A l’occasion de la rentrée 2016 et APB, on reparle de l’orientation des étudiants. Comme on le sait, l’université n’a pas le droit de sélectionner ses étudiants. Ainsi, dans les filières sous pression (par exemple les STAPS), c’est un tirage au sort qui règle le problème quand le nombre de candidats dépasse les capacités d’accueil.
Il y a quelques semaines, il y a eu une petite polémique autour d’un éventuel tirage au sort pour les candidats à des études en médecine dans les universités franciliennes, lancé par Le Monde (source ici). Cela avait été rapidement démenti par le rectorat de Paris (source ici). A cette occasion, T. Mandon avait déclaré que tout sera fait pour que « le tirage au sort pour accéder en première année de médecine n’existe jamais: il n’y a pas plus stupide comme moyen de sélection surtout pour accéder à des filières très sélectives ». Je trouve cette déclaration un peu étonnante car la première année de médecine (Paces) n’est pas une filière sélective. La sélection se fait par concours à l’issu de la première année …
Pour ce concours Paces, il faut rappeler qu’il y a 80-85 % d’échec. Ainsi, certaines personnes souhaitent voir une sélection dès l’entrée en première année afin de limiter les dégâts. Par exemple, Frédéric Dardel, président de l’université Paris-Descates, dit : « le tirage au sort n’est pas une meilleure solution pour remédier à ce problème. Ce n’est pas le choix des universités » […] « On constate qu’en l’absence de sélection à l’entrée du système, on a des étudiants qui ont un profil pour réussir la première année de médecine, et d’autres qui ne l’ont pas, dont on sait qu’ils vont échouer. En cinq ans, aucun étudiant issu d’un bac non scientifique n’a réussi le concours à l’issue de la 1ère année dans son université. Cela représente 200 à 300 personnes par an, vouées à l’échec ». […] « Ce que je souhaite, c’est que l’on mette des pré-requis à l’entrée pour éviter que ces gens, qui n’ont aucune chance de réussir le concours, ne prennent, s’il y a un tirage au sort, la place de ceux qui ont une chance de réussir l’examen ». (source ici).
Jean-Loup Salzmann (président de la CPU) et Gilles Roussel (président de l’université Paris-Est Marne-la-Vallée) ont écrit une tribune dans Le Monde au sujet du tirage au sort, titrée « tirage au sort à l’université, une vaste hypocrisie antirépublicaine ». Extraits : « L’idéalisme républicain cultive ses mythes dont celui, bien ancré dans notre société, qui consiste à faire croire à chaque bachelier que, quelles que soient ses compétences, il pourra accéder à toutes les filières universitaires et y réussir. La réalité est toute autre ! Doit-on continuer à accepter ce gâchis social en se cachant derrière un pseudo-mythe de l’égalité, qui au bout du compte produit l’exclusion des plus fragiles ? » […] « Qui peut comprendre que l’accès à des filières « en tension » se fasse sans prendre en compte les compétences des bacheliers, leurs résultats scolaires et/au baccalauréat ? Personne. Qu’une admission dans une filière universitaire se fasse au hasard et non pas sur les qualités des candidats est une hérésie et ne peut que ternir l’image de l’université et de la qualité de ses diplômes ». […] « On ne repart pas de zéro en accédant à l’université, on y consolide ses acquis pour acquérir de nouvelles compétences. Les lycéens et leurs familles ont droit à la transparence et au langage de vérité ». Source ici.
En résumé, ce qui est demandé, c’est que les universités puissent sélectionner les étudiants sur des critères de pré-requis, certainement après un examen des dossiers. Par exemple, dans les filières beaucoup demandées, on pourrait préférer prendre un étudiant avec un bon dossier plutôt qu’un étudiant médiocre et ayant un bac inadapté. Dingue ! Cherche-t-on là à détruire l’égalité des chances ? Ou la réussite pour tous ? Au moins le tirage au sort avait l’avantage de mettre tout le monde à égalité des chances. De plus, il évite également le développement d’une hétérogénéité de niveau entre les universités. En effet, on imagine bien le cauchemar que représenterait une sélection par dossier, car très rapidement il y aurait une différenciation des filières en termes de performance, bref l’horreur total en termes d’égalité. Bien entendu quelques grincheux feront remarquer que, sans sélection-orientation, c’est difficile d’enseigner en première année tant le niveau des étudiants est hétérogène … que ceux-là se débrouillent et assument les conséquences de leur refus de sélection à l’entrée de l’université !
