Partout, dans les milieux universitaires, les choses bougent via des fusions ou des restructurations internes ambitieuses. Le dernier exemple très récent est l’annonce du projet de fusion des deux universités clermontoises, incluant un rapprochement avec les écoles d’ingénieurs (lire ici). De leur côté, les universités de la métropole Lilloise pataugent dans la semoule. Le quotidien régional titrait récemment : « mais où est donc passée l’université de Lille ? ». La saga dure depuis 2008, les projets ont tous été plantés (campus Lille de 2008, l’IDEX de 2011 …).
La situation est certainement compliquée, on l’a déjà discuté ici. Le paysage de l’ESR est extrêmement fragmenté, en particulier depuis les années 90 avec la construction d’universités périphériques au détriment d’investissements au cœur de la métropole. S’ajoute à cela un faible investissement de l’Etat dans l’activité de recherche via les organismes de recherche (lire ici).
Mais d’un autre côté, et malgré les faiblesses historiques, on ne comprend pas pourquoi la configuration métropolitaine pose tant de difficultés. En effet, les trois universités couvent des domaines disciplinaires qui ne se chevauchent pas (Lille 1 = Sciences et technologies; Lille 2 = Droit et santé et Lille 3 = Lettres et sciences humaines). Dans ce contexte, il n’y a pas vraiment de conflits liés au « qui fera quoi » dans une future université. Les choses me paraissent assez claires. L’université de Lille serait alors une opportunité d’accéder au concept de la vraie université, c’est-à-dire un ensemble unifié omni-disciplinaire. J’en entends déjà s’écrier « holala ça va faire un monstre ingérable ou une usine à gaz ! ». Il faudra bien entendu adopter une gouvernance adaptée à la taille de l’entité en faisant descendre nombre de petites affaires universitaire d’un niveau plutôt que de tout gérer (mal, comme actuellement) au niveau centralisé. Cela peut être fait facilement en donnant une large autonomie aux différentes composantes.
Mais on n’en est pas à discuter de ça chez les universitaires lillois. L’ambiance semble surtout être à la méfiance réciproque. Surtout depuis 2012 avec le roulement présidentiel dans les universités. Xavier Vandendriessche, le nouveau président de Lille 2 (droit et santé) est hostile au projet de fusion « Nous devons travailler sur des dossiers concrets au lieu de perdre notre temps sur ces questions de fusion, qui sont stériles et chronophages » (AEF n°169752, juillet 2012). Pour lui, les dossiers concrets sont tous ceux qui ne concernent pas la recherche et la formation (bref, les deux missions piliers de l’université …). Par ailleurs, il y a dans le jeu une affaire de gros sous : « « Alors que notre université est sous-dotée par l’État, notre fonds de roulement atteint 50 M€, grâce à une gestion économe » (source ici). On comprend aisément que les juristes, pharmaciens et médecins n’aient pas trop envie de faire pot commun de leur capitalisation avec les gauchistes de Lille 1 et Lille 3. Ils préfèreraient un truc du genre fédération régionale (incluant donc les universités périphériques à la métropole). « L’idée, c’est par exemple de laisser un étudiant de l’université d’Artois venir emprunter un livre ou faire des photocopies à Lille II, comme il le souhaite » (source ici). Ambitieux, ce nouveau président, il ira loin !
