Cela avait annoncé par E. Macron dans son programme : avec lui, pour s’inscrire dans une formation, il faudra avoir les prérequis nécessaires (dingue !). « Chaque université affichera les prérequis de chacune des formations qu’elle propose. Par exemple, pour une licence en sciences, ces prérequis pourront être des acquis minimaux en Mathématiques, en Sciences Physiques ou en Sciences de la Vie et de la Terre. Un lycéen ne disposant pas de ces prérequis pourra s’inscrire après avoir comblé ses lacunes, par des cours d’été ou par la validation de modules universitaires. Un « contrat de réussite » sera établi entre chaque étudiant et son établissement » (source : programme d’E. Macron). « Il n’est pas normal qu’on laisse un étudiant avec un bac littéraire s’inscrire en faculté de biologie sans vérifier qu’il sera capable de suivre les enseignements. Cela revient à envoyer nos jeunes vers un échec garanti » (source ici). Cela revient à dire que ce sera la fin du tirage au sort pour certaines formations sous forte pression et le début d’une période où on examinera le dossier des étudiants, bref le début de la sélection à l’université.
Sur le sujet, le gouvernement précédent a fait publier une circulaire, dans l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle, autorisant ce tirage au sort pour départager des candidats, alors même que Thierry Mandon, secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur, disait que c’était le « plus bête des systèmes » (source ici). Cela illustre bien la politique menée depuis 5 ans : ne rien faire qui puisse envoyer les étudiants dans la rue – donc ne rien faire.
Hier, la nouvelle ministre de l’ESR, Frédérique Vidal, a déclaré « Je ne serai pas la ministre qui pérennise cette pratique » (à propos du tirage au sort) (source ici). Elle va donc, pour la rentrée 2018, proposer une nouvelle forme de régulation. Peut-être mettre en place le programme du nouveau président ? En attendant, elle nous dit qu’elle va mettre en place une expérimentation sur les prérequis à l’entrée à l’université (source ici, par exemple). Mais une expérimentation de ce type, ça peut prendre du temps. Il faut d’abord choisir quel est le site qui servira de cobaye, il faut ensuite laisser le temps de l’expérience (plusieurs années s’il s’agit d’évaluer les taux de réussite), puis analyser les résultats, écrire le rapport de l’expérience et enfin proposer une réforme pour faire évoluer le système. Lancer une expérimentation de ce type, c’est un peu comme dire qu’on va créer une commission pour ne pas garder en main une patate chaude …
30 commentaires
Comments feed for this article
30 mai 2017 à 21:25
Dov Maro
D’un autre côté, les pré-requis sont une méthode qui fonctionne plutôt bien dans la quasi-totalité des universités mondiales…
30 mai 2017 à 21:55
Rachel
Oui mais bon le prérequis c’est le bac, non ? N’est-ce pas le premier diplôme universitaire ?
30 mai 2017 à 22:32
Henry IV
En effet, si pré-requis disciplinaires demandés, il faut changer la loi concernant l’accès à l’université. Il me tarde, on risque alors de rigoler… Si ce courage politique voit le jour, je tirerais mon chapeau. Pour vous dire je n’y crois pas.
30 mai 2017 à 23:03
Rachel
@Henri IV, faut-il vraiment changer la loi ? La loi donne un droit d’accès à une inscription à l’université (c’est ça ?), mais autorise-t-elle vraiment importe quel bachelier à inscrire dans n’importe quelle formation à l’université ? Ce qui est étonnant, c’est que quand le bac a été réformé, et tout particulièrement quand les bacs pros ont été mis en place, c’est qu’on ne s’est pas préoccupé de l’impact sur le supérieur et de la question des prérequis. Peut-être était-ce à l’université de s’adapter (pour le doctorat pour tous !).
31 mai 2017 à 09:22
Sirius
L’absurdité de la situation actuelle est bien celle-là, avec « le » bac, n’importe lequel, on peut s’inscrire dans n’importe quelle filière universitaire. La formule des « prérequis » est une voie étroite entre cette situation et donner aux universités le droit de sélectionner. Autrement dit : on vous garantit une place, mais pas n’importe laquelle.
