
La veille des congés de Noël, le ministère a envoyé une circulaire aux universités pour une reprise progressive des activités dès le 4 janvier. Cela se fera de façon très ciblée : « Des groupes de dix étudiants maximum pourront être accueillis sur convocation. Le public concerné sont les étudiants les plus fragiles : ceux nouvellement arrivés dans l’enseignement supérieur, les étudiants en situation de handicap, de précarité numérique, de décrochage, les étudiants internationaux, ainsi que tous ceux et celles qui appellent votre attention du fait de l’urgence ou de circonstances individuelles particulières ».
La missive est datée du 19 décembre, soit au moment du début des congés de Noël. Alors bien entendu la sphère contestataire de l’ESR a crié au mépris, compte tenu de la date qui ne laisse pas vraiment le temps de s’organiser pour début janvier. Si le ministère n’avait pris aucune mesure spécifique, ils auraient tout autant crié au mépris en reprochant au gouvernement de délaisser l’Université. Rappelons que selon le calendrier du déconfinement, les Universités devaient reprendre leurs activités d’enseignement en présentiel « 15 jours après le 20 janvier » (soit environ vers le 35 janvier), c’est-à-dire bien après la réouverture de tout autre lieu public ou privé (restaurants, lieux culturels, …). A vrai dire, je n’ai jamais bien compris pourquoi il était prévu une date aussi tardive. Il y a certainement des choses qu’on nous cache (comme par exemple les étudiants seraient des sortes de super-contaminateurs ? ou leurs enseignants ?). Les universités semblent la dernière roue du carrosse alors que ça concerne une population importante de plusieurs millions de personnes.
Pour désigner puis convoquer les heureux élus étudiants, j’imagine que ça ne va pas être simple. Dans chaque formation, on connait plus ou moins les difficultés, quand celles-ci sont remontées. Je n’aimerais pas être responsable de formation en cette période. Accueillir ces petits groupes d’étudiants fragiles est une bonne idée, compte tenu des multiples signalements de difficultés rencontrées par les étudiants (décrochage, dépression, isolement …), mais c’est un défi d’organisation et je doute que tout soit opérationnel le lundi 4 janvier. Coté enseignants, ce n’est pas simple non plus à gérer. Quand tout est en distanciel, on ne pose moins de question, on fait l’enseignement en distanciel depuis son domicile ou son labo. Mais s’il faut accueillir des groupes de 10 personnes, alors il faudra faire un enseignement hybride et simultané selon un format qu’il faudra nécessairement adapter. On peut être également un peu surpris par la jauge des 10 étudiants maximum, qui ne prend pas en compte ni la configuration des locaux, ni la taille des promotions.
Comme le premier semestre est quasi terminé, au point où on en est, je me demande s’il ne serait pas plus raisonnable de travailler à faire un démarrage du second semestre le moins mauvais possible. J’ai du mal à croire que ces quelques jours de présentiel en janvier puisse servir à sauver quelque chose sur ce premier semestre tant les dégâts sont déjà considérables. Mais c’est mieux que rien …
8 commentaires
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31 décembre 2020 à 12:14
vz
La difficulté aujourd’hui est que cette circulaire n’a aucune valeur juridique, le décret du 29 octobre dernier n’ayant toujours pas été modifié et ne prévoyant aucune des modalités mentionnées dans ladite circulaire (le JO d’aujourd’hui n’est pas encore paru. Peut être contiendra-t-il une telle modification). La circulaire le précise d’ailleurs en indiquant que « la présente circulaire expose les conditions de cette reprise, qui reste conditionnée à l’évolution de la
situation sanitaire et à des modifications du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ». Certes, on peut considérer que cela n’a guère d’importance et que l’essentiel est l’accueil des étudiants. Autant cependant le faire dans les règles. Tant que le décret n’aura pas été modifié, l’accueil par groupe de 10 n’est pas envisageable le 4 janvier. On peut comprendre, me semble-t-il, que lorsque, à trois jours de la rentrée, la situation juridique n’est pas éclaircie, il y ait une certaine impatience qui se manifeste.
