire progresser la connaissance (ou à ne rien faire) dans le domaine qui leur chante
– l’horrible vision utilitariste ou presque : c’est la collectivité qui paye, et elle a des dizaines de priorités à classer : accueil des réfugiés, logement, deux instits par classe dans les zones sensibles, formation des demandeurs d’emploi, sécurité et lutte contre le terrorisme, soutien aux PME qui recrutent, inondations, réchauffement, aide aux pays en développement…La liste est longue comme un jour sans vin. Et les horribles utilitaristes disent : puisqu’il y a une seule ressource, les impôts, on va tenter de l’attribuer le moins mal possible, en fonction de …
Et cela devient une question démocratique : faut-il payer pour n’importe quelle thèse ?
A noter : la démocratie est assez généreuse. Une amie,normalienne, a fait sa thèse rémunérée sur l’expression des sentiments dans la littérature du 17 ème siècle.(la rédaction du sujet était moins limpide, car ce sujet là a déjà du être traité deux cents fois depuis la princesse de Clèves et ses afficionados) Pourquoi pas… vis à vis des autres priorités …et les sujets de thèse grotesques ( selon moi, évidemment ! ) abondent. Mais on tourne en rond sur ce domaine.
ma conclusion : la collectivité, qui supporte déjà pas mal d’absurdités, a le devoir de tenter d’essayer de limiter les thèses sans intérêt. Mais qui dit qu’elle sont sans intérêt, les traductions commentées des sermons d’Alcuin ?
On retourne en rond!
7 juin 2016 à 07:10
JF
« Là où je suis d’accord, c’est que la thèse est un vrai travail de recherche et que donc ça mérite une rémunération décente. Par ailleurs, je n’arrive pas à comprendre pourquoi il y a des droits d’inscription pour les doctorants. A mon sens, les universités devraient vraiment les supprimer. »
Le problème, et il n’est pas nouveau, c’est l’ambivalence de la thèse : le doublet « salaire + frais d’inscription » la souligne. Une thèse est à la fois une formation (qui amène, quand même, à un diplôme ! Un diplôme qui comme n’importe quel diplôme, peut être valorisé, ouvrir des possibilités d’emploi, etc.), et un emploi (qui donne droit à un salaire).
Pendant longtemps, on a oublié l’aspect « emploi », et on a considéré les doctorants comme des étudiants. Il me semble qu’on en vient maintenant à l’excès inverse et qu’on voudrait ne les considérer que comme des « collaborateurs juniors ». Mais en faisant ça, on dévalue (encore plus) l’aspect « diplôme » (ou formation) de la thèse : si un docteur n’est qu’un master avec 3 ans d’expérience, alors le doctorat n’est plus un diplôme.
.. et à mon avis, on se prépare alors des lendemains qui déchantent, des nuits blanches, des migraines, des nervousses brékdones. Parce que la question de l’insertion professionnelle (et donc, en effet, de la précarité) des jeunes chercheurs (récents docteurs) ne risque pas de s’arranger. Le nœud du problème en gros est que, en France, un docteur ne trouve d’emploi que dans la recherche (para)publique. Or, comme un rapide calcul montre que (sauf à vouloir une augmentation exponentielle du nombre de chercheurs, ce qui semble peu réaliste !) seule une petite proportion des docteurs peut espérer obtenir un poste dans cet univers, il s’ensuit que la seule solution à la crise passe par plus de docteurs employés hors de la recherche publique, c’est à dire dans le privé : donc il faut convaincre le privé de la valeur du doctorat.
Et je ne crois pas que c’est en le dévalorisant et en expliquant que en fait, un doctorat, c’est rien d’autre que 3 ans d’expérience professionnelle et que n’importe quel master + 3 en fait autant qu’on va y arriver…
7 juin 2016 à 08:45
FUBAR
Le « doctorat pour tous » et « le doctorant force vive d’une unité de recherche »… voilà qui va me faire ma journée.
7 juin 2016 à 09:43
JF
FUBAR, ne me cachez rien, vous venez de relire le premier jet de la thèse de votre doctorant…. ? :-)
7 juin 2016 à 10:14
FUBAR
@JF: mais non voyons! dans les LSHS ces infâmes vermisseaux de MCF n’ont pas même le droit de diriger des M2, alors une thèse vous pensez bien! Et puis soyons honnête, la littérature anglaise du long XVIIIe siècle n’attire pas les foules. Simplement si je croise des doctorants brillants j’en croise aussi de pathétiquement nuls qui ne sont là que pour permettre à leur directeur de toucher une prime et de justifier son existence. Ces derniers les maintiennent sous respirateur artificiel tant qu’ils le peuvent, avec le plus grand cynisme, pour leur propre gloire.
Oui je me suis levée de mauvais poil ce matin, alors même que le soleil est de retour.
7 juin 2016 à 10:44
Gueux
@FUBAR: « … pathétiquement nuls qui ne sont là que pour permettre à leur directeur de toucher une prime… »
C’est le cas de la majorité des thésards que je vois, et je ne suis pas sûr que cela soit spécifique à ma discipline, ni à ma localisation géographique. Les bras m’en tombent quand je lis/entend que la recherche est essentiellement faite par les doctorants. MDR.
Comment ne pas être cynique face aux critères d’évaluation et autres injonctions débilo-contradictoires qu’on impose aux EC ? Maintenir un thésard sous respirateur, j’en vois bien l’interêt financier, mais la gloire ?
C’est glorieux chez vous de « diriger » un bras cassé ?
7 juin 2016 à 10:49
François
@ JF » Parce que la question de l’insertion professionnelle … des jeunes chercheurs (récents docteurs) ne risque pas de s’arranger « .
Le problème des débouchés du doctorat est mondial (sauf dans les pays où l’enseignement supérieur et la recherche publique, partant de très bas, sont en plein développement et recrutent donc massivement pendant quelques décennies).
https://www.timeshighereducation.com/content/too-many-phds-not-enough-tenured-positions
http://www.theguardian.com/higher-education-network/blog/2014/may/23/so-many-phd-students-so-few-jobs
» Le nœud du problème en gros est que, en France, un docteur ne trouve d’emploi que dans la recherche (para)publique « .
C’est surtout vrai pour lettres-sciences humaines, biologie (concurrence médecins-pharmaciens) et chimie (surproduction manifeste par tradition historique). Ça correspond aussi aux vœux de beaucoup de jeunes docteurs.
Quelques particularités nationales :
– France : le nombre de doctorats annuels en lettres-sciences humaines est exceptionnellement faible
– Allemagne – Suisse : le secteur privé accueille une proportion importante des nombreux nouveaux docteurs car, en dehors des recrutements pour des compétences disciplinaires bien précise, le doctorat est également considéré comme un statut (équivalent pour son titulaire et son employeur à un diplôme d’une GE connue en France; dans ce cas, l’important est d’être docteur, peu importe la discipline).
Enfin il faut faire une distinction entre les pays où le doctorat comporte une phase plus ou moins éliminatoire où on suit des cours avant d’écrire une thèse, et des pays comme la France où pour certains la thèse, attaquée directement après le master, témoigne essentiellement (uniquement ?) de qualités de persévérance.
7 juin 2016 à 10:55
mixlamalice
@JF: j’aurais presque pu écrire ton message de 07h10 mot pour mot.