La mise en musique exige une loi, donc du courage politique.
31 mai 2017 à 10:50
FUBAR
Ne suffirait-il pas de dire enfin que le bac est un examen de fin d’études secondaires et non de début d’études supérieures? Ce qu’il est dans la pratique puisque l’université se contente de faire de la figuration débile en allant signer quelques centaines de dossiers de bac en tant que présidents de jury; fonction honorifique qui déconcerte les collègues du secondaire, révoltés de constater que les EC s’acquittent rarement de cette tâche, ce qu’ils prennent pour du mépris, jusqu’à ce qu’ils apprennent, médusés, que ceux qui le font le font entièrement gratuitement…. bizarrement aussi ils sont toujours persuadés que nous sommes là pour exporter dans la dernière étape du bac (le repêchage de certains candidats pour une mention ou un oral de rattrapage) le laxisme qui est pour eux (ont-ils tort?) la marque de fabrique de l’université. Ils sont toujours soulagés de constater qu’on devance en général la fermeté qu’ils réclament (alors qu’ils doivent en permanence, en tant que correcteurs, céder aux injonctions ministérielles et avaler leur chapeau). Bref… Si le bac sanctionnait un niveau de sortie, il serait tout de suite bien plus simple de dire aux étudiants qu’on ne prendra pas les bacheliers littéraires en maths ou les bacheliers S en littérature française (attention, une provocation subtile s’est glissée dans cette phrase en apparence innocente), ou encore des bacheliers Pro un peu partout.
Je sais qu’il s’en trouve pour dire que ce serait une horrible discrimination à l’encontre les bacheliers pro, qui-ont-le-bac-après-tout-hein. Sauf que tout le monde sait (et c’est même dans la description du bac pro) que ce bac a pour vocation de redorer le blason des filières courtes professionnalisantes du secondaire et de former des gens capables de travailler tout de suite. Il n’a jamais eu pour vocation de conduire aux études supérieures et surtout pas universitaires générales. Mais quand j’entends proposer sérieusement comme nouveaux cursus innovants pour le PIA3 un cursus dont l’objectif est de permettre « d’amener les bacheliers pro au niveau du bac ES » je me dis que les universitaires sont des veaux et n’ont finalement que ce qu’ils méritent. En revanche, permettre a des gens qui ont eu un bac pro, qui ont bossé un certain temps, de reprendre des études dans le supérieur (je veux dire à la fac) ça devrait être une manière de ne pas barrer cette possibilité si effectivement elle peut tenter certains.
2 juin 2017 à 19:18
Lorne
le GROS problème est tout simplement réglementaire. Il va falloir changer les décret de 1802 et 1808 qui font du baccalauréat le premier grade universitaire… ça, c’est du lourd ;-)
2 juin 2017 à 20:04
FUBAR
@Lorne: Napo va se retourner dans sa tombe!! C’est l’histoire qu’on assassinerait, nos racines, notre identité, et pire encore! Je vois ça d’ici…
Et c’est vrai que la France éternelle du Général De Gaule n’a pas beaucoup changé depuis l’ascension du petit Caporal. Pourtant, lui il n’aurait pas hésité une seule seconde à vous moderniser tout ça… Ce pays me fatigue.
4 juin 2017 à 17:29
Dragan
@FUBAR: « Sauf que tout le monde sait (et c’est même dans la description du bac pro) que ce bac a pour vocation de redorer le blason des filières courtes professionnalisantes du secondaire et de former des gens capables de travailler tout de suite. Il n’a jamais eu pour vocation de conduire aux études supérieures et surtout pas universitaires générales. »
D’où l’importance des remises à niveau. Perso, ça m’aurait enlever une sacrée épine du pied. Vous savez ce que j’en pense FUBAR.