Devant l’augmentation du flux d’étudiants à l’université, et le peu de popularité de la pratique du tirage au sort, le gouvernement a demandé aux universités d’augmenter leurs capacités d’accueil, en particulier dans les filières sous tension. La réponse de la CPU est la suivante : « En tant qu’universités autonomes et responsables, et au regard de la dégradation de la soutenabilité financière de notre offre de formation qu’une telle augmentation, sans contrepartie, entrainerait, la CPU considère que la demande du ministère n’est pas acceptable en l’état ». Source ici.
Universités « autonomes et responsables » … ah bon ?
35 commentaires
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20 juin 2016 à 11:02
Helios
Concernant l’accès à l’université, les épreuves de sciences « dures » (maths et physique) seraient truquées au point que le succès au Bac (en particulier le Bac S) peut être obtenu par des élèves ayant à peine le niveau de l’école primaire d’il y a 20 ou 30 ans
Cliquer pour accéder à file.php
Ce collègue a l’air sérieux, je ne pensais pas qu’on en était arrivé là.
20 juin 2016 à 13:25
theobroma
@ Helios. En même temps, j’étais à l’école primaire il y a 30 ans, et il me suffit de regarder le sujet de maths du bac de cette année pour m’apercevoir que je n’aurais pas été capable de faire le sujet. Après je suis d’accord qu’il y a un pas entre être capable de traiter ce sujet et faire une licence ou un master de maths. Mais je ne suis pas particulièrement choqué par le fait qu’on propose aux candidats de résoudre des exercices qui ressemblent fortement à ceux qu’ils ont eu tout au long de l’année. C’était déjà le cas de mon temps il y a 20 ans. En fait, c’est le but d’un examen. La question, c’est plutôt de savoir si la réussite à cet examen doit ouvrir les portes de n’importe quelle filière sans examen des pré-requis. Et là c’est compliqué, parce qu’un filet trop lâche fait entrer des étudiants qui n’ont pas le niveau et sont voués à l’échec, mais un filet trop serré empêche de donner une seconde chance à des étudiants motivés mais n’ayant pas bénéficié des meilleures conditions dans leur scolarité antérieure. Pour moi, tout système d’admission sur pré-requis doit s’envisager en complément d’un système de passerelle ou d’année de mise à niveau avec admission sur dossier permettant de donner cette seconde chance.
20 juin 2016 à 13:46
Helios
@theobroma. Ce que l’auteur dit me semble-t’il c’est que l’unique qualité requise pour réussir le bac est de savoir détecter quand il faut faire des réponses-type sans avoir besoin d’y comprendre quoique ce soit, et que ces réponses-type sont les mêmes d’une année à l’autre, l’enseignement se réduisant à l’apprentissage de cette détection. Alors que le niveau réel de l’élève est celui du CM1 (d’antan).
20 juin 2016 à 14:03
theobroma
@ Helios. Oui j’ai bien compris. Mais ça me semble très exagéré. D’abord parce qu’il ne faut pas trop surestimer le CM1 d’antan (sérieusement…). Ensuite, parce que le texte comporte une bonne dose de délire complotiste qui ne fait pas très sérieux. Finalement, parce que je pense que reconnaître les réponses types dans un énoncé de maths, ce n’est pas si évident et ça suppose d’avoir compris un minimum quelque chose.
Le but du bac n’est pas d’identifier le pouillème de candidats qui feront de la recherche de haut vol. Le bac des années 1960 pouvait se permettre de proposer des exercices plus compliqués parce qu’il ne concernait qu’un nombre restreint d’élèves. Oui, avoir 10/20 de nos jours ou avoir 10/20 en 1970, ça n’indique pas le même niveau. Mais depuis il y a eu massification de l’enseignement supérieur. Le niveau global s’est élevé, même si le niveau sanctionné par le bac pour une matière donnée a baissé (en l’occurence en maths, ce n’est pas forcément vrai en biologie où le niveau de connaissances demandé a plutôt augmenté). Mais pour moi ce n’est pas le problème. Le problème c’est de savoir ce qu’on fait de ces bacheliers dans la suite de leur cursus.
20 juin 2016 à 14:38
Sirius
A propos du niveau en math, celui du ministère semble en cause. Il vient de reconnaître qu’il y avait une erreur dans l’épreuve de math de ce matin en série « S ». Mais ça n’est pas grave, nous rassure-t-il. Après tout, ce n’est que la matière principale de la série la plus prestigieuse…
20 juin 2016 à 14:44
Damien
@Helios
« c’est que l’unique qualité requise pour réussir le bac est de savoir détecter quand il faut faire des réponses-type sans avoir besoin d’y comprendre quoique ce soit, et que ces réponses-type sont les mêmes d’une année à l’autre »
Diable, pour avoir le bac il suffirait donc de bachoter, c’est très surprenant ! Et pas si différent de tous les autres concours ou examens (ou presque) que j’ai pu rencontrer. Mais fondamentalement c’est normal : on ne va pas demander un travail de recherche original à faire en quelques heures pour classer des étudiants, à fortiori quand on cherche à filtrer sur un niveau « moyen » et non sélectionner « un pouillème de candidats », comme dit theobroma (en gros, ce n’est pas le concours général).