7 juin 2016 à 10:59
Linoa
Le manque de contrats doctoraux en SHS et l’inadéquation de la durée de ces contrats avec la durée réelle des thèses (3ans alors qu’il faudrait des contrats de 5 ans vue que la durée de thèse est en moyenne de 5.4 ans) sont à l’origine d’une situation de précarité très importante. Mais ce n’est pas la seule raison. Dans certaines disciplines, les doctorants ne sont pas que des jeunes chercheurs, ils sont aussi des enseignants dès la première année, et pour le coup sans aucune formation. En droit par exemple, la faculté ne pourrait pas tourner sans la contribution des doctorants qui sont utilisés pour pallier le manque d’enseignants titulaires. On se retrouve donc dans des situations ubuesques avec des doctorants de 1ère année qui se voient confier des services de 230 HETD pour la modique somme de 790 euros par mois pendant 11 mois, et avec la sécurité sociale étudiant à payer (215) + les frais d’inscription (396€). Les heures ayant été proposées par le Doyen et par le directeur de thèse, difficile de dire non sans se griller dès la première année…
L’absence d’encadrement de notre statut de doctorant, prenant en compte nos statuts de travailleurs de l’ESR ET d’étudiant, est à l’origine de notre situation de précarité.
7 juin 2016 à 10:59
FUBAR
@Gueux: la gloriole théorique: « j’ai des thésards » = « je suis un vrai PR » . Vu le degré de foutage de gueule que j’observe autour de moi, ça me semble dans la logique des choses.
Vous noterez quand même un fait assez intéressant qui m’avait frappée lors de la première campagne de feue l’AERES. Lorsque que les évaluateurs déboulaient pour entendre la présentation de l’équipe, qui mettait-on au premier rang: les PR bien sûr, et ensuite les doctorants. les MCF étaient au fond, d’ailleurs ce sont les seuls à n’avoir pas le droit de l’ouvrir (car PR et doctorants sont dûment interrogés). Le MCF tout le monde s’en tape. Que ce soit lui qui représente le plus grand nombre de publications dans une équipe, qu’il ait une liste de projets intergalactiques longue comme le bras: on s’en FOUT, il n’existe pas. Il est donc logique de dire que les doctorants sont les forces vives d’une équipe de recherche, c’est précisément ce que pense l’AERES/HCERS. Et comme le PR n’existe en partie que pour et par ses doctorants: roulez jeunesse!
7 juin 2016 à 11:00
FUBAR
@Mixlamalice: hé ho, on ne se tutoie pas sur Gaïa, t’es fou!
7 juin 2016 à 12:02
mixlamalice
@FUBAR: ça fait dix ans qu’on vaque aux mêmes blogs avec JF, ça vaut bien un tutoiement…
7 juin 2016 à 12:04
mixlamalice
@Linoa: « 3ans alors qu’il faudrait des contrats de 5 ans vue que la durée de thèse est en moyenne de 5.4 ans »
Est-ce qu’il faut adapter la durée des financements à la durée moyenne des thèses ou revoir (si nécessaire) les exigences des thèses pour les faire tenir dans la durée des financements?
On en discutait sur twitter ce matin, je suis toujours assez surpris de la vision de certains collègues SHS que la thèse est en quelque sorte « le grand oeuvre » – appelé à devenir référence du domaine ou alors nul et non avenu- de la carrière d’un chercheur…
7 juin 2016 à 12:12
PR23
En SHS, un certain nombre de doctorants sont agrégés du second degré. Beaucoup en Lettres et Histoire car c’est un prérequis « occulte » pour devenir MCF. Ils sont très loin d’être précaires.
Autant que de précarité, ce qui est souvent le cas des doctorants étrangers venus attirés par la lumière projetée par nos universités, il faudrait aussi parler de leur exploitation dans les labos. Et là il y aurait à dire, peut-être pas à écrire…
7 juin 2016 à 12:38
Marianne
« Dans certaines disciplines, les doctorants ne sont pas que des jeunes chercheurs, ils sont aussi des enseignants dès la première année, et pour le coup sans aucune formation »
Maleureuse, ne demander pas de formation…Vous ne savez pas ce que c’est que les ESPE ou ex-IUFM….La formation c’est parfois bien pire que la non-formation….
7 juin 2016 à 12:43
Marianne
@FUBAR
Bah non, chez nous l’AERES s’est fendue d’une discussion avec les rangs B. Comme chez nous il n’y a pas de recrutement local, donc pas de possibilité de promo pour un certains nombre d’entre nous, il y a eu bronca chez les rangs B qui ont balancé à mort sur les rangs A alors que les rangs A et les thésards avaient été sages
Du coup , chez nous les MCF on s’en fout pas….Par contre certains se sont fait un peu engueuler pour l’avoir trop ouvert (une fois qu’un ou deux fayots ont dénoncé les têtes pensantes de la rébellion)
J’ai revu un gars qui était dans le comité AERES: il s’en souvient encore de la rencontre avec les rangs B!
7 juin 2016 à 12:50
Je ne peux plus me permettre de travailler gratuitement | Une sociologue chez le coiffeur
[…] A lire aussi : enseignement et vocation, les doctorants sont-ils les précaires de l’enseignement supérieur et de la recherche ? […]
7 juin 2016 à 13:21
Linoa
@Marianne, rassurez-vous nous ne demandons pas de formation pour les enseignements (même si certains ne sont pas à jeter), nous n’aurions pas le temps de les suivre. Je répondez simplement à l’argument selon lequel nous ne sommes pas des travailleurs opérationnels et qu’il nous faut une formation. Dans les faits, nous ne recevons aucune formation (alors que nous payons 5 x 396 euros au cours du doctorat au titre de celle-ci).
@mixlamalice, je suis d’accord qu’une réflexion doit être menée, mais pas au sein des universités, mais au sein des sections CNU. Tant que leurs exigences restent les mêmes cela parait délicat de nous demander de ne pas essayer de les remplir.
7 juin 2016 à 14:47
Marianne
https://histoiresduniversites.wordpress.com/2016/06/07/promouvoir-les-mcf-hdr-qualifies-2/#more-38408
Bah nous c’est le non localisme qui nous fait râler…Comme quoi on n’est jamais content!
D’un côté si c’est le bac et le doctorat rémunéré pour tout le monde j’ai du mal à comprendre pourquoi c’est pas prof EX et PEDR niveau maximal pour tous
Non mais!
7 juin 2016 à 14:51
Marianne
Et je parle même pas du grade CR/DR pour tous. J’arrête la mes revendications mais si besoin est n’hésitez pas à me contacter. J’ai plein d’idées
7 juin 2016 à 15:39
Gueux
@FUBAR: WOAW ! Pour halluciner, les moeurs des SHS semblent bien plus puissantes que les champignons magiques.
7 juin 2016 à 18:07
Rachel
@JF, moi mes doctorants, je leur conseille de classer leur période doctorale dans la case « expériences professionnelles » du CV, en particulier s’ils sont ingénieur. Par ailleurs, je pense que la valorisation du doctorat dans le privé, ça se travaille tout d’abord dans la tête des doctorants et des néo-docteurs car c’est quand même eux qui cherchent du boulot. Au minimum, ils doivent savoir parler un peu de cette expérience sans tomber trop vite dans leur sujet hyperspécialisé (qui n’intéresse personne et qui en aucun cas intéressera une entreprise).
Un problème majeur est qu’il n’y aura certainement pas de recrutement massif dans la fonction publique ces prochains temps (on sait pourquoi). Si les doctorants ne parviennent pas à valoriser leur thèse dans le secteur privé, ça risque de devenir compliqué et le doctorat va s’en prendre de nouveau sur la tête.