4 juin 2017 à 18:55
FUBAR
@Dragan: je ne suis nullement opposée aux remises à niveau. Soit elle se font sur la base d’une expérience professionnelle (et d’un gain de maturité), soit elle se fait dans un cadre institutionnel mais dans ce cas je pense que ça doit se faire au lycée, pas à l’université, car je ne vois pas avec quels bras.
5 juin 2017 à 13:52
Dragan
@FUBAR : Je suis d’accord avec vous et je n’ai jamais affirmé le contraire.
Maintenant au niveau gouvernemental, c’est pas dans les cartons. A leur niveau, l’objectif est plus de faciliter les orientations correspondant au mieux aux exigences du bac en question : bac général = université + prépa, bac techno = BTS ou IUT, bac pro = insertion pro + BTS…
5 juin 2017 à 14:40
FUBAR
Je pense qu’il n’y a pas d’autre choix que de procéder dans l’ordre, c’est-à-dire commencer par envoyer les gens vers ce pourquoi ils ont l’air préparés. Dans l’idéal cette mesure doit être suivie de mesures permettant suivant certaines modalités de revenir dans le supérieur général (mais pas n’importe lequel non plus, il faut qu’il corresponde à un projet construit et pas à un pis-aller), avec une remise à niveau le cas échéant. Pour ça il faut des sous, mais avec les économies réalisées en ne dirigeant pas vers les universités des gens qui n’ont aucune chance d’y survivre, on peut peut-être financer une partie de ces remises à niveau.
5 juin 2017 à 15:46
Dragan
@FUBAR: « Je pense qu’il n’y a pas d’autre choix que de procéder dans l’ordre, c’est-à-dire commencer par envoyer les gens vers ce pourquoi ils ont l’air préparés. »
Évidement, c’est logique. Mais ce que je voulais dire c’est que le gouvernement n’a RIEN fait pour accompagner les élèves issus de bacs technos et pros souhaitant réussir (légitimement) l’université.
« Pour ça il faut des sous » : toujours cet argument économique ! Et puis franchement, je trouve cela honorable qu’on dépense de l’argent pour des élèves qui la volonté de s’élever socialement grâce aux diplômes.
5 juin 2017 à 16:31
FUBAR
@Dragan: très honnêtement j’aimerais vraiment savoir combien, parmi les titulaires d’un bac pro, se retrouvent à l’université parce qu’ils l’ont choisi et parce que cela correspond à une véritable envie de savoir. Dans mon expérience l’écrasante majorité est là par défaut et attend que ça se passe sans même faire semblant de vouloir prendre les choses en main et suivre les conseils. Pas un seul n’ouvre un livre, pas un seul ne prend la moindre note en cours, pas un seul ne participe. Ils ne souhaitent pas tant réussir à l’université qu’y attendre l’occasion d’être accepté dans la voie de leur choix en étant couvert par la sécu, et si je me mets à leur place, je les comprends. Faut-il dépenser pour ça? ou dépenser pour leur permettre de poursuivre leurs études dans la droite ligne de leur formation secondaire?
Ce n’est pas en mettant plus de moyen à l’université qu’on va permettre à ces étudiants d’y réussir, c’est en les amenant, s’il le souhaitent activement, au niveau souhaité en amont qu’on leur offrira une passerelle vers le supérieur général. En amont ou dans les IUT. Au final je pense que très peu d’élèves de bacs pro seront vraiment désireux d’aller faire de la philo en fac en sortie de Bac. En revanche peut-être qu’ils seront plus nombreux à vouloir y revenir plus tard, à l’âge adulte. Je pense qu’il vaut mieux dépenser du fric à leur donner la possibilité de faire ce qu’ils veulent vraiment plutôt que de dépenser du fric à faire qu’un choix par défaut devienne une vraie possibilité de formation, parce que dans la majorité des cas ça ne marchera pas.