Bon, je me moque, parce que ce qu’annonce ce message est bien pire, mais que je lis « ce collègue à l’air sérieux », j’ai un peu de mal. Il dit que les réponses sont constantes avec des sujets qui varient, j’ai envie de dire « ok, qu’il prouve ! ». Et il faut une constance qui soit suffisamment triviale pour qu’un « chimpanzé » (comme il dit) ne se trompe pas. Si c’est aussi simple qu’il le dit, ça doit être extrêmement facile à prouver !
A propos du bachotage, d’ailleurs, on voit le reproche inverse apparaître. Par exemple, il y a cette année une pétition au sujet des épreuves de physique donné aux lycées français à l’étranger, parce qu’on y trouvait (entre autres) une « question ouverte ». Je suis bien sur qu’il y a 20 ans, il n’y avait aucune « question ouverte » au bac. Il y avait peut-être plus de formalisme, mais c’était au contraire extrêmement cadré. Il parait (je n’en sais rien) que les programmes évoluent pour préparer à ce type de question. A titre personnel j’aurais tendance à préférer les bons formalismes bourrins, mais je n’oserais pas dire qu’ils demandent plus de réflexion…
20 juin 2016 à 15:14
Damien
@Sirius
Si j’ai bien vu où était cette erreur (cela dit, je n’arrive pas à trouver exactement où, on parle « d’un + au lieu d’un – dans un fraction », mais il n’y pas de signe « dans » les fractions, juste devant), c’est pas un problème de maths, mais d’informatique. Et l’erreur est effectivement très mineure.
21 juin 2016 à 13:34
François
» le succès au Bac (en particulier le Bac S) peut être obtenu par des élèves ayant à peine le niveau de l’école primaire d’il y a 20 ou 30 ans »
Étranges propos si on regarde les sujets actuels du bac S (intégrales, exponentielles, logarithmes népériens, statistiques, probabilités…).
Le summum de l’école primaire, c’étaient des problèmes de robinets qui remplissaient et vidaient simultanément des réservoirs, de trains ou de voitures qui se poursuivaient ou se rencontraient, d’âges de personnes qu’on retrouvait à partir de relations entre ces âges lors d’années différentes, etc … Pas une once d’algèbre, ni a fortiori d’analyse.
Seul point apparemment commun : les nombres » complexes ». Mais on parle alors de chose différentes … Dans le primaire, ce qu’on appelait autrefois nombre complexe était une mesure du temps (en heures, minutes, secondes), d’où une petite difficulté pour soustraire 1h 40mn de 5 h (penser à convertir 5 h en 4h 60 mn avant d’en enlever 1h 40mn ! ! ). Pour les littéraires du blog, ce qu’on appelle nombre complexe au bac S n’a rien à voir. C’est une notion nettement plus abstraite qui inclut les nombres imaginaires (racines carrées de nombres négatifs – oui ça existe dans la cervelle fertile des mathématiciens, et c’est utilisé pour des applications très concrètes, en particulier par les électriciens ! !) mais ça n’a jamais été étudié dans le primaire !
21 juin 2016 à 16:13
Damien
@François
« Étranges propos si on regarde les sujets actuels du bac S (intégrales, exponentielles, logarithmes népériens, statistiques, probabilités…). »
Oui, mais d’après cet individu, il suffit de répéter « bêtement » certaines réponses (malgré les changements de questions) pour avoir le bac. Et donc, au mieux, les élèves peuvent avoir le bac en ne « maîtrisant » pas plus que des notions vues en CM1.
En fait, ce que l’auteur dit (à propos du niveau comparé), c’est ceci « autrement dit, les seuls concepts complètement digérés et intégrés à leur « être » (de sorte que même si on les réinterroge dans 30 ans, ils les maîtriseront aujourd’hui) sont ceux qui relèvent des acquis allant du CP au CM1 à peu près » .
Ce qui évidemment n’a rien à voir avec dire « ceux qui passent le bac actuellement ont le niveau de l’école primaire il y a 20-30 ans » : ça c’est de la pure foutaise dans le plus pur style « non seulement je n’ai rien compris à ce que j’ai lu, mais j’en déduis une absurdité complète » (et je parle en tant que parent d’un enfant en primaire, ayant moi-même été en primaire il y a 30 ans). D’ailleurs, on peut aussi remarquer que ça ne dit rien sur le niveau comparé des CM1 actuellement et il y a 30 ans (ce que l’affirmation entre guillemets implique fortement), et pour cause !