@Gueux, je peux confirmer qu’une partie importante de la recherche dans les labos est faite par les doctorants. C’est statistique, il y a une corrélation forte entre le nombre de doctorant et la production scientifique (normalisée EC, bien entendu). Franchement, un EC n’a pas le temps, c’est bien connu qu’il est débordé par les enseignements, réunions et écriture de demande de sous.
@Linoa, à propos de la durée des thèses en LSHS : c’est en moyenne 5,4 ans. Mais si on ne prend en compte que les thésards sur contrat doctoral, c’est-à-dire les personnes qui s’y consacrent à 100 %, est-ce que cette moyenne tombe à 3 ans ? Si oui, alors il n’y a rien d’étonnant et ça veut dire que la moyenne est plombée par les 40 % qui ont d’autres ressources qu’une allocation. Si non, alors il y a réellement un gros problème et certainement il faudrait redimensionner les objectifs et exigences d’une thèse dans ces disciplines. Ou alors décider d’allonger la durée des financements (je n’ai rien contre).
« On se retrouve donc dans des situations ubuesques avec des doctorants de 1ère année qui se voient confier des services de 230 HETD pour la modique somme de 790 euros par mois pendant 11 mois, et avec la sécurité sociale étudiant à payer (215) + les frais d’inscription (396€). Les heures ayant été proposées par le Doyen et par le directeur de thèse, difficile de dire non sans se griller dès la première année… » => mais est-ce que c’est légal ? N’y a-t-il pas là du travail dissimulé ?
Et pourquoi la réflexion devrait être menée au sein du CNU et non à l’université ? A ma connaissance, le doctorat est un diplôme universitaire et je ne vois pas trop le rôle du CNU là-dedans.
@PR23, sur les étudiants thésards étrangers, on vous écoute (promis, ça restera secret entre nous).
7 juin 2016 à 18:54
Rachel
Le billet de la sociologue chez le coiffeur est très intéressant, je vous invite à aller le lire: https://systemececilia.wordpress.com/2016/06/05/je-ne-peux-plus-me-permettre-de-travailler-gratuitement/
7 juin 2016 à 20:06
Sirius
Oui, le doctorat est un diplôme universitaire et devrait constituer un élément clé de la stratégie d’une l’université.
Or la plupart des universités ne se soucient pas de la qualité de leurs docteurs, laissant leur recrutement à l’initiative de professeurs qui peuvent avoir des intérêts particuliers dans cette décision. J’ai été directeur d’une école doctorale qui a mis en place une procédure de sélection (admissibilité sur dossier, admission sur épreuves) confiée à un jury collectif. En vingt ans ce doctorat est devenu une référence internationale dans son domaine.
8 juin 2016 à 01:01
Linoa
@Rachel,
La plupart des doctorants financés en SHS font leur thèse dans les mêmes délais (tous les doctorants qualifiés de cette année dans mon centre on fait leur thèse en 7ans …). Il y a donc bien un problème de fond qui est directement lié aux exigences du CNU. Il faut bien évidemment une bonne thèse mais également un minimum de deux ans d’enseignement et un ou deux articles pour rattraper un peu la thèse ou pour écrire dans une discipline plus « reine » que celle dans laquelle la thèse a été écrite (exemple une thèse en droit de la sécurité sociale devra nécessairement être accompagnée d’un article en droit civil type droit de la responsabilité civile ou droit des obligations où il y a beaucoup plus de spécialiste pour apprécier notre travail qu’en droit de la sécu). Certaines sections exigent en plus qu’il y ait une forte diversité d’enseignement ce qui suppose d’avoir enseigné 5 ou 6 matières différentes au cours du doctorat.
Ensuite, je pense personnellement que le gros point noir – avec le manque de financement pour les thèses SHS – c’est la non prise en compte de la charge de travail liée aux enseignements. En effet, l’heure équivalent TD n’a jamais été réévalué et on considère toujours qu’une heure de TD devant les étudiants représentent 4,2 heures de travail effectif, alors qu’en réalité on est plutôt à 6h de travail effectif. Soit selon les statuts 150 à 250 heures de travail non rémunéré et non pris en compte pour l’avancement des thèses. Pourquoi cette augmentation, et bien tout simplement par l’augmentation importante des effectifs d’étudiants (jusqu’à 50 étudiants dans un TD pour certains doctorants, une moyenne à 40) et la semestrialisation. Le nombre de copie ont donc été multiplié par 4 par rapport à il y a 15 ans. Mais la rémunération et l’heure équivalent TD ne changent pas.
A tout cela s’ajoute la pression financière exercée par les universités sur les travailleurs précaire que nous sommes. Il faut se battre constamment pour être payés (ATV/CEV : ex: notre fac doit actuellement 30 000 euros à un CEV qu’elle n’a pas payé ces deux dernières années), empêcher la suppression d’un mois de salaire (ATER), de nos primes (ATER et doctorant), pour obtenir le remboursement de 50% des frais de transport comme les autres salariés et fonctionnaires, contester son affiliation à la sécurité sociale étudiante alors qu’on travail et essayer d’obtenir le remboursement de la cotisation, faire comprendre à pôle emploi que notre statut d’étudiant n’est pas incompatible avec le chômage et que l’on peut bénéficier de l’ARE pendant la fin de thèse, etc !
Tant qu’il n’y aura pas de statut clair des doctorants, à la fois étudiant, enseignant et chercheur, nous resterons dans cette situation de précarité qui nuit à l’avancement de nos thèses et nous cause bien des stress inutiles.
8 juin 2016 à 04:00
FBLR
@linoa
j’ai l’impression que vous utilisez le mot « précarité » dans un sens qui ne lui est pas commun.
La non-précarité, c’est le doctorat en CDI. Est-il nécessaire de commenter plus avant ?
Toutes les propositions que vous faites consistent à améliorer le cadre du doctorat. Mais en aucun cas elles lui retireraient son caractère « précaire » puisque le financement demeurerait fixe dans le temps.
8 juin 2016 à 09:26
mixlamalice
@linoa: les mauvaises pratiques des employeurs sont un fait, mais elles ne sont pas générales, et en tant que mauvaises pratiques il me semble dangereux de les prendre en compte comme étant la norme.
Par exemple, faire corriger 300 copies à un chargé de TD, c’est une mauvaise pratique de la part du responsable de cours, tous les doctorants ne subissent pas ça.
Rémunérer sur un contrat ATER quelqu’un qui n’a pas vocation à soutenir avant la fin de son contrat d’ATER, c’est une mauvaise pratique.
Faire soutenir en 7 ans, c’est une mauvaise pratique.
Exiger pour le recrutement que quelqu’un qui n’a pas été financé ait en sortie de thèse un meilleur dossier que tous les membres de la commission réunis, c’est une mauvaise pratique.
Certaines sections SHS ont mis fin à tout ou partie de ces mauvaises pratiques: c’est aussi une histoire de volonté de la part des permanents, surtout la nouvelle génération. Si elle se complaît dans le mandarinat orienté « bizutage », c’est sûr, ça ne changera pas. En sciences dures, il y a encore des problèmes mais ils sont je pense très ponctuels/localisés.