5 juin 2017 à 16:46
Rachel
@Dragan, un bac pro a un objectif : l’insertion professionnelle. Je ne pense pas qu’il y avait un objectif de poursuite l’étude. Là où c’est vraiment à se taper la tête contre les murs, c’est qu’on a considéré que c’était un bac et que donc c’était le premier diplôme universitaire. On n’a pas pensé ou oser remettre en cause ce principe. Peut-être que c’était trop compliqué de modifier les décrets de 1802 et 1808. Mais on a ce qu’on mérite : les universitaires sont allés présider les jurys de bac pro. Ajoutons aussi que finalement le fonctionnement actuel a des avantages (pas pour les jeunes, certes, qui viennent échouer en masse à l’université) : ça permet de diminuer le chômage des jeunes et ça permet aux universités de demander des postes du fait d’effectifs dans les formations.
5 juin 2017 à 19:50
Dragan
@FUBAR: « très honnêtement j’aimerais vraiment savoir combien, parmi les titulaires d’un bac pro, se retrouvent à l’université parce qu’ils l’ont choisi et parce que cela correspond à une véritable envie de savoir. »
J’en connais au moins un : moi ! et je pense qu’il y en a d’autres. J’avais aussi un projet professionnel et pour occuper le poste souhaité, il fallait passer par la case licence générale + master 2. J’avais également un réel intérêt pour la discipline que j’ai intégrée à l’université.
Je rappelle que beaucoup de ces élèves ont intégré le lycée pro à contre cœur alors que leur souhait initial était la voie généraliste. Voie qui prépare mieux au supérieur.
« Dans mon expérience l’écrasante majorité est là par défaut et attend que ça se passe sans même faire semblant de vouloir prendre les choses en main et suivre les conseils. Pas un seul n’ouvre un livre, pas un seul ne prend la moindre note en cours, pas un seul ne participe. »
Pour avoir moi aussi foulé les bancs de l’université, je peux vous garantir que certains bacheliers généralistes ne font pas mieux.
« Ils ne souhaitent pas tant réussir à l’université qu’y attendre l’occasion d’être accepté dans la voie de leur choix en étant couvert par la sécu, et si je me mets à leur place, je les comprends. »
Idée reçue. Et puis si ils ne font pas le travail demandé c’est aussi parce qu’ils n’ont aucun repères. Et puis c’est intimidant. En même temps, on a tellement diabolisé l’université (parfois à tord je vous l’accorde)) sur les enseignants aigri durs notant hyper sévèrement, taux d’échec, vie universitaire difficile… que ces bacheliers ont beaucoup d’appréhension.
C’est pas facile de s’adapter à la rigueur de travail d’une L1 quant on vient d’un bac pro.
@Rachel: « Là où c’est vraiment à se taper la tête contre les murs, c’est qu’on a considéré que c’était un bac et que donc c’était le premier diplôme universitaire. »
Vous avez raison. C’est bien ce que j’ai souligné dans un autre sujet de discussion il y a un an environ. Le bac pro est ni plus ni plus un coup de com politique dont l’objectif était de séduire les catégories modestes en leur faisant croire qu’avec le bac pro elles aillaient être considéré comme les autres . Or, c’est faux !
Ceci dit, ne broyons pas du noir, le bac pro a aussi des avantages, comme le fait de redonner confiance à des élèves qui étaient en difficultés au collège.
« Ajoutons aussi que finalement le fonctionnement actuel a des avantages (pas pour les jeunes, certes, qui viennent échouer en masse à l’université) : ça permet de diminuer le chômage des jeunes et ça permet aux universités de demander des postes du fait d’effectifs dans les formations. »
Donc pour vous, la solution est de ne pas accepter les bacs pros ?
5 juin 2017 à 20:34
François
@ Dragan
» le fonctionnement actuel a des avantages (pas pour les jeunes, certes, qui viennent échouer en masse à l’université) : ça permet de diminuer le chômage des jeunes »
FAUX ! si comme les politiques et les journalistes on ne parle que du taux de chômage des jeunes : plus il y a d’étudiants, plus ce taux est élevé (actuellement en France 24 % pour les 15-24 ans).