Maintenant, l’affirmation du monsieur est (AMA) à la fois vraie et fausse, et elle l’était également il y a 30 ans :
– vraie dans le sens où, à l’exception de ceux qui feront des études scientifiques (et encore, pas toutes les sciences !), la majorité des bacheliers ne verront plus et n’auront plus besoin de notions mathématiques compliquées, c’est-à-dire allant au-delà des proportionnalités (et éventuellement de géométrie élémentaire), et donc il est peu probable qu’ils s’en souviennent dans 30 ans. Allez faire un test de connaissance des nombres complexes à un échantillon représentatif des personnes qui ont passé un bac C/S il y a 30 ans, vous verrez le résultat. Mais justement, ce fait n’a pas varié depuis 30 ans. Et même les proportionnalités, quand on fait le test chez certains hommes politiques, pourtant bacheliers il y a 30 ans…
– fausse parce que la proportionnalité n’est bien évidemment pas maîtrisée en CM1 (même si elle est ébauchée). Pas plus que les nombres relatifs (qui là ne sont même pas ébauchés). Et qu’au final, l’essentiel de ce qu’on veut voir en maths, c’est la capacité de raisonnement des élèves, qui n’a rien à voir avec une suite de « concepts » à « digérer » ou « intégrer ». Capacité de raisonnement qui est vue autant en CM1 qu’en terminale, mais qui n’est évidemment pas maîtrisée ni maintenant ni il y a 30 ans par la majorité des élèves de CM1 (sinon, mais pourquoi on s’em…derait à enseigner les maths ?).
Remarquez, j’aurais dû lire dès le début son discours jusqu’au bout : un type qui ne voit les probas qu’à travers la théorie de la mesure ne peut être qu’un abruti fini. Bon matheux, peut-être, mais abruti fini quand même.
22 juin 2016 à 10:26
Helios
@Damien Il me semble que la capacité de raisonnement n’est pas quelque chose qu’on acquiert progressivement jusqu’en terminale, mais une base indispensable qui doit être solide dès la fin de l’école primaire. Elle repose principalement sur la maitrise du langage (et de la lecture), qui est justement ce qui fait défaut actuellement (y compris chez beaucoup d’étudiants des universités). La suite de l’enseignement, après l’école primaire, n’est qu’une accumulation de connaissances, qu’on doit pouvoir comprendre, appliquer et relier entre elles, à l’aide de la capacité de raisonnement acquise précédemment. Le mathématicien Laurent Lafforgue (un autre abruti ?) a produit pas mal de textes sur l’effondrement selon lui de l’école élémentaire et de ses conséquences dans tout l’enseignement.
Au sujet du texte dont j’ai donné le lien précédemment, je connais l’auteur mais je ne me suis pas permis de donner son nom car il n’apparait pas sur le forum où il a été publié. Il est très fort dans son domaine et a aussi une expérience diverse dans l’enseignement. Je pense que ce qu’il affirme mériterait d’être testé en examinant à la loupe les sujets du bac, et en faisant une sorte de « reverse engineering » pour essayer de voir ce que ça révèle sur l’enseignement. En tous cas j’ai comparé le sujet du bac S 2016 et un sujet de bac C de 1975. Ce qui saute aux yeux c’est que le sujet 2016 est beaucoup plus long, c’est comme si on avait voulu hacher les démonstrations en indiquant toutes les étapes, alors qu’en 1975 on posait sèchement les questions.
22 juin 2016 à 14:49
Damien
@Helios
« Il me semble que la capacité de raisonnement n’est pas quelque chose qu’on acquiert progressivement jusqu’en terminale, mais une base indispensable qui doit être solide dès la fin de l’école primaire »
Et il me semble que je ne suis pas du tout d’accord.
« Elle repose principalement sur la maitrise du langage (et de la lecture), qui est justement ce qui fait défaut actuellement (y compris chez beaucoup d’étudiants des universités). »
Oui, j’imagine bien que c’est ce que peuvent sortir des mathématiciens qui se refusent à (ou ne savent pas comment) enseigner le raisonnement. Mais rien déjà que les notions d’abstraction ou de généralisation n’ont rien à voir avec la maitrise du langage ou de la lecture (un autre débat complètement idéologiquement biaisé, avec des arguments d’une « logique » tellement défaillante qu’on se demande sérieusement comment ils peuvent être tenus par des gens censés maitriser le raisonnement).