8 juin 2016 à 11:44
Linoa
Les employeurs, ici les universités, font avec le peu de moyens qu’ils ont. Les doctorants ne sont pas représentés dans les conseils d’administration, pour avoir des élus ils doivent « prendre » des sièges aux étudiants (3000 doc vs 40 000 étudiants…), aux MCF dans les conseils de faculté (on se fait mal voir car ils ont déjà peu de sièges), aux PRAG (qui du coup n’ont plus aucun représentants). Bref, et quand on arrive à avoir des représentants et que l’ont fait remonter ces mauvaises pratiques, les dirigeants (sciences dures) écoutent et les enseignants de SHS crient à la trahison et menace les doctorants de ne pas faire long feu à l’Université s’ils continuent à être « aussi revendicatifs » (réponse faite à une ATV qui demandait à être payée). Donc quand la loi permet autant de contournement il faut la renforcer !
8 juin 2016 à 13:05
FBLR
@Linoa
D’accord avec tous les éléments pointés. Pourquoi pas renforcer le « statut » du doctorant. Toutefois il faut avoir conscience que cela ne règle en aucun cas la précarité inhérente à ce statut.
Par ailleurs, si cela renforcerait le rapport de force en faveur des docteurs, cela veut aussi dire qu’il faudrait admettre que tout projet de thèse non-financé n’existerait plus dans le nouveau cadre.
Chiche ?
Les heures de cours mammouth de certains chargés de cours (en passant, c’est déjà illégal puisqu’un un vacataire n’a, normalement, pas le droit de réaliser plus de 96h de vacations annuelles), ne seraient dès lors plus un financement de thèse possible.
Encore une fois, j’ai l’impression que c’est le fait d’une minorité (certaines sections LSHS, droit, etc.) qui ont la majorité de la couverture médiatique.
S’agissant de l’insertion des doctorants, il faut rappeler qu’en Sciences, beaucoup de doctorants ne finissent pas leur thèse, non pas parce qu’ils sont mauvais/n’ont pas le niveau, mais parce qu’ils ont de bien meilleures propositions d’embauche dans le secteur privé auxquelles il est dur de résister vus les niveaux de rémunération indigents des doctorants en France. Certes, la situation matérielle des docteurs s’est grandement amélioré ces 15 dernières années, mais cela ne me semble pas suffisant si l’on veut retenir les plus talentueux et pas uniquement les aspirants-chercheurs:
les plus patients/corvéables à merci/héritiers (si pas besoin de logements, ça reste bien payé au final)/célibataires/amateurs de vie frugale (rayer les mentions inutiles)
8 juin 2016 à 13:05
FBLR
« la situation matérielle des doctorants » et non « des docteurs », désolé.
8 juin 2016 à 14:31
mixlamalice
@FBLR: pour info, un doctorant dans mon département de post-doc US était payé 17k$ annuel brut (en 2010). C’est plutôt moins en termes de niveau de vie que ce qu’un doctorant français touche (contrat doctoral: 20k€ brut, contrat doctoral + monitorats: 25k€. Pour certaines thèses CIFRE, on peut monter à 35k€ brut). Ils ne manquaient pas de candidats.
Je pense que l' »indigence » des salaires des doctorants en France (et des enseignants-chercheurs aussi du reste) est pas mal un mythe (étonnamment, peu de gens partagent cette opinion qui est pourtant chiffrée).
8 juin 2016 à 14:32
mixlamalice
De façon générale, le pognon est pas mal sujet à fantasmes, par chez nous. Probablement parce qu’il est encore tabou d’en parler (quand j’étais post-doctorant d’ailleurs, ma rémunération était affichée en ligne sur un site qui s’appelait « your dollars at work »)
8 juin 2016 à 15:56
Linoa
@mixlamalice Personnellement je trouve le contrat doctoral bien rémunéré, le problème c’est qu’on est une minorité a en bénéficier en SHS et surtout ce contrat doctoral, on le sait dès le début, ne suffira pas à mener à bien la thèse jusqu’à son terme. On doit donc dès ces trois premières années trouver des stratégies pour arriver à financer les deux dernières années de thèse et l’année de recherche d’emploi qui suivra la fin de la thèse (le tour de france pour trouver un poste lorsque l’on a obtenu la qualification est particulièrement onéreux (mais peut-être pris en partie en charge par pôle emploi), et je ne parle pas de l’agrégation (du supérieur) où quand on vient de la province il faudra débourser 5 ou 6000 euros pour pouvoir aller à la leçon de 24H si on a la chance d’y aller. Si le contrat doctoral couvrait les deux dernières années, la question ne se poserait pas, on toucherai le chômage tranquillement pendant une durée limitée et on serait en recherche active d’emploi donc pas de risque de radiation.
Et là, il n’est question que de ceux qui ont eu un contrat doctoral, les autres sont justes dans la merde du début à la fin… Quant à la possibilité de refuser les thèses non financés : ce serait drôle, mais impraticable à l’heure actuelle dans la mesure où les travaux dirigés au sein des facultés sous encadrés ne peuvent se faire sans avoir recours aux doctorants et même aux étudiants … (des IEJ, des écoles d’avocat, etc. pour ce qui est du droit). Donc interdire les thèses non financées à l’heure actuelle serait un suicide pour ces filières. Sauf bien sure si on décide de créer et financer (pour de vrai) des postes d’E-C dans l’ESR. Mais vu les coupes budgétaires annoncées tous les ans, c’est loin d’être à l’ordre du jour.
8 juin 2016 à 16:44
PR02
2500 HETD vacantes d
8 juin 2016 à 16:46
PR02
2500 HETD vacantes dans ma petite faculté de droit du fin fond de la province. On ne peut tout simplement rien faire sans les vacataires, dont les doctorants. Plus simplement, sans eux, on ferme la faculté ou on maintien péniblement 2 années de licence. Et pourtant, on a bien 500 inscrits en L1.
8 juin 2016 à 17:02
mixlamalice
je vais être un peu cash, mais je trouverais quand même étrange de créer des postes d’EC comme « récompense » aux mauvaises pratiques de certaines filières…
8 juin 2016 à 17:27
jako
@ Linoa & Co: non mais quelle idée d’aller bosser dans un milieu aussi merdique et dévalorisé que l’Université???!!! Vaut mieux être footballeur ou animateur télé!! D’ailleurs dire aujourd’hui « j’ai fait Normale Sup » c’est archi ringard (on ne parle évidemment pas de la fac…): il vaut mieux dire « J’ai fait Koh Lanta ou Les Anges de la téléréalité »… :)
8 juin 2016 à 17:32
Oook
Pour poursuivre dans la veine de mix, j’ai quand même un peu l’impression que ce qu’on dénonce c’est plus du travail dissimulé que du précariat…
8 juin 2016 à 18:59
henri IV
@mixlamalice (8 juin 2016 à 09:26), merci à vous, je ne vois pas un mot à enlever à votre réponse.
J’ai souvent ici mugi contre les caricatures faites aux SHS. Je suis en section 23 cnu (31 cnrs), je dirige des thèses et suis impliqué dans la gestion de l’école doctorale depuis quelques années maintenant. Et je l’ai écrit plusieurs fois ici même, dans notre section et dans notre labo, plus de thèse non financée (à part pour des gens travaillant en CDI à côté, ce qui est rare) et thèse en 3 ans, dérogation possible pour l’année 4. Après, on en débat. Mais si le thésard a eu le parcours qui est devenu la norme pour nous (bourse régio ou contrat doc) plus années d’ATER, c’est niet si pas de soutenance en vue.