31 décembre 2020 à 18:46
Rachel
@vz, Je pense que l’essentiel est effectivement l’accueil des étudiants. Franchement, on s’en fout un peu du JO, non ? mais ça va être un vrai casse-tête et certainement bien trop tard pour sauver le premier semestre pour ceux qui sont en difficulté. Moi j’ai terminé mes cours … il ne reste plus que l’examen final qui doit se faire la première semaine de janvier.
2 janvier 2021 à 20:48
vz
L’accueil des étudiants est essentiel et le faire dans les règles aussi. Ce n’est pas très compliqué de modifier un décret et le gouvernement l’a démontré maintes fois ces derniers temps. Si on se fout des règles, pour quelle raison avons-nous cessé d’accueillir les étudiants ? Se moquer des règles, c’est accepter que tout se fasse illégalement à tous les niveaux (accueil des étudiants, organisation des examens, élections, promotion, recrutement, etc.).
3 janvier 2021 à 15:43
Rachel
Oui bien entendu il faut respecter les règles, mais n’est-on pas là sur un retard de publication d’un décret, donc sur un retard purement administratif ? Serait-on vraiment hors la loi si on faisait dès demain un accueil selon la circulaire du 19 décembre ?
3 janvier 2021 à 16:47
Gueux
En théorie, bien sûr qu’il faudrait respecter les règles. En pratique, si on applique toutes les règles à la lettre, et bien rien, absolument rien, ne peut fonctionner dans l’ESR. Donc, pour que les choses fonctionnent à peu près, la première règle à respecter est de ne justement pas respecter les règles. ESR = organisation schizophrène.
9 janvier 2021 à 08:56
vz
Oui, accueillir les étudiants sur la base d’une circulaire dont l’application est conditionnée à la modification du décret du 29 oct. 2020, c’est être hors la loi (avec d’ailleurs des sanctions pénales potentiellement applicables).
Le retard n’est pas purement administratif. Il faut prendre en outre en compte que le décret du 29 oct. 2020 a été modifié x fois depuis son adoption (hier encore), sans jamais que l’article 34, restreignant l’accueil des étudiants au sein des Universités, ne soit modifié. Pour quelles raisons ? C’est un mystère.
Comme le sait parfaitement par ailleurs Anne-Sophie Barthez, professeure de droit privé, qui a signé cette circulaire, celle-ci ne constitue pas une base juridique suffisante. La modification du décret d’abord, puis éventuellement une circulaire, tel est l’ordre des choses.
Il est d’ailleurs plus qu’inquiétant de constater que le MESRI s’assied sur les règles juridiques. Quel bel exemple ! A quoi bon pondre autant de lois, de décrets et d’arrêtés si c’est pour au final en faire abstraction ? L’anarchie, c’est ce que prône le MESRI ?
Quant à écrire « en théorie, il faut respecter, en pratique, ce n’est pas possible », c’est une antienne. Cela apaise la conscience de celui qui s’est déjà mis dans cette situation (« personne ne respecte les règles, y compris le ministère. Pourquoi moi ? »).
9 janvier 2021 à 19:47
Gueux
Ce qui apaise la conscience, c’est plutôt de pouvoir se dédouaner faute de directives claires et précises sur « comment faire son lit au carré », laissant des collègues « monter au front », et s’adapter comme ils peuvent aux circonstances avec les moyens du bord.
9 janvier 2021 à 20:56
vz
Si vous reprenez le fil des commentaires, vous y lirez que je ne souhaite qu’une chose : la reprise et le plus simplement et rapidement possible, comme dans les lycées. Et il ne s’agît pas d’avoir des directives claires et précises (elles sont dans la circulaire) mais des règles légales laissant une large marge de manœuvre aux Universités comme en ont les lycées. Cette reprise doit se faire conformément à un texte que le gvt pt très simplement modifier (le décret en question a déjà été modifié x fois. Pourquoi est-ce si compliqué pour les Universités ?). « Monter au front », c’est aussi agir pour que le gvt prenne ses responsabilités et modifie ce texte.