« La suite de l’enseignement, après l’école primaire, n’est qu’une accumulation de connaissances, qu’on doit pouvoir comprendre, appliquer et relier entre elles »
Mais en appliquant et en reliant entre elles ces connaissances, on apprend une démarche logique qui est justement (une partie de) la capacité de raisonnement.
« Le mathématicien Laurent Lafforgue (un autre abruti ?) »
Pour ce que j’ai pu en lire, Lafforgue a des choses intéressantes à dire sur l’enseignement, ainsi qu’une certains honnêteté intellectuelle qui manque à d’autres. Ça ne veut pas dire que je suis toujours d’accord avec lui, et surtout ses exceptionnelles compétences en mathématiques ne font pas forcément de lui la vérité suprême pour les questions d’éducation. Et si ça vous amuse, si Lafforgue déclarait la même chose que votre copain sur les probas, je le traiterai aussi d’abruti (sur ce sujet au moins). A vous d’en tirer les conclusions que vous souhaitez.
(et j’ajouterais qu’il est sidérant de voir des matheux se servir d’un argument d’autorité)
« Il est très fort dans son domaine et a aussi une expérience diverse dans l’enseignement. »
Qu’il soit très fort dans son domaine ne l’empêche apparemment pas d’être un abruti fini ailleurs. Et manifestement le fait d’avoir une expérience « diverse » dans l’enseignement (ça veut dire quoi, « diverse » ? Il a enseigné en primaire ?) n’empêche pas de raconter des âneries. Encore une fois, il ne s’agit que d’un argument d’autorité.
« Je pense que ce qu’il affirme mériterait d’être testé en examinant à la loupe les sujets du bac, »
Certes, apparemment il est en train de le faire, on attend donc les conclusions…
« Ce qui saute aux yeux c’est que le sujet 2016 est beaucoup plus long, c’est comme si on avait voulu hacher les démonstrations en indiquant toutes les étapes, alors qu’en 1975 on posait sèchement les questions. »
Certes. Ça peut tout aussi bien dire qu’en 1975 on encourageait le bachotage en posant des exercices types…
Mais est-ce si vrai ? Je regarde par exemple le sujet de l’académie de Nantes de 1975 et celui (national) de 2016. Il est indéniable que le sujet de 2016 a plus de pages. Celui de 2016 a également plus de textes « inutiles » (au sens mathématique), genre dire qu’on parle de rugby ou d’une usine. Le sujet de 1975, c’est de maths au sens le plus abstrait du terme.
Mais pour le nombre total de questions posées (ce qui devrait déterminer le « hachage » du raisonnement) :
1975 : 2 exercices (3 questions chacun) + 1 problème en 3 parties (A : 3 questions, B : 6 questions, C : 4 questions), total 19 questions
2016 : je ne détaille pas mais j’arrive à 28 questions.
Oui, mais les questions de 1975 comportent souvent des sous-questions non détaillées (en a, b, c…). Par exemple dans la dernière partie, une question contient de fait deux questions (« Déterminer … . Quelle est la structure … ») et une autre en contient 3 (« Calculer… . Résoudre… . Résoudre… »). Ce qui n’est pas le cas pour le sujet de 2016 (sauf à la rigueur pour des questions suivies d’un « Justifier »).
Si je prends en compte cette différence, j’arrive à en gros 30 questions en 1975, donc le même niveau de détail à supposer que les deux sujets demandent un travail équivalent (ce dont je doute, cela dit).
Conclusion : le « hachage » des questions peut tout aussi bien apparaitre comme une volonté de « hacher » la correction que de détailler les raisonnements (pour aider les élèves).
Tiens, à propos, je vois dans les épreuves de maths de terminale C de 1975 (Nantes, Paris) des exercices de probas assez poussés. Si je me fie à l’affirmation de votre copain (« La théorie des probabilités n’est pas accessible aux lycéens (ni même aux étudiant à moins de bac +3
ultra sélectif de maths). Pour des raisons qui font d’ailleurs qu’elles ne le seront JAMAIS ») dois-je en déduire que les programmes de 1975 étaient complètement grotesques et rédigés par des abrutis ou des « bas du front » (son terme à lui), ou alors les lycéens de 1975 avaient des compétences des polytechniciens actuels ? Ou plus simplement ce que je disais avant sur votre copain ?