Je suis parfaitement conscient de la précarité des doctorants, j’en ai été un il y a plus de 20 ans. Mais quand je vois que chez nous ils ont un bureau, un ordi prêté par le labo (ce sont des vieux mais bon), une salle pour manger, l’accès à la voiture de fonction du labo, (et ouais), l’accès pour demander et commander tout ce qu’ils veulent à égalité avec les titulaires, et qu’ils sont payés (le niveau de salaire est pas terrible c’est vrai), et que malgré ça ils finissent pas ds certains cas, et bien des fois ça me fout les abeilles grave.
8 juin 2016 à 19:04
mixlamalice
@Henri IV: merci de démontrer que des initiatives pro-actives de, disons, « professionnalisation » du doctorat et de l’encadrement doctoral, ont été entreprises, en local ou bien même dans certains cas à l’échelle nationale dans certaines disciplines ou sous-disciplines. Et qu’elles sont possibles, que ça marche.
Que le statu quo relève donc, plus que de la fatalité, surtout de la facilité.
8 juin 2016 à 21:45
Rachel
@Linoa, si on parle des exigences du CNU, je crois qu’on parle des conditions d’obtention de la qualification. En gros ça veut dire que la grande majorité des doctorants de LSHS veulent devenir EC (combien de candidats pour combien de postes ?) – ça veut dire aussi qu’il y a peu d’ouvertures pour les docteurs hors de la fonction publique. Tout cela introduit une grande déviance dans le système et le CNU devrait sérieusement s’interroger sur ses pratiques étant donné les dégâts occasionnés. Certes je peux comprendre qu’ils font un filtrage afin de diminuer le nombre de candidatures MCF. On simplifierait grandement la situation en supprimant la qualification. On pourrait aussi gagner si on normalisait la production scientifique avec le nombre d’année pour l’obtenir.
Ensuite, pour la deuxième perturbation (enseignement), je crois que c’est directement l’université qui est en cause. Je me demande où est la limite du travail dissimulé, de la légalité de ces situations. Je suis d’accord que faire quelques heures d’enseignement au cours de sa thèse est intéressant et formateur, mais si c’est pour faire un plein service à l’équivalent d’un EC, là on se demande si c’est bien raisonnable. Tout cela n’existe pas ou très peu en « sciences dures » et les EC LSHS devraient venir faire un stage de déontologie chez nous, peut-être pourraient-ils alors aborder le thème d’une université socialement responsable ?
Par ailleurs, une évolution qui pourrait être positive, c’est supprimer le statut étudiant aux doctorants. Je suis d’accord qu’il est anormal que les doctorants soient si peu représentés dans les conseils centraux. A mon avis il devrait y avoir un collège spécial pour eux afin d’assurer une représentation.
8 juin 2016 à 22:38
Helios
J’ai été parmi les derniers à avoir une thèse d’état. A cette époque il suffisait d’avoir une thèse de troisième cycle, d’un niveau nettement plus bas que la thèse actuelle, pour avoir un emploi permanent. A l’époque, j’ai pensé que le but de l’institution de cette nouvelle thèse, de niveau intermédiaire, en plus d’avoir un diplôme équivalent à ce qui se faisait ailleurs, était d’avoir du personnel à prix cassé. Mais on aurait plus aller encore plus loin : pourquoi pas des emplois précaires jusqu’à l’habilitation ?
8 juin 2016 à 23:21
henri IV
@ Rachel, dans mon université, les heures d’enseignements confiées aux doctorants sont de plus en plus corsetées (avec un maquis de textes qui se contredisent parfois), mais il est globalement impossible d’aller au delà de 64h éq td, quelquefois 96h éq td par an. Théoriquement et pratiquement, nous ne pouvons vraiment pas exploiter nos doctorants sous forme de travail dissimulé, sauf parfois à l’UFR… de droit, qui en connaisseur des textes, se permet de mieux les contourner… oups…
9 juin 2016 à 00:40
FBLR
@Hellos
Ce que vous décrivez c’est le cas allemand.
Mais ce n’est pas vraiment comparable avec la France. Il y a certes une précarité exacerbée avec des contrat d’un an renouvelable, mais au moins, dès la thèse, une personne seule peut résider dans la ville où le doctorat est préparé.
Très honnêtement, je préfère de loin ce système au nôtre où le recrutement est une lotterie. Et il donne plus d’annéesimple pur faire émerger les « permanents ».!×
9 juin 2016 à 08:05
Gueux
@Helios: « pourquoi pas des emplois précaires jusqu’à l’habilitation ? »
Vous ne croyez pas si bien dire, c’est exactement ce qui m’est arrivé.
9 juin 2016 à 09:09
PR02
@Rachel: à propos de la « déontologie » des EC. Je suis un peu perplexe sur cette affirmation. En droit, on souffre d’un sous-encadrement chronique en titulaires au niveau national (avec des progressions d’inscription des étudiants assez délirantes… je chercherai les chiffres si vous souhaitez). A partir de là, une fois qu’on a épuisé nos supports de contrat doctoral avec mission d’enseignement et d’ATER (ce qui dans la plupart des universités ne va pas chercher bien loin), il nous faut des vacataires pour assurer, au moins, les TD. Vu les contraintes que cela implique (temps de préparation, de correction…), les « professionnels » sont assez peu nombreux à accepter d’en faire vue la rémunération assez misérable qu’on leur propose (j’en connais quelques-uns, d’ailleurs, qui choisissent de ne pas se faire rémunérer quant ils voient la paperasse que cela implique: ils viennent tout simplement faire leur « marché » pour leurs futurs recrutements). Très clairement, un avocat ou un notaire (vu son taux horaire dans son cabinet ou son étude) perd de l’argent s’il fait des vacations. A partir de là, seuls les doctorants (ou jeunes docteurs à la rigueur) constituent un réservoir véritablement exploitable (j’utilise ce terme à dessein) de vacataires, notamment pour enseigner en niveau L.
J’envie souvent mes collègues d’autres disciplines qui ont tellement peu d’étudiants qu’ils peinent à boucler leur service. Nous, c’est très clairement l’inverse.
9 juin 2016 à 09:33
Damien
@Gueux
« Vous ne croyez pas si bien dire, c’est exactement ce qui m’est arrivé. »
Je connais d’autres exemples (pas le mien). A l’INSERM où on recrute (nettement) plus en CR1 qu’en CR2, je serais curieux de connaître le taux d’habilités parmi les recrutés CR1…
9 juin 2016 à 09:42
Damien
@PR02
Pourquoi n’imposez-vous pas un tirage au sort en L1, pour arriver par exemple à 200 étudiants maximum ? Il y a un moment où, plutôt que d’exploiter une main d’oeuvre corvéable sous le prétexte qu’il faut bien que la machine tourne, la déontologie imposerait plutôt de casser ladite machine.
L’autre possibilité, c’est de réduire drastiquement les TD en L (et carrément les supprimer en L1), à charge pour les étudiants de se débrouiller pour faire des exercices ou assimilés. Cette évolution se retrouve chez nous dans des filières surchargées (bio, STAPS), sans parler bien sur de médecine (TD ? c’est quoi ça ?).