Quand dans chaque génération de 800 000 jeunes 799 999 seront étudiants et le 800 000ème (le plus nul des plus nuls) sera chômeur, le taux de chômage des jeunes sera de 100%
5 juin 2017 à 20:57
Rachel
@Dragan, oui je pense que les bacs pro ne devraient pas pouvoir s’inscrire de droit à l’université. S’ils veulent le faire, alors il faudrait qu’ils expliquent leur motivation et avoir un minimum de prérequis pour suivre la formation qu’ils visent. Si il n’y a pas ces prérequis, et que la motivation est là, alors ils pourraient faire une année d’interface, comme par exemple aller passer un bac général adapté.
Je précise que je n’ai rien contre les bacs pro et je pense comme vous que c’est plus valorisant pour les jeunes, sans compter qu’on a mis un an de formation en plus dans leur cursus (comparé à avant). Mais je en crois pas que cette formation se préoccupe d’une poursuite d’étude à l’université, ce n’est pas du tout dans ses objectifs.
@François, c’est moi qui ai écrit ça (pas Dragan). Vous avez certainement raison pour le calcul. Ce que je voulais dire, c’est qu’un jeune à l’université, c’est un jeune en moins qui potentiellement sera chercheur d’emploi, bref un problème en moins.
5 juin 2017 à 21:32
Dragan
@François: « @ Dragan
» le fonctionnement actuel a des avantages (pas pour les jeunes, certes, qui viennent échouer en masse à l’université) : ça permet de diminuer le chômage des jeunes » »
Effectivement, ce n’est pas moi qui est affirmer cela.
@Rachel: « sans compter qu’on a mis un an de formation en plus dans leur cursus (comparé à avant) »
Non c’est l’inverse. A l’origine, le bac pro était en 4 ans (deux ans de BEP ou CAP + deux ans de bac pro) mais à partir de 2009, il a été amputé d’une année pour le mettre sur le même plan que les autres bacs. C’est un progrès mais le niveau du bac pro est toujours aussi faible.
6 juin 2017 à 08:58
Damien
@Dragan
« Je rappelle que beaucoup de ces élèves ont intégré le lycée pro à contre cœur alors que leur souhait initial était la voie généraliste. Voie qui prépare mieux au supérieur. »
C’est marrant, à lire les journaux, on a parfois l’impression que les filières généralistes sont remplies d’élèves qui voulaient faire des études pro mais qu’on a « forcé » à suivre des études générales parce qu’ils n’étaient pas « assez mauvais » pour aller en filière pro. Et maintenant ce sont les lycées pro qui sont remplies d’élèves brimés. A croire que les procédures d’orientation ne sont là que pour brimer (tous) les élèves (on se demande bien qui les brime, d’ailleurs, vu que les enseignants se plaignent en permanence de n’avoir quasiment aucun pouvoir sur cette orientation).
Blague à part, je serai curieux de voir le nombre des ces élèves brimés dans leur « souhait initial ». Et quelle est la part d’investissement réel dans ce « souhait » (et quelle vision ils ont du « souhait » en question). Parce que j’observe la même chose que FUBAR : des étudiants (pas seulement issus du bac pro, certes), qui n’ouvrent pas un livre, ne travaillent pas, n’écoutent pas, et je parle de ceux qu’on voit en cours. Je ne vais pas dire que la plupart ne sont là « que pour la sécu » (en tout cas, quand je discute avec eux, leurs souhaits d’insertion collent avec la filière). Non, je me demande si ce n’est pas largement pire : une méconnaissance totale de ce que signifie « travailler une discipline sur la durée », couplée à une croyance diffuse (au moins au début) qu’en ressortant vaguement quelques bribes de n’importe quoi à l’exam ils auront leur année (après tout, ça a bien marché jusqu’au bac, en dépit des avertissements de leur prof du secondaire).
[sur le passage de 4 ans à 3 ans du bac pro]
« C’est un progrès »
Pourquoi ? En quoi c’est un progrès qu’il soit « sur le même plan que les autres bacs » si après on doit rajouter des années de « remise à niveau » ?