Fabienne Blaise, la nouvelle présidente de Lille 3 à quant à elle un discours qui me parait bien moins étriqué : « Je pense, pour ma part, que nous avons besoin d’une seule grande université publique lilloise, pluridisciplinaire » […] « j’ai toujours souhaité jouer collectif. D’une part les SHS n’y perdront pas, d’autre part ce sont les universités lilloises qui vont y perdre si elles ne se regroupent pas. La division existant aujourd’hui n’a rien de rationnel : quand on voit la géographie à Lille 1 et l’histoire à Lille 3, ou la sociologie présente dans ces deux établissements… Cela n’a pas de sens ». A propos des communautés d’universités imposées par la nouvelle loi (et le contrat de site unique, régional): « Je suis un peu surprise. A une époque, les universités se sont multipliées. On se rend compte que cela a créé un système compliqué, et on nous demande, un peu à la hache, de penser à un contrat de site unique. Je n’y suis pas favorable. On ne peut pas nous dire comme ça : « on ne veut voir plus qu’une seule tête », d’un claquement de doigt. Ça m’agace. Cela ne nous forcera pas à nous entendre, la complexité reste en effet la même. Et je ne veux surtout pas que cela freine le processus de rapprochement en cours. Avec les universités lilloises, il est acté que tout le monde parle de politique de sites, mais au pluriel. Chez nous, il y a quatre sites. Attention aussi aux représentations politiques qui pourraient émerger derrière : nous ne sommes pas sur le format d’une université régionale unique. Travaillons sans ambiguité : je ne me prononcerai jamais pour une université régionale. Il faut parler de sites au pluriel » (source ici).
L’acteur le plus moteur pour la construction de cette université de Lille semble être Philippe Rollet, président de Lille 1 (sciences et technologies). « Chaque grande métropole française a son université publique unique : Aix-Marseille, Nancy-Metz, Strasbourg… On ne peut pas être à l’écart. On serait moins attractif que les autres pour attirer de bons enseignants chercheurs et les étudiants. Il faut se différencier, montrer que la place lilloise est un lieu important. Cela passe par une politique scientifique et un conseil scientifique uniques » (source ici).
Comment les politiques de la région regardent ces errements universitaires. Peut-être sont-ils eux aussi tout aussi égarés qu’eux, hésitants entre la poursuite d’une politique d’éparpillement régionale héritée de la gauche des années 90 et le bon sens d’un phare métropolitain puissant … Sandrine Rousseau (VP ESR au conseil régional) résume la situation, à propos de la situation complexe de la région « Elle était voulue dans les années 90 pour une meilleure démocratisation de l’enseignement ; elle est à présent aux antipodes de la tendance aux mastodontes universitaires, accentuée par le controversé Plan Campus et la carotte des Idex ». Et se contente d’un constat pour le projet de l’université de Lille : « Nous avons du retard » (source ici). Ça on l’a bien compris que l’université de Lille patauge. Mais en cherchant un peu, je n’ai pas vraiment trouvé grand-chose sur les souhaits politiques de la région sur le sujet (à vrai dire, ça me semble tout aussi chaotique que chez les universitaires). Le soutien le plus ferme à la création de l’université de Lille devrait venir, en toute logique, de la tête métropolitaine (Martine Aubry, maire de Lille), mais curieusement je n’ai rien trouvé sur le sujet. Si Martine Aubry a un avis sur le sujet, elle se garde bien de le communiquer autour d’elle …
A Lille, le temps s’est arrêté …
22 commentaires
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24 septembre 2013 à 10:22
Damien
« Cela peut être fait facilement en donnant une large autonomie aux différentes composantes. »
C’est « facile » de donner de « une large autonomie » aux composantes ? Si on ne tient compte ni de la culture ambiante universitaire (qui, comme l’a montré le débat sur la qualif, est entièrement fondé sur la défiance de le « base »), ni de l’esprit des lois sur la gouvernance des universités (qui tend plutôt au présidentialisme), certainement.