9 juin 2016 à 10:36
PR02
@Damien: Personnellement, je suis plutôt pour « casser la machine » ou réduire la voilure (y compris quand on nous demande d’effectuer des tâches relevant du « bénévolat » du genre surveillance d’examens ou organisation d’oraux divers ne relevant pas des disciplines que l’on enseigne). Mais je suis visiblement minoritaire sur ce point, avec des collègues qui brandissent « l’intérêt général » et l’idée « sacerdotale » de l’enseignement universitaire (je rigole). La suppression des TD en L (notamment en L1) est purement inenvisageable au regard des exigences méthodologiques en droit (on n’apprend pas à lire et comprendre une décision de justice en amphi). Quant au tirage au sort, cela relève, il me semble, du rectorat sur demande de la présidence, qui ne voit pas d’un bon oeil une telle limitation en droit (ça fait des étudiants, donc des sous, pour un coût très faible).
9 juin 2016 à 10:39
Damien
Et sinon, quand vous parlez de 2500 HETD, c’est une fois déduit toutes les heures sup déjà faites par les EC ? Parce que c’est moins, je pense, que le nombre d’heures sup effectuées rien que par les EC du département de bio de mon UFR (de province).
Enfin de toute façon quand y aura plus les sous ni pour payer les vacations, ni pour payer les heures sup (ce qui, chez nous, risque bien d’arriver tôt ou tard), il faudra bien arrêter de les faire.
9 juin 2016 à 10:45
Damien
« l’idée « sacerdotale » de l’enseignement universitaire »
Ben c’est-à-dire que si le « sacerdoce » doit s’appliquer aux autres, l’argument laisse perplexe.
« La suppression des TD en L (notamment en L1) est purement inenvisageable au regard des exigences méthodologiques en droit »
Vous croyez vraiment que l’argument ne s’applique pas aux autres ? Déjà, il suffit de regarder médecine : apprend-on à établir un diagnostic en suivant uniquement des cours d’amphi ? Et pourtant il n’y a que ça en PACES. L’exigence méthodologique s’efface devant l’impératif.
9 juin 2016 à 10:58
PR02
J’avais cru comprendre que, de toute manière, en première année de médecine, on faisait beaucoup de choses qui n’avaient pas de réel lien avec le fait de soigner (et que le diagnostic, c’était surtout une fois « sur le terrain »). Pour ce qui est des 2500 HETD, c’est une fois les heures sup des statutaires comptées.
Sur le plan méthodologique, la difficulté particulière en droit est que les exercices classiques que l’on fait dès la première année sont ceux exigés lors des examens et concours professionnels (avocat, magistrat…). Et que 4 ans ne sont pas de trop pour acquérir cette méthode.
9 juin 2016 à 11:02
PR02
… et je vois pas mal de collègues scientifiques ou économistes venir pleurnicher chez nous pour qu’on ouvre des bi-licence (genre « droit et sciences », « droit et économie ») afin qu’ils récupèrent du service alors qu’ils sont en sous-service / surencadrement.
9 juin 2016 à 11:17
Damien
@PR02
« on faisait beaucoup de choses qui n’avaient pas de réel lien avec le fait de soigner (et que le diagnostic, c’était surtout une fois « sur le terrain »). »
Effectivement, donc comme de toute façon on ne le fait pas, autant continuer à ne pas le faire, c’est ça ?
« Sur le plan méthodologique, la difficulté particulière en droit est que les exercices classiques que l’on fait dès la première année sont ceux exigés lors des examens et concours professionnels (avocat, magistrat…). Et que 4 ans ne sont pas de trop pour acquérir cette méthode. »
Encore une fois, je ne vois pas la différence avec d’autres disciplines (y compris avec concours, d’enseignement par exemple). Je pense que vous singularisez quelque chose qui n’a pas lieu d’être (même si je comprends pourquoi vous le faites).
« … et je vois pas mal de collègues scientifiques ou économistes venir pleurnicher chez nous pour qu’on ouvre des bi-licence »
La situation varie énormément selon les disciplines. Et chez nous les départements en léger sur-service ont tendance à vouloir ouvrir toujours plus de formations spécifiques, de façon à justifier leurs demandes de postes et autres ATER (face à des départements qui n’ont pas besoin de se forcer pour montrer qu’ils sont en surcharge). Et puis il y a un peu l’idée qu’avec une bilicence, on aura de meilleurs étudiants et des cours plus agréables.
9 juin 2016 à 11:49
PR02
En effet, peut-être que l’on vit sur l’idée d’une plus grande spécificité des exercices juridiques. Toutefois, lorsque j’en parle à ma compagne enseignante (non universitaire non juriste), elle constate toute de même que la méthode juridique est nettement plus particulière et délicate à acquérir que ce qu’elle a pu faire étant étudiante.
9 juin 2016 à 18:48
Astronaute en transit
Le « doctorat pour tous » sent fortement l’UNEF… qui est peut-être le vrai visage de ces « mobilisés », et à ce stade là on peut comprendre qu’il n’y ait point de débat possible. Quand à la revendication d’un CDI à vie dès le début de la thèse, c’est finalement la revendication d’un statut d’énarque… assez curieuse car si l’on insiste dans certains quartiers pour l’obtention de l’agrégation avant la thèse, ces gens là sont donc déjà techniquement fonctionnaires…
Comme cela a été déjà dit dans le billet la situation relfétée ici est sans doute celle des sciences humaines… une nouvelle illustration de la gabegie qui règne non seulement dans la gestion des personnels mais aussi dans le cadre d’une réflexion sur les finalités des études et formations dans ces disciplines.
Depuis nos dernières discussions sur le sujet je ne crois pas être plus éclairé sur le sujet. Oui, la thèse est un travail, mais à finalité avant tout personnelle dans le domaine des sciences humaines, car il est très rare que ces recherches là débouchent sur des dépots de brevets, inventions et créations d’entreprises et d’emplois. De là, je vois mal comment, à défaut de tâches définies dans les missions de l’université (enseignement, tutorat, gestion administrative, que sais-je…) qui méritent rémunération régulière. Considérant que la thèse est un travail très particulier dans la hiérarchie des travaux universitaires, et réservé à une minorité, il serait d’ailleurs très incompréhensible pour une majorité de non-thésards que ceux ci doivent disposer d’un traitement de faveur. Pourquoi ne pas alors rémunérer le moindre quidam à quelque stade que ce soit des études et formations supérieures? C’est tout le dilemme qui se pose autour du concept de revenu universel de base (car les non-étudiants pourront aussi bien faire valoir, avec quelques arguments raisonnés, qu’eux aussi sont des précaires)
Je me demande si on ne finira pas, pour éviter des « mouvements sociaux » (pardon, des blocages, assortis parfois d’actes de banditisme) on ne fera pas un petit « cadeau » (payé par les autres) à ces chers doctorants. Est-ce que cela sera juste, c’est une autre question. Est-ce que cela sera efficace, c’est encore une autre!
Mon avis est que le seul vrai levier où essayer d’améliorer la condition des doctorants est au niveau des bourses (il faut des fondations prospères pour cela) et d’offrir de vraies opportunités de travail pour l’université, pour peu que cela soit dosé pour ne pas empièter sur le temps nécessaire de recherche et de de rédaction. J’avoue que ce n’est pas très innovant par rapport à ce qui existe déjà. Je crois aussi que cela nécessite des universités financées, et ce aussi par droits d’inscription (et je crois que les doctorants, au moins en début de thèse, doivent acquitter aussi des droits pour participer et être personnellement impliqués et responsabilisés dans ce financement universitaire).
Bon, maintenant je me demande qui va me tomber dessus à bras racourcis pour avoir osé émettre de pareilles hérésies.
9 juin 2016 à 19:52
henri IV
@ astronaute-troll: en effet vous cherchez. vous ne lisez pas les posts précédents, ou vous faites semblant. Vous avez au moins 3 lunes de retard, ou vous faites semblant. Libre à vous.