6 juin 2017 à 17:18
Hugo
Je ne crois pas me tromper en écrivant que la majorité des étudiants qui échouent en licence ont eu un bac général. En effet, il n’y a que 8% de bac pro et 14,5% de bac techno parmi les entrants en L1:
http://www.apses.org/quel-parcours-pour-les-bacheliers-es-dans-lenseignement-superieur/
Certes le taux de réussite des bac pros/techno est très très très bas:
http://etudiant.aujourdhui.fr/etudiant/info/universite-taux-de-reussite-en-premiere-annee-en-fonction-du-bac-d-origine-des-etudiants.html
Mais même dans le cas extrême où on leur interdirait de s’inscrire en licence, cela ne diminuerait qu’un peu l’échec en licence, puisque la majorité de ceux qui échouent viennent d’un bac général.
6 juin 2017 à 22:33
Henry IV
Je ne peux qu’appuyer ce que vous décrivez depuis le début. Je l’ai déjà écrit plusieurs fois ici: j’enseigne à l’université depuis 1993, jamais vu un titulaire de bac pro ou techno dépasser 05/20 de moyenne en 1ère année, jamais. ça pose pb quand même! Et les prérequis s’imposent vu le naufrage général du baccalauréat, (président de jury 10 fois, qui n’accepte plus de l’être à présent).
7 juin 2017 à 09:43
Damien
@Hugo
Comme le montre votre lien, les bacs pro et techno sont certes minoritaires en L1, mais leur répartition dépend des filières. Quand on voit qu’il font 1/3 des étudiants en STAPS, une filière pourtant fortement « en tension » et où leur taux de réussite est tout aussi faible qu’ailleurs, on peut comprendre que ça énerve certains collègues. De même pour Langues (1/4 des effectifs tout de même, ce n’est pas si négligeable), sans parler d’AES.
Quant aux taux de réussite, « supprimer » les bacs techno et pro ferait progresser le taux de réussite en 3 ans de 30 % (de 26 à 33 %), symboliquement ce n’est pas si négligeable. Là encore, l’effet serait probablement différent selon les filières.
Sinon, je vois tous les ans des bacs technos dépasser les 10 de moyenne en 1ère année (pas beaucoup, c’est vrai), et j’ai déjà vu un bac pro réussir sa L1 (si, si…). Question de filière…
7 juin 2017 à 11:05
François
Une petite comparaison avec la situation aux États-Unis.
D’après https://www.census.gov/content/dam/Census/library/publications/2016/demo/p20-578.pdf on a parmi les 25-34 ans :
– 90,5% de titulaires d’un diplôme de fin de high school,
– 65 % de personnes ayant entrepris des études supérieures,
– 46,5 % de titulaires d’un diplôme au moins « associate (équivalent à bac+2)
Le taux d’échec dans l’obtention d’un diplôme du supérieur (sans limite dans le nombre d’années d’études) y est donc de : (65-46,5) / 65 = 28,5 %
A comparer au taux français équivalent pour l’ensemble du système d’enseignement supérieur (licence, DUT, BTS, écoles post-bac) qui est d’environ 20% (cf le rapport du sénateur Demuynck qui rappelle que la moyenne OCDE est de 30%). Le relativement bon résultat français, malgré les difficultés bien connues de la licence, provient des réorientations (souvent gratuites) que permet le système global; elles semblent plus faciles en France que dans la plupart des autres pays.
7 juin 2017 à 11:49
Hugo
@Damien
Oui, j’avais aussi remarqué cette hétérogénéité qui fait que les filières en sciences « dures » sont moins touchées par le problème d’accueil des bacs pro/techno. Mais je voulais rappeler les ordres de grandeur, qui sont importants quand on parle de gros sous.