22 juin 2016 à 19:38
François
@ Helios
» La théorie des probabilités n’est pas accessible aux lycéens (ni même aux étudiant à moins de bac +3 ultra sélectif de maths. Pour des raisons qui font d’ailleurs qu’elles ne le seront JAMAIS (pas de mesure de probas sur l’ensemble des parties tout entier, sigma-additivité, sommes infinies délicates, univers très difficiles à définir, il faut les supposer, mesure de Lebesgues pour calculer des espérances, des variances,etc)) »
Ça ressemble à du Pierre Colmez …
Mais au fait en mathématiques je n’ai jamais entendu parler que d’un seul Lebesgue … Avait-il un frère ? Et même dans ce cas, pourquoi mettre un « s » au pluriel d’un nom propre (sauf pour les Horaces et les Curiaces ! )
23 juin 2016 à 08:24
PR02
Bon, ben il semble que de toute manière le tirage au sort pour l’admission post-bac est illégal.
http://bordeaux.tribunal-administratif.fr/A-savoir/Communiques/Le-tirage-au-sort-pour-l-admission-post-bac-a-l-universite-est-illegal
23 juin 2016 à 10:30
Astronaute en transit
Évidemment cela n’a pas grand chose sur le niveau de maths au Bac S (comme vous tous je me suis délecté du fabuleux sujet de Philo « Travailler moins, est-ce vivre mieux? ») mais il me semble qu’on discute de tirage au sort.
Ledit tirage a non seulement soulevé de doctes protestations aux accents hugoliens, voila qu’elles sont déclarées illégales en tribunal administratif… et on sait d’où vient le recours, tout aussi évident.
Cette affaire ne fait que révèler une fois de plus la politique de l’autruche qui domine en matière universitaire. Oh, je sais, d’aucuns de nos interlocuteurs me diront qu’ils sont « pour la sélection ». Oui, c’est bien l’absence, voulue par principe, de sélection de quelque forme qu’elle soit (on fait bien du contrôle continu, mais à l’heure de « l’abolition des notes » ce sera un moyen de plus de la rendre impossible) qui nous entraine, année après année, à gérer de façon encore plus irrationnelle les suites logiques de ces inconséquences.
Quel que soit le nombre de personnes ici qui sont « pour la sélection », le fait est que cette sélection est refusée par une majorité de personnes (notamment des gens qui n’ont pas l’intelligence de venir discuter sur Gaia, na!) C’est le pouvoir de ces personnes qui pose problème. Il ne s’agit pas que de l’Unef, mais aussi de syndicats et de formations politiques que l’on connait et qui ont assez d’influence parmi les universitaires pour faire ce que ces organisations font par ailleurs à longueur de journée: bloquer. C’est même leur raison d’être.
Le tirage au sort est inique. C’est un point d’accord… mais souvent, nos désaccords porteront sur le pourquoi et le comment on en est arrivé à cette situation, et surtout, à la faire perdurer. Je doute que le climat actuel du pays soit révélateur d’une profonde envie de changement qui boulverserait bien des petits accommodements. Pour en revenir aux maths, la somme de toutes ces compromissions et renoncements, multipliée par la peur des probabilités d’enquiquinements à divers dégrés, égale la poursuite de la situation actuelle!
Chers sélectionneurs, il vous faudrait être collectivement plus influents, et pas seulement sur Gaia! Voulez vous assez l’être, je me demande?
23 juin 2016 à 15:45
Helios
@Damien En tous cas moi les problèmes de 1975 me semblent nettement plus durs que ceux de 2016. Le personnage qui a produit le texte que j’ai cité n’ai pas un « copain » mais un collègue. Je n’ai pas vraiment d’opinion quand aux probas (je n’ai pas été très loin dans ce domaine), et la notion d' »abruti » me laisse perplexe.
Par « capacité de raisonnement » j’entends ce qu’il y a de plus simple, la maitrise des opérations logiques élémentaires, « et », « ou », « implique », « équivalent à », qui m’a semblé absente chez beaucoup de gens y compris des étudiants, ou alors est incapable de se manifester de façon intelligible (par manque de maitrise du langage ?). Cela me semble indispensable dès la sortie du primaire, et je n’arrive pas à comprendre comment des gens qui n’ont pas cette maitrise ont pu obtenir des diplômes.
@François Il pensait peut-être que « Lebesgues » était l’orthographe exacte du nom de ce mathématicien, à moins qu’un « s » se soit glissé malencontreusement pendant l’écriture de son texte. Personnellement je trouve encore des fautes de frappe que je n’avais pas remarquées dans des textes que j’ai publiés il y a plus de 20 ans.
23 juin 2016 à 22:18
Damien
@Helios
« la maitrise des opérations logiques élémentaires, « et », « ou », « implique », « équivalent à », qui m’a semblé absente chez beaucoup de gens y compris des étudiants, »
En gros, vous considérez que la simple connaissance d’un langage permet à quelqu’un de « maîtriser » (sans les formaliser, mais assez pour les appliquer et expliquer de façon intelligible) les règles logiques de la déduction naturelle ? J’ai un doute.