9 juin 2016 à 19:55
Rachel
@PR02, toutes les disciplines ont leur spécificité. Mais on a un statut unique et la logique voudrait qu’on dimensionne un peu le travail en fonction des forces en présence, du statut et de ce que permet la loi. Mais j’imagine que faire trimer les thésards en vacations pendant des années est légal et globalement accepté (par les thésards et les universitaires), donc tout va bien.
@Astronaute-l’hérétique, les différences sont manifestement aussi sur la perception de ce que peut être une thèse dans une discipline. Vous dites que la finalité d’une thèse est avant tout personnelle. En sciences dures, il me semble que ce n’est pas trop le cas, du moins le travail du thésard est intégré dans les thématiques du laboratoire et ce travail du thésard est une des briques de l’édifice. En termes de temps d’enseignement, c’est plafonné à 64 heures eq/TD et les thésards ont signé un contrat doctoral (pas de thèse non financées), sauf peut-être certaines bourses de gouvernements étrangers.
10 juin 2016 à 11:16
Astronaute en transit
@ Rachel: sur la finalité de la thèse, d’accord avec vous sur les possibles différences entre sciences humaines et sciences dures, c’est bien pour cela que j’en ai fait la mention. C’est aussi pourquoi, de mon point de vue, il me semble délicat d’envisager, avec ces différences de cas, des solutions uniformes s’appliquant à tous les doctorants… même si certains estiment qu’on n’a qu’à les fonctionnariser collectivement. Je penche plutôt pour un traitement au cas par cas, en demandant aux universités d’agir au moins sur des principes généraux de traitement afin de lutter contre la précarité. Cela dit, vous le savez bien, je dis ici depuis longtemps (et ça me vaut de nouvelles accusations d’être un troll) que la précarité dans l’enseignement supérieur et la recherche ne se concentrent pas sur les seuls doctorants. Donc, pour s’attaquer de façon crédible au problème des doctorants, il faut aussi accepter de le faire pour un nombre d’autres problèmes de gestion, de culture (ou d’absence de tout cela) dans tout le système.
10 juin 2016 à 19:44
Rachel
@Astronaute, que faudrait-il faire alors pour tenir compte des spécificités des disciplines ? Financer une durée plus longue de thèse en LSHS ? Si la raison est celle mentionnée par Linoa, alors ça ne servira à rien, car le CNU augmentera alors ses critères afin de maintenir le même nombre de qualifiés. Une autre idée serait de redimensionner les exigences à hauteur de la durée des 3 ans.
10 juin 2016 à 23:09
henri IV
de Rachel : »Une autre idée serait de redimensionner les exigences à hauteur de la durée des 3 ans. » c’est ce que nous faisons en section 23 depuis de nombreuses années.
10 juin 2016 à 23:25
Rachel
@henri IV, alors reste juste à considérer pareillement la problématique de l’HDR de la « communauté section 23 » …
10 juin 2016 à 23:34
Astronaute en transit
@ Rachel: la raison pour laquelle je crois que la finalité d’une thèse de sciences humaine est souvent très personnelle (et ce plus qu’en sciences dures) tient aussi au fait que le sujet, dans ces disciplines, peut impliquer non seulement des travaux avec des sources différentes mais au nombre très varié, ce qui, en cours de route, peut impliquer aussi des calendriers très différents. Et chaque thésard va lui (elle) -même être plus ou moins efficace, inspiré (pour ne pas dire aussi matériellement et moralement soutenu) pour accomplir ces tâches à un rythme qui lui sera propre, ou parfois imposé par les circonstances. La grande leçon que j’ai retenu de ma propre thèse, c’est la grosse part d’imprévu… et ce malgré le fait qu’au moment de présenter ma candidature, je croyais dur comme fer avoir un calendrier très raisonnable de mes travaux sur trois ans!
Je ne suis pas un militant de l’uniformité, autant que je désapprouve qu’on se serve des cas différenciés pour plaider en faveur du laxisme. Je ne crois pas qu’il soit scientifiquement prouvé qu’une thèse de sciences humaines doive forcément prendre plus longtemps à faire qu’une thèse de sciences dures, mais compte tenu des expériences, on devrait intérioriser cela comme possible, ou probable, et être préparé à gérer ces situations.
Mais vous verrez ici une fois de plus que je ne suis pas pour que ces systèmes soient pilotés par l’Etat ou ses agents, car les thèses, qu’elles aient des finalités personnelles ou collectives, ne sont pas entreprises pour la gloire de l’Etat ou démontrer l’infinie supériorité intellectuelle du fonctionnaire lambda sur le pauvre quidam sans statut public.Je suis pour qu’on dissolve le CNU, qu’on retire la tutelle étatique oppressive sur les universités et instituts de recherche, et que les gens apprennent à se débrouiller, à être responsables de leurs projets et entreprises et que cela valent la peine pour eux d’engager un terme d’effort, sous forme de reconnaissance professionnelle ultime (ce que l’Etat ne fait absolument pas, de toute façon).
Comme je l’ai précédemment écrit, je n’imagine pas de solution toute faite, de recette magique, yaka yaka, face à la diversité des situations qui sont celles des thésards. Tenter de les faire tous entrer dans une formule parce que cela sert les intérêts du système étatiste, des lobbys disciplinaires en quête de moyens, voire des fanas de l’aménagement du territoire (si, si, on parlera bientôt de thèses comme un service public de proximité!), à mon avis cela ne va aboutir qu’à mettre ensemble, une fois de plus, tout un tas de contradictions… et ce faisant on ne sera pas, au bout du compte, plus avancé que moi avec mes suggestions émises dans le vague.
11 juin 2016 à 07:23
mixlamalice
Les th_ses ne sont pas entreprises pour la gloire de l’Etat, mais bon c’est lui qui paye dans pas mal de cas, hein. (et même pour des thèses industrielles CIFRE, c’est lui qui paye un bon paquet aussi)
11 juin 2016 à 07:50
Astronaute en transit
Très bonne remarque… d’ailleurs, pour une fois que quelqu’un semble se soucier de la bonne façon dont est utilisée l’argent de l’Etat, c’est à saluer!
D’où une autre question, qui me semble aller de pair avec ma proposition qu’on ne peut mettre tous les cas de figure ensemble, c’est: l’Etat devrait il financer toutes les thèses? Pour moi, évidemment, c’est non.
11 juin 2016 à 10:54
Rachel
@Astronaute, je peux certainement comprendre que la thèse en LSHS soit beaucoup plus un travail individuel, comparé à une thèse en sciences dures où le travail en équipe est plus développé. Mais dans les deux cas, il me semble que ça vise à répondre à des questionnements qui ne sont pas individuels (si ?). Ceci dit, je ne vois pas trop le rapport avec la longueur des thèses ou sur la problématique du financement. En science dure aussi les choses ne sont pas forcément linéaires : par exemple, une thèse expérimentale est très dépendante du fonctionnement des machines : quoi faire s’il y a une panne importante ? Les fausses pistes sont également fréquentes et si on ne s’en aperçoit pas assez tôt, c’est compliqué de changer de cap en cours de thèse. En recherche, l’imprévu est à tous les carrefours et le facteur « chance » est certainement loin d’être négligeable.