Cependant, comme je l’ai écrit, le taux d’échec des bacs généralistes est d’environs 50% en première année. En enseignant en licence de sciences (donc essentiellement des bacs généraux), j’ai une bonne moitié d’étudiants qui ne viennent pas, ou sont des amibes en classe, ou pire, pourrissent le cours en rigolant sur une video de youtube. Peut-être qu’interdire la licence aux bac pro/techno soulagerait une partie des collègues des autres filières, mais je peux vous assurer que l’effet sur leur humeur ne serait que temporaire. Parce que, avouons-le, ce que beaucoup aimeraient dans leurs rêves les plus fous, c’est récupérer les meilleurs bacheliers (ceux qui évitent généralement l’université (sauf droit et santé)) et refourguer les autres en IUT, BTS…
7 juin 2017 à 13:05
Dragan
@Damien : « C’est marrant, à lire les journaux, on a parfois l’impression que les filières généralistes sont remplies d’élèves qui voulaient faire des études pro mais qu’on a « forcé » à suivre des études générales parce qu’ils n’étaient pas « assez mauvais » pour aller en filière pro. Et maintenant ce sont les lycées pro qui sont remplies d’élèves brimés. A croire que les procédures d’orientation ne sont là que pour brimer (tous) les élèves (on se demande bien qui les brime, d’ailleurs, vu que les enseignants se plaignent en permanence de n’avoir quasiment aucun pouvoir sur cette orientation). »
Analyse qui mérite d’être atténuée :
Oui et le rôle du capital culturel est déterminant sur les destinés scolaires. Culturellement, un fils ou une fille de cadre « se doit » de faire des études supérieures. Et puis quand on a baigné dans l’intellect depuis son plus jeune âge, ça suscite des vocation aussi. Mais je vous l’accorde, parfois il y a des exceptions ou des échecs et là c’est le drame pour les parents.
Dans les milieux populaire c’est l’inverse. Combien de fois j’ai entendu dire des parents dire « que les études ne servaient à rien »…
« Blague à part, je serai curieux de voir le nombre des ces élèves brimés dans leur « souhait initial ». Et quelle est la part d’investissement réel dans ce « souhait » (et quelle vision ils ont du « souhait » en question). Parce que j’observe la même chose que FUBAR : des étudiants (pas seulement issus du bac pro, certes), qui n’ouvrent pas un livre, ne travaillent pas, n’écoutent pas, et je parle de ceux qu’on voit en cours. Je ne vais pas dire que la plupart ne sont là « que pour la sécu » (en tout cas, quand je discute avec eux, leurs souhaits d’insertion collent avec la filière). Non, je me demande si ce n’est pas largement pire : une méconnaissance totale de ce que signifie « travailler une discipline sur la durée », couplée à une croyance diffuse (au moins au début) qu’en ressortant vaguement quelques bribes de n’importe quoi à l’exam ils auront leur année (après tout, ça a bien marché jusqu’au bac, en dépit des avertissements de leur prof du secondaire). »
SVP lisez la réponse que j’ai donner à FUBAR.
@Hugo: « Je ne crois pas me tromper en écrivant que la majorité des étudiants qui échouent en licence ont eu un bac général. En effet, il n’y a que 8% de bac pro et 14,5% de bac techno parmi les entrants en L1: »
Très bonne analyse. Et c’est l »un des arguments que je donne en règle général au détracteur des bacs pro.
En revanche, il s sont plus nombreux en BTS. Et les les taux de réussite sont un peu meilleurs (50% en TS1).
@Henry IV : « j’enseigne à l’université depuis 1993, jamais vu un titulaire de bac pro ou techno dépasser 05/20 de moyenne en 1ère année, jamais. »
Maintenant vous en connaissez un = moi.
8 juin 2017 à 09:26
Damien
@Dragan
« Analyse qui mérite d’être atténuée »
Je n’ai fait aucune « analyse », juste un coup de gueule sur les caricatures médiatiques qui prennent appui sur 2-3 exemples pour faire de grandes généralités sur la nullité de notre système scolaire (qui a tous les maux du monde et même plus) et en particulier le système d’orientation (cible facile : tout le monde peut se défausser dessus sans se remettre en cause). Et les messages ici ne font pas toujours exception.