Déjà, parce que la sémantique de ces connecteurs est très ambigüe en français (le ou est bien souvent exclusif, l’implication mélange causalité logique et équivalence, l’équivalence n’existe pas dans le langage courant). Ensuite, parce que certains raisonnements (en particulier les non intuitionnistes) peuvent rapidement être contre-intuitif, donc gênant pour celui qui voudrait maîtriser cela « intuitivement ».
En fait, je me demande si ce n’est pas justement en pensant que cela doit être « naturel » qu’on perd beaucoup d’élèves. Une langue naturelle n’est pas une langue logique. Peut-être suis-je complètement à côté de la plaque, mais j’aurais tendance à penser que la logique devrait s’enseigner (dans le secondaire) explicitement.
Et, bon, la « capacité de raisonnement » ne peut se limiter à ces 4 connecteurs logiques, il faut forcément ajouter les quantificateurs sinon on ne raisonne mathématiquement sur rien.
23 juin 2016 à 22:51
jako
@Astronaute: Juppé est contre la sélection, alors que NKM est pour. Quant à Pécresse elle était sur la même ligne que Juppé, elle qui déclarait sur Tweeter: « Sélection à l’entrée en Master: le manque de courage du gouvernement conduit les universités et les étudiants dans l’impasse. Il faut agir »
A quoi on n’a pas manqué de lui faire remarquer:
« rappelez moi qui était aux affaires en 2007-2012? Manque de courage également pour la précédente majorité ? »
L' »autonomie » sans la liberté de sélectionner mais avec l’obligation d’insertion professionnelle, quel foutage de gueule… Bravo l’artiste Pécresse…
24 juin 2016 à 11:55
Sirius
Après le feuilleton juridique de la sélection en Master, s’ouvre celui du tirage au sort. D’autres recours, d’autres jugements le déclarant illégal, une remontée au Conseil d’Etat. Tous ça va prendre des mois. Donc le ministère ne va rien faire, comme d’hab. Comme disait un célèbre ministre radical de la IIIème république: « il n’y a pas un problème politique qu’une absence de décision ne permette de résoudre ».
24 juin 2016 à 13:02
Astronaute en transit
@ Jako: vous vous souvenez le métier des gens que vous citez? ça commence par la lettre « F »… mais chut, je vais encore énerver des gens :)
25 juin 2016 à 09:14
mixlamalice
Tirage au sort illégal, sélection illégale, moyens supplémentaires hors de propos.
Donc, accueillez tout le monde, amenez les jusqu’au M2 (pour l’instant, bientôt: amenez les jusqu’au doctorat), à moyens et effectifs EC constants (au mieux).
Good luck.
Je pense que les recours vont se multiplier, la situation va donc finir par devenir explosive, seul façon je pense pour que les politiques s’y intéressent vraiment…
25 juin 2016 à 16:59
PR23
Je détourne le fil pour donner le résultat des pré-sélections Idex-Isite du PIA2 : Lyon, Cergy, Rennes, Pau, Nantes
25 juin 2016 à 19:03
PR23
En plus bien sûr des quatre finalistes de l’an passé, non retenus mais qui sont automatiquement « admissibles » pour cette année : Lille, Paris-est, Clermont-Ferrand et Montpellier
25 juin 2016 à 19:20
Marianne
Y a combien de places?
Moi je parie sur Lyon, Lille et Montpellier
28 juin 2016 à 08:34
FUBAR
Sur le PIA2, ma Comue s’est empressée de remonter un dossier après s’être faite laminer la première fois (avec le même dossier à peine remanié sur les bords) « parce que le ministère nous a demandé de candidater »… ha!ha!ha!ha! je pense que les mecs y ont cru, c’est ça le pire, alors qu’il était évident qu’on nous demandait de faire nombre pour que le truc n’ait pas l’air trop ouvertement décidé à l’avance. Rions.
Sur le tirage au sort et la sélection: retournez vous coucher, il ne se passera jamais rien.
28 juin 2016 à 17:12
jako
Dear Fubar, il m’est d’avis qu’il y a toujours moyen de faire pire et de descendre encore plus bas: nos politiques sont très forts pour ça et de toutes manières ils continueront à privilégier les CPGE et autres cursus sélectifs, et à achever la bête si elle bouge encore. On prend les paris?: après la sélection illégale, après le tirage au sort illégal, on finira par avoir droit aussi au redoublement illégal…. C’est papa et maman qui décideront pour le petiot…..
28 juin 2016 à 19:57
FUBAR
@Jako: bah, on y est déjà hein, avec ces délires de « droit au diplôme » de l’UNEF et puis surtout avec la compensation universelle et permanente de tout avec tout deux fois et avec beaucoup de sauce. Depuis que j’ai compris qu’un 6 n’empêchait pas de valider un bloc d’EC (il y a deux mois… des fois je veux pas voir) je pense que 6 va devenir mon maximum de notation.