11 juin 2016 à 21:05
henri IV
@Rachel: « reste juste à considérer pareillement la problématique de l’HDR de la « communauté section 23 » … » Ach! Nous en avons pas mal discuté ici en effet. Je n’ai pas grand chose à rajouter, si ce n’est que la plupart des collègues mcf apprécient la mise au point faite il y a deux mandats maintenant par les collègues du cnu. J’en ai profité aussi il y a qqs années.
Je plaide coupable. Juste un mot sur le « travail individuel » du thésard en SHS, c’est suranné en général, et totalement obsolète en section 23 depuis des années!
13 juin 2016 à 11:36
Astronaute en transit
@ Rachel: en fait, dans le domaine des sciences humaines, je reste sur une impression qui m’a été donnée par un confrère thèsard à Cambridge il y a bientôt 20 ans (le temps passe vite! mais cela montre à quel point on est immobiles sur le sujet). Il estimait qu’on autorisait (et finançait) bien trop de thèses dans notre discipline dans un contexte où nos départements allaient inévitablement décroitre en importance et en personnels. Je n’ignore pas qu’en sciences dures, au contraire, vous êtes en sous-effectifs et avez un intérêt à avoir plus de thésards.
De ce fait, il pourrait y avoir une tentation à rebasculer sur les sciences dures tous les financements de thèses disponibles et à laisser les sciences humaines gérer les conséquences de leurs sureffectifs. J’admets que c’est déprimant d’appartenir ainsi à un champ considéré comme n’ayant ni avenir ni valeur, et cela explique aussi la radicalité de certains de mes propos. Cela dit, je pense que ce rationnement (il n’y a pas vraiment d’autre terme) découle logiquement de l’entêtement à vouloir assurer un financement intégralement public des thèses doctorales, alors qu’il n’y a pas vraiment de consensus sur la finalité professionnelle des thèses, ni de stratégie pour intégrer les thésards dans le monde professionnel hors enseignement supérieur et recherche.
17 juin 2016 à 11:21
PR23
Une tribune illustrative de ce fil dans Le Monde d’hier :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/06/16/la-precarisation-de-l-enseignement-superieur-et-de-la-recherche-nous-asphyxie_4952106_3232.html
23 juin 2016 à 08:38
Reconnaissance et statut du doctorat | Pearltrees
[…] de notre statut en concevant la thèse comme du « non-travail » ou du « pas encore-travail »! Les doctorants sont-ils des précaires de l’ESR […]
4 août 2016 à 21:39
Les doctorants sont-ils des précaires de...
[…] Peut-on réellement considérer que les doctorants sont des précaires de l’ESR ? Il est incontestable qu’ils n’ont pas un poste permanent, donc ils sont clairement en situation de précarité. Mais d’un autre côté, ils préparent un diplôme et donc on peut considérer qu’ils ne sont pas en situation d’être en CDI (il me semble …). (…) – Gaïa Universitas, 06/06/2016 […]
28 septembre 2016 à 14:01
Viviane
Salut à tous,
Depuis le temps, j’espère que vous avez tous trouvé une solution, mais pour aider les autres Doctorants dans votre cas (et dans le mien), je poste la lettre que j’ai envoyée à Pôle Emploi suite à une radiation abusive (je ne me suis pas rendue à une énième convocation inutile où je devais répéter toujours la même antienne).
Je suis une Doctorante en Anthropologie sans financements et j’entame à grand peine ma 2e année. J’ai pour ma part 39 ans, et 20 ans d’expérience dans le boulot alimentaire, ce qui ne m’exonère pas des mauvais traitements faits à ma situation de « jeune chercheur ». Je tiens à témoigner pour les « séniors » comme moi qui se retrouvent dans la même galère que les plus jeunes.
Sur le débat autour de la valeur des diplômes, je suis entièrement d’accord sur le fait que 88 % d’une classe d’âge qui a le Bac aujourd’hui avec un niveau général aussi bas (j’ai repris mes études après 15 ans d’arrêt et c’est flagrant) ne peut aller en Doctorat, ou bien que celui-ci est forcément galvaudé aux entournures. Mais dans cette masse, il y a aussi d’excellents étudiants qui feront les meilleurs futurs chercheurs… à l’étranger. C’est-à-dire là où leur compétence réelle, prise au cas par cas, sera récompensée. Perso, je suis trop âgée pour partir, mais j’encourage fortement les meilleurs d’entre vous à vous casser de ce pays au front bas qui ne récompense que la médiocritude.
Voici donc ma lettre à Pôle Emploi :
« À l’attention de Mme Sophie X
À Aix, le 07/06/2016
Madame,
J’accuse aujourd’hui réception de votre courrier sur le site de Pôle Emploi.
Je suis très étonnée d’être radiée sachant que je m’étais présentée au rendez-vous du 03 mai dernier, mais que la conseillère n’était pas là (j’espère qu’elle n’a pas été radiée de son poste pour cela). Là dessus, personne ne s’est excusé pour m’avoir fait déplacer pour rien et à mes frais. En effet, pour venir à ce rendez-vous, j’avais dépensé deux tickets de bus, soit 2,20 € (c’est beaucoup sur une allocation journalière de 6 €, vous savez).
Quant au rendez-vous du 01 juin dernier, je n’ai pu y assister car je devais impérativement être à Marseille : en effet, suite au décès de mon père, je cherche à vendre son appartement qui est pour moi une charge financière impossible à endosser. Un potentiel acheteur ne pouvait le visiter précisément que ce matin du 1er juin. D’autre part, je n’ai pas à justifier de ma vie personnelle. Mon quotidien est déjà assez difficile à supporter comme ça.
Je suis d’autant plus suprise, sachant que :
1°) Je n’ai toujours pas d’emploi régulier qui me permette de vivre
2°) Je cherche activement un emploi chaque jour (liste de courriels à l’appui sur demande)
3°) J’ai cotisé pour le chômage en travaillant pendant douze ans (pour une somme de 40 000 € dont je ne verrai jamais la couleur alors que j’en ai tant besoin en ce moment)
4°) Je ne touche pas de RSA, je ne suis pas une délinquante ni un « cas social » qui pleurniche
5°) J’ai grand peine à payer mon loyer chaque mois grâce à mes CDD de veilleur de nuit / femme de ménage
6°) J’ai renoncé à manger correctement + à me soigner (résiliation volontaire de ma mutuelle)
7°) Je suis une personne qui ne fraude pas
8°) Je souhaite terminer ma formation professionnelle en parallèle à des emplois alimentaires car Pôle Emploi ne considère pas ma formation comme une formation
9°) Mon cas n’est éligible à aucune aide d’urgence de votre part (assistante « sociale » dixit)
10°) Je redis toujours la même chose à toutes les conseillères que j’ai vues : à quoi sert que je ressasse mon parcours, mes démarches, mes intentions tous les mois ? Vous savez déjà tout !
Je n’ai rien de plus à rajouter pour ma « défense » (car je suis accusée, c’est bien cela ?). Bref, j’accepte votre décision, quelle qu’elle soit. Après tout, faire une thèse de Doctorat comme je le fais et me battre durement pour m’en sortir… ça compte pour rien, n’est-ce pas ?
Bien cordialement,
Mlle X »
Inutile de vous dire que ma radiation a bien été effective après ce courrier. Donc, si Pôle Emploi offre plus de contraintes que d’emplois, autant se débrouiller tout seul et bosser au black (ce que plusieurs conseillers de Pôle Emploi m’ont encouragée à faire).
Je vous souhaite à tous beaucoup de chance dans vos parcours professionnels !
Viviane, Anthropologue passionnée et compétente