noteserviceQuand on est enseignant-chercheur, on a une double mission : faire de l’enseignement et faire de la recherche. Ça veut dire qu’on a deux sous services (ou deux mi-temps). Pour l’enseignement, ça se mesure assez bien et c’est bien cadré. A part quelques régimes particuliers dans certaines grandes écoles, chaque EC fait 192 heures HED (heures d’enseignements dirigés). Le dépassement de ces 192 heures conduit au paiement d’heures complémentaires. Certains EC sont très friands de ces heures complémentaires et font parfois un double service d’enseignement (pour quantifier un peu, ça donne environ un bonus de 8000 euros par an, à environ 40€ l’HED complémentaire). Il y a encore peu de temps, c’était défiscalisé, donc très intéressant. D’autres EC subissent ces heures supplémentaires pour diverses raisons (manque de personnels dans la formation, à cause d’une offre de formation trop foisonnante ou d’une mauvaise répartition dans les équipes pédagogiques). Ces heures complémentaires ne semblent pas bien maitrisées dans les universités (et ses composantes). Parfois c’est vraiment un problème l’organisation car il n’y pas de corrélation évidente entre le volume d’HC et le nombre d’étudiants. D’autres fois, ces HC servent à combler les manques liés à l’absence de recrutements d’enseignants-chercheurs permanents ou temporaires. Cela représente un poids important dans le budget (pour parler cru, ça le plombe vraiment). Beaucoup d’universités se retrouvent confrontées à ce problème et doivent agir pour contrôler ou  résorber de cette dérive des heures complémentaires.

Pour le « mi-temps recherche », il est bien plus difficile de mesurer la quantité de travail fournie en termes horaire comme on le fait pour l’enseignement. L’activité de recherche peut être toutefois mesurée avec les productions liées à l’activité de recherche et à la diffusion de ses résultats. Mais comment placer la limite d’une production qu’on aura jugée insuffisante en regard des obligations statutaires ? A une époque, l’AERES avait mis en place des critères de productivité « a minima » (par exemple, au moins une publication tous les deux ans dans les sciences dures, ce qui, quand on n’est pas trop regardant sur la revue ou sur la place de l’auteur, n’est pas une condition bien compliquée à remplir). Mais l’AERES est maintenant enterrée, sacrifiée l’année passée sur l’autel des nonistes, et certainement ses critères de productivité avec elle …

Dans la situation actuelle, avec des budgets de fonctionnement en baisse dans les universités (du fait de l’augmentation de la masse salariale liée au fameux GVT) et de l’explosion des heures complémentaires (dont l’argent est pris sur les budgets de fonctionnement), les universités tentent de trouver des solutions pour assainir certaines situations, ou tout simplement pour pouvoir continuer à fonctionner. Par exemple, certains pensent qu’il est anormal de payer un plein salaire à des personnes qui ne travaillent qu’à mi-temps (pour les EC ne faisant pas de recherche ou en large sous-service d’enseignement). Ou bien qu’on ne devrait pas leur payer des heures complémentaires quand ils dépassent leurs obligations d’enseignement. Ou qu’on devrait moduler l’activité d’enseignement et l’activité de recherche, pour qu’au final cela fasse un temps plein. Certains ne veulent rien changer et se satisfont des diverses situations, en dépit des flagrantes défaillances d’obligations statutaires.  D’autres plaident pour enfin prendre en compte sérieusement dans le service effectué toute une série de tâches administratives ou de gestion  nécessaires à la bonne marche des établissements et aujourd’hui fréquemment sous-évaluées (voire pas prises en compte du tout) par les universités.

Dans certaines universités, il y a des mesures qui sont tentées. Ce fut le cas par exemple à Bordeaux 1, nous en avions discuté ici il y a quelque temps. Les personnes concernées sont les EC qui n’ont plus d’activités de recherche : « Après une période de dialogue, un EC peut se voir proposer deux options (1) le passage à un service d’enseignement à 288 heures/an et un déclenchement des heures complémentaires à partir de ce seuil (2) s’il refuse, ce qui est son droit, alors il n’y aura plus d’affectation d’heures complémentaires ». Je ne sais pas si cela a été appliqué …

Plus récemment, c’est un autre établissement qui tente de faire évoluer la répartition des services. Je mets ci-dessous un extrait d’une note de service, ventilée aux personnels en cette rentrée universitaire :

« Le sous service d’enseignement : lorsque des situations de sous-services seront liées à de la mauvaise répartition de charge d’enseignement au sein d’une équipe pédagogique et qu’aucune mesure corrective n’aura été prise, l’établissement se réserve la possibilité de suspendre le paiement des heures complémentaires des enseignants permanents et des vacations d’enseignement de l’ensemble des enseignants de cette même équipe.

Le sous service en recherche : Les enseignants-chercheurs doivent être rattachés à une équipe de recherche et être produisant. Pour les enseignants-chercheurs non produisant, les directeurs de laboratoires auxquels ils sont rattachés pourront leur confier une mission importante au sein du laboratoire ou d’expertises au service de l’établissement.

Pour les enseignants-chercheurs non rattachés à un laboratoire et non produisant, pour lesquels aucune solution n’aura été trouvée, une franchise pour 60 HED sera effectuée pour les HED complémentaires effectuées au sein de l’établissement.

Pour les enseignants qui n’auraient pas essayé de régulariser leur situation quant à leurs obligations statutaires, il pourrait être envisagé :

  • Le non versement de la prime d’enseignement supérieur et de la recherche (PRES) en application de la réglementation qui prévoit que « la PRES ne peut être attribuée qu’aux  enseignants-chercheurs accomplissant l’intégralité de leurs obligations statutaires »
  • Le rejet des demandes d’autorisation de cumul extérieur».