(cela dit, et sans connaître la situation lilloise, les facs de droit et de médecine en général sont souvent considérées comme les plus touchées par le mandarinat, donc leur opposition à la fusion vient peut-être de là…)
24 septembre 2013 à 12:18
Dan - visseur petit (mais beau)
« La division existant aujourd’hui n’a rien de rationnel : quand on voit la géographie à Lille 1 et l’histoire à Lille 3, ou la sociologie présente dans ces deux établissements… Cela n’a pas de sens »
Qu’est-ce qui empêche de changer cela ? Croire que la fusion ramènera à la raison est méconnaître les personnes et les jeux de pouvoir, déterminants quand il n’y a pas de sanction extérieure ( le danger, les clients, la tempête…)
Je persiste et signe : fusionner des universités pour faire un monstre pluridisciplinaire, cela ne fait que créer ce que nous, électriciens, appelons du « déwatté » ou de l’énergie réactive. Un exemple tiré de l’entreprise : pour un opérationnel qui aime son job, être muté au siège est sans doute une promotion, mais aussi la conviction qu’il va perdre en intérêt du travail, consommer des heures innombrables en parlotes ( réunions) pour convaincre des gens qui ne souhaitent pas qu’on mette le nez dans leurs affaires, et qui s’estiment assez adultes pour ne pas recevoir des conseils de ceux qui ne les appliqueront pas . Et comme il vient du terrain, il sait bien que le terrain a raison. les université multidisciplinaires mélangeant les choux et les grenades sont des hérésies organisationnelles et des paniers de crabes politiques, très vite impuissants. Vouloir refaire le mille-feuilles administratif, avec des conseils de coordination, de convergence, de pôle, de composante, c’est décourager le bon sens et l’initiative, l’efficacité et l’investissement. Mais ça peut faire bien dans les statistiques qui ne se préoccupent pas du résultat réel, et dans la presse. Cela permet aussi de donner des promotions et des postes aux personnels irrécupérables : cela peut jouer le rôle de certains CDI ou des fonctions centrales de ministère.
24 septembre 2013 à 12:53
Rachel
@Damien, sur le papier c’est facile. Il suffit de faire descendre d’un étage nombre de dossiers (de « université centralisée » vers « composantes »). C’est en gros appliquer le principe de subsidiarité (et au passage augmenter le niveau de compétence des gens qui prennent les décisions).
Mais dans la réalité, je conviens que ça nécessiterait un vaste changement de mentalité qui ne me parait pas gagné d’avance. Mais je pense qu’on y viendra car c’est le bon sens.
Dan, les jeux de pouvoirs ou les groupes de pressions existeront toujours. Moi je préférerais une structure cohérente, pluridisciplinaire (l’essence même de l’université) plutôt qu’un paysage fragmenté de villages de gaulois. Il suffit d’adapter la gouvernance et les organes de décisions.
Par ailleurs, on me dit (sur Cui-Cui) que mon billet ne contient pas un paramètre important, qui est celui de l’université catholique de Lille (non incluse dans le projet de l’université de Lille). Cette université catholique aurait des attaches privilégiées avec le patronat et la sphère des décideurs politiques locaux. Si c’est le cas, cela pourrait expliquer la discrétion de M. Aubry sur le dossier de l’université de Lille (qui ne ferait pas les affaires de l’université catholique …).
24 septembre 2013 à 16:00
Dan - visseur montagnard de 1791)
Rachel, vous êtes irrémédiablement cartésienne et jacobine. Malheureusement vos amis sociologues se sont penchés sur la gouvernance des systèmes complexes, et ont montré que , plus le système est gros et non finalisé par l’extérieur, moins il est gouvernable ( cf. Crozier) . Les très grosses entreprises ne survivent que grâce à la pression des actionnaires et des clients – et elles peuvent mourir : cf Péchiney, Ugine, et tant d’autres. Les universités sont immortelles et c’est leur faiblesse : elles peuvent consacrer la part d’énergie qui leur sied à des jeux de pouvoir, des réunions multiples, des équilibres subtils, des débats byzantins. Mais quand on a la chance d’avoir une petite équipe dynamique de gens qui se connaissent , s’apprécient, ont un projet, elles peuvent dépoter. pas dans les monstres irréformables.