Ce matin je suis allée spécialement à la fac corriger sur place les copies du rattrapage du second semestre. Erreur de débutante: aucune étudiant ne s’était déplacé. AUCUN. Et les collègues qui surveillaient s’étaient bien gardé de me le dire, tout comme la secrétaire. J’étais d’humeur chafouine, j’aurais dû en profiter pour mettre le feu. Mais c’est vrai qu’on est en droit d’hésiter quand il s’agit de supprimer le rattrapage, si utile. Je vais réviser mon investissement personnel à la baisse.
29 juin 2016 à 00:41
Marianne
Bah moi j’avais des étudiants(six sur soixante) mais comme je suis en déplacement la secrétaire m’a scanné les copies..du coup le rattrapage reste un truc foncièrement inutile mais pas foulant.
29 juin 2016 à 09:30
jako
@Fubar. J’avais oublié: après (ou avant d’ailleurs…) avoir rendu illégal tout redoublement, on prendra soin aussi de rendre illégale toute notation à cause de son caractère discriminatoire et traumatisant. Et on notera avec des pastilles de couleur. Tiens voilà-ti pas matière à monter un IDex en pédagogie innovante?…
http://www.laviemoderne.net/detox/142-une-etude-qui-denote
Un « créneau » à prendre, comme disait l’autre. Et soyez assurée que certains fonceraient dedans avec enthousiasme…
5 juillet 2016 à 23:17
Henri-IV
C’est l’été, les vacances, les stéréotypes, tout ça… Et coule la galère!
http://www.lemonde.fr/education/article/2016/07/05/le-gouvernement-conserve-les-rattrapages-en-licence_4963971_1473685.html
6 juillet 2016 à 14:20
FUBAR
Mes petits choux, pendant que Rachel se fait les ongles de pied dans un hamac et juste avant la fermeture annuelle, quelques analyses réjouissantes, frappées au coin de l’optimisme le plus béat.
C’est cadeau, ça me fait plaisir!
https://www.contrepoints.org/2016/05/17/253119-limplosion-tragique-de-luniversite
http://www.contrepoints.org/2012/09/29/98705-universite-ce-que-coute-labsence-de-selection
10 juillet 2016 à 12:04
Marianne
Ah ouaip! Effectivement c’est kado…Faut tout envisager maintenant alors : l’émigration en suisse, la reconversion en danseuse de french cancan…tout quoi
Merci FUBAR pour ces bonnes nouvelles, on ne sait déjà plus où donner de la tête…
10 juillet 2016 à 16:00
jako
Franchement Fubar z’êtes un peu rabat-joie…. C’est quoi l’enjeu national en ce moment? C’est de savoir ce qu’ont pris au petit déj les joueurs de l’équipe de France, et s’ils ont bien dormi cette nuit. Alors franchement l’Université française, on s’en tapait avant et on va continuer à s’en taper. Il y a bien plus important, non?
10 juillet 2016 à 18:33
FUBAR
Scandale! Mon commentaire vient de se faire trasher sur Gaïa! Disparu dans l’hyper-espace! je disais donc…
@Marianne: notez qu’il est possible avec un peu d’astuce et de bonne volonté de combiner l’exil en Suisse et le French Cancan. On peut me reprocher mon pessimisme, mais moi au moins je laisse entrevoir aux gens des projets internationaux, transversaux et innovants.
@Jako: Si on pouvait, comme aux USA, recruter des étudiants nullissimes en maths, en anglais ou que sais-je encore, mais hyper balèzes en sport collectif avec ballon, on pourrait défendre l’université ET le football dans un grand élan de liesse nationale que le monde entier nous envierait et en plus remplir les caisses plus sûrement qu’avec l’ANR.
Punaise, si seulement Mandon m’écoutait!
Y a pas de problèmes, y a que des solutions! FUBAR présidente!
25 juillet 2016 à 13:42
Poutine4ever
Tirage au sort et « La théorie des probabilités n’est pas accessible aux lycéens ». Il me semble que c’est pourtant à la portée d’un chauffeur livreur. Le bourbakisme continue de nous enfoncer dans le bourbier de la pensée non scientifique.
26 juillet 2016 à 15:13
FUBAR
Mes amis l’heure est grave! Normalement à ce moment-là de l’année, Rachel nous fait ses adieux à la scène avec la conviction d’un Charles Aznavour et en cœur nous la supplions de n’e rien faire… et là rien!! Je suis très inquiète. Si aucune preuve de vie ne nous est parvenue d’ici huitaine je déclenche l’alerte enlèvement.