Je voudrais que les gens commencent par réaliser qu’ils veulent, avant tout, faire des choses favorisant les apprentissages de leurs étudiants, ou s’engager dans des démarches pédagogiques, avant de vouloir utiliser telle ou telle technologie.
La pédagogie avant tout
Quand on dit à un enseignant : “Bon, alors, nous sommes équipés de Moodle et voici ce que vous pouvez faire avec. Vous voulez monter un forum dans une de vos classes ? Moodle va vous permettre de le faire et nous allons vous aider à le paramétrer” , on ne favorise pas l’intégration du numérique dans sa pédagogie, on fait exactement l’inverse.
Les établissements peuvent adopter deux approches très différentes des technologies éducatives. Ils peuvent offrir un service d’ingénierie pédagogique (souvent dit d’e-pédagogie) qui est en charge de développer et de maintenir des outils techniques. Ou bien ils peuvent d’abord choisir de créer un contenu et des méthodes pédagogiques puis de réfléchir à ce que peut apporter la technologie à cette pédagogie. Je pense que le débat sur les TICE comme panacée pour transformer l’enseignement supérieur illustre la tension entre :
- ceux qui aimeraient commencer par enseigner et s’entendent dire par leurs établissements qu’ils doivent avant tout travailler avec certains outils et
- ceux qui promeuvent lesdits outils.
Il me semble que ces débats sont des artefacts liés à une démarche faussée dès le départ : celle d’institutions qui veulent faire adopter aux gens des outils techniques plutôt que de commencer par les questions de pédagogie.
Quelles sont vos intentions ?
Voilà pourquoi les enseignants doivent être au clair sur leurs intentions et sur ce qu’ils veulent faire pour atteindre leurs objectifs pédagogiques. Essayez-vous d’engager un dialogue ? Voulez-vous juste transmettre des informations ? Ou voulez-vous, en fait, donner les moyens à vos étudiants de créer quelque chose par eux-mêmes ?
Commencez d’abord par poser ces questions et à y trouver des réponses. Dans un deuxième temps, vous pourrez chercher quelles sont les technologies qui faciliteront votre travail …
… dans un deuxième temps seulement.
Ce billet est le dernier volet de la série « Digital natives & co ». Il est un copié-collé d’un texte que j’ai lu par hasard sur un blog de l’université d’Angers et que j’ai trouvé fort intéressant (voir ici). Il s’agit d’une traduction d’un article de D. Lanclos, initialement publié ici. Il est republié ici avec l’accord de la personne qui a fait la traduction, qui avait elle-même l’accord de D. Lanclos (texte par ailleurs mis sous licence CC-by).
4 commentaires
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2 mars 2017 à 20:48
Olivier Bouba-Olga (@obouba)
Moyennement d’accord : bien sûr que l’enjeu c’est l’amélioration de l’apprentissage des étudiants, pas l’utilisation de la technologie. Mais connaître « l’éventail des possibles » en matière de « technologie », sans réduire cela au numérique d’ailleurs, me semble important, ça donne des idées. Bref, je vois cela plutôt comme un processus itératif : que veut-on faire, que peut-on faire, expérimenter, modifier, etc.
2 mars 2017 à 22:55
Rachel
Il faut quand même convenir qu’on nous explique à longueur d’année que si on n’utilise pas les TICE on est un peu ringard. On l’est aussi quand on branche son portable sur une prise de vidéoprojecteur, des fois ça marche des fois ça marche pas et on sait pas pourquoi et franchement quand on merde en début d’un cours devant les étudiants moqueurs, c’est énervant.
3 mars 2017 à 13:36
Gueux
@Rachel: Ah, chez vous des fois ça marche !?
Plus sérieusement, la pédagogie pour aider à enseigner plus efficacement, personne n’est contre. Mais ça c’est la théorie. Puis y’a la pédagogie de prêche.
Récemment, j’assistais à une réunion où le responsable pédagogie de l’université nous a fait un discours effarant. Le type, qui ne s’est plus retrouvé face à des étudiants depuis au moins 10 ans, nous a sorti tous les clichés et phrases éculées sur les enseignants qui ne s’adaptent pas aux nouvelles technologies, qui n’ont pas changé leur cours depuis des lustres, etc. J’ai trouvé savoureux ses critiques sur les profs qui se contentent de recracher un bouquin ou des notes piquées sur le net, alors que lui même était précisément en train de faire cela. Bref, l’archétype du type infoutu de faire passer un message et qui prétend expliquer aux autres comment faire. Non mais sans déc, j’en suis rendu au point où quand j’entend le mot « pédagogie » je sors mon révolver.
4 mars 2017 à 21:16
Henri-IV
Incantation des TICE quand tu nous tiens… En même temps l’inertie et l’ignorance des collègues ne les favorisent guère. Nous utilisons Moodle depuis 3 ans maintenant, nous sommes le seul département de l’UFR, (sur 9). Rien n’a bougé depuis 3 années. Quand vous prononcez Moodle en réunion, 80 % des collègues ignorent de quoi il s’agit.