« SVP lisez la réponse que j’ai donner à FUBAR »
Je l’avais déjà lue et c’est (de mon point de vue) à côté de la plaque. Je sais (et je l’ai dit) que certains bacheliers généralistes ne sont pas différents, je n’accuse pas les étudiants de n’être là que pour la sécu, et je mets en doute la « diabolisation » de l’université (au moins pour ma « p’tite fac »). Si mes étudiants sont tétanisés par la peur de la fac au-delà d’octobre, c’est qu’ils sont très bons comédiens.
Par contre, oui, l’adaptation au L1 est forcément difficile pour un bac pro (et aussi pour les autres bacheliers). Mais est-ce un problème de la fac, ou de la formation dans le secondaire ? Ma dernière phrase (sur la méconnaissance totale de ce que signifie « travailler ») donne un aperçu de mon opinion (et ça n’a pas grand chose à voir avec des questions d’orientation).
13 juin 2017 à 18:59
Dragan
@Hugo: « En enseignant en licence de sciences (donc essentiellement des bacs généraux), j’ai une bonne moitié d’étudiants qui ne viennent pas, ou sont des amibes en classe, ou pire, pourrissent le cours en rigolant sur une video de youtube. »
Je ne sais pas où enseignez-vous mais j’ai rarement vu ce comportement à l’université. Durant mon cursus, j’ai en tout fréquenté 4 universités différentes. Et bien je peux vous garantir que l’ambiance générale était plutôt studieuse et rares étaient les débordements. Alors bien sure, il arrivait parfois que les étudiants se dissipent mais
« Parce que, avouons-le, ce que beaucoup aimeraient dans leurs rêves les plus fous, c’est récupérer les meilleurs bacheliers (ceux qui évitent généralement l’université (sauf droit et santé)) et refourguer les autres en IUT, BTS… »
Sauf que tous les meilleurs ne font pas un BTS ou un IUT. Par exemple les BTS accueillent près de 40 % de bacs pros qui malgré leur bon dossier n’auraient peut-être pas réussi en fac. J’ai déjà vu des bacheliers généraux moyens voire justes aller dans ces filières.
En revanche, comme le souligne un économiste de Poitiers, l’université continue malgré tout à attirer des bons bacheliers ayant des mention B et TB.
Sinon généralement, les « meilleurs » font une classe de prépa, Normal Sup ou passent des concours pour des GE (Sciences Po, ENSAE…).
14 juin 2017 à 09:41
Damien
@Dragan
« En revanche, comme le souligne un économiste de Poitiers, l’université continue malgré tout à attirer des bons bacheliers ayant des mention B et TB. »
L’ « université » dans l’absolu, ça ne veut rien dire, dès lors qu’on mélange des filières avec peu ou pas de concurrence (droit, médecine, ou certaines filières de lettres), et des filières ultra-concurrencées (sciences en particulier), sans parler des filières formellement dans l’université mais qui n’ont rien à voir avec la « fac ».
En sciences, où la concurrence est rude, la « fac » est directement concurrencée par les CPGE, certes (mais ça ne date pas d’hier et est resté longtemps limité en effectif) mais aussi, de façon plus récente et beaucoup plus difficiles par les IUT et les écoles post-bac (les BTS restent encore un peu à part). Le problème n’est pas que la fac ne récupère pas la « crème du gratin de l’élite » qui ferait les ENS ou Sciences Po (*), le problème est la perte d’un bon gros tiers d’étudiants avec un potentiel acceptable derrière.
Alors, si l’ « économiste de Poitiers » fait une analyse générale à l’échelle de l’université, pour moi elle ne vaut pas les octets qui ont servi à l’écrire (et ce qui est plus inquiétant, c’est que ce genre d’analyse sert souvent à édicter des règles générales sans rapport avec les situations particulières). Les facs de science attirent encore des mentions B ou TB, mais pour ce que je vois c’est en effectif négligeable comparé à la masse des étudiants.
(*) bien sur, on trouve toujours des collègues qui rêvent de cela, mais la majorité des collègues sont réalistes, et sinon ils n’ont rien à faire en licence.
14 juin 2017 à 23:30
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