24 septembre 2013 à 16:55
Rachel
@Dan, vous savez aussi qu’il y a plusieurs façons d’organiser les sociétés et les microsociétés (les systèmes complexes). Pour les universités, nul besoin de prendre modèle sur le fonctionnement des PME. Puisque vous insistez, je vous donne ‘mon’ modèle (ce n’est pas le mien mais celui qui a ma faveur). Le niveau supérieur est celui d’une gouvernance globale. Il ne s’occupe que des grands équilibres internes et des relations avec l’extérieur (les tutelles, les grands partenaires, les collectivités territoriales, etc …). Elle traite de sujets macros via un CA et un conseil académique. Il y a ensuite un niveau intermédiaire, celui d’une gouvernance sectorielle (celle des composantes (formation + recherche)). Ce niveau traite des affaires du secteur, avec donc plus de compétences que le niveau supérieur car le champ est bien moins étendu. C’est à ce niveau que pourrait se positionner nombre de « petites » décisions (postes, allocations thèse, promotions, recrutement, … etc …). Enfin le niveau inférieur c’est celui des opérateurs (de recherche et de formation, bref les labos et les cellules de formation). C’est à ce niveau que ça turbine car c’est là que sont les « petites équipes dynamiques de gens qui se connaissent, s’apprécient, ont un projet, elles peuvent dépoter ». Simplement ces gens ne sont pas des auto entrepreneurs. Ils sont les maillons (interdépendants) d’un schéma global qui est celui d’un service public. Pourquoi ça ne marcherait pas ?
24 septembre 2013 à 18:36
Dan - visseur observateur
Pourquoi ça ne marcherait pas ? pour plusieurs raisons :
1-par ce que le niveau parce que le niveau inférieur dit toujours qu’il ne connaît pas la stratégie et la politique, et qu’il ne peut donc pas prendre de décision.
2- parce qu’il y a obligatoirement conflit sur les allocations de ressources
3 – parce qu’on veut être dans un système démocratique (il n’est pas écrit dans les tables de la loi que tout doive être démocratique, mais c’est une revendication permanente des universitaires) et qu’un système démocratique suppose des élections, donc des « partis » qui vont défendre des « intérêts » et peut-être même une « politique ». Les élections désigneront des conseils à tous les niveaux, et il n’y a pas beaucoup d’expérience d’un conseil qui soit clair sur ses attributions et qui les accepte.Il faudra ensuite se faire réélire …
Le système de Rachel est sûrement idéal dans un monde qui n’existe pas, ou l’intérêt général l’emporte sur les intérêts particuliers, et où des gens sont capables d’animer un système. Il suffit de voir comme la commission européenne poursuit sa propre politique, dans l’intérêt des commissaires, pour comprendre l’illusion de la subsidiarité. (Je fais allusion à la scandaleuse négociation du traité de libre-échange transatlantique, négociation complètement aux mains des lobbys et des entreprises et aux tentations de la direction de l’élargissement de s’intéresser à la Moldavie et, à la Géorgie et à l’Ukraine pour justifier son existence)
nota : la capacité d’animation d’un système n’est pas une donnée triviale. On connaît très très peu d’hommes ou de femmes susceptibles de donner un élan à une organisation, et peut-être est-ce encore plus difficile à une organisation de statut public . Il n’y a pas des centaines de Louis Gallois, Bill Gates, Demonque , Lecerf, ou Riboud capables d’insuffler l’ esprit d’équipe et le dynamisme à une organisation en restant décents (au sens américain).
24 septembre 2013 à 18:36
étudiant inquiet
@Dan, vous dîtes « les universités multidisciplinaires mélangeant les choux et les grenades sont des hérésies organisationnelles ».
Mais Lille 2 mélange précisément les choux et les carottes en réunissant des juristes et des médecins ! :-)
Outre la « catho », il y a aussi une antenne de Science Po et une école de journalisme (l’ESJ), qui – je pense – se délectent des querelles de clocher des universités lilloises…
Ce n’est pas à Lille que nous aurons le Berkeley français…
24 septembre 2013 à 18:57
Jojo
@étudiant inquiet : les juristes et les médecins ont en commun de se faire des c…s en or en ayant une activité privée, quitte à s’assoir sur leur activité de recherche statutaire. S’il y a bien deux mondes qui se ressemblent dans l’université au niveau des valeurs (entendez, €€€€€€€), ce sont bien la médecine et le droit.
24 septembre 2013 à 18:58
étudiant inquiet
@Rachel, avant de parler de fusion des universités, je pense que le pré-requis est de construire un campus unique qui les réunirait toutes. Sinon je ne vois pas l’intérêt. Le président et les directeurs d’UFR devraient soit passer leur temps à se déplacer entre les campus de l’agglomération, soit ignorer certains sites.
Votre idée du campus multidisciplinaire n’a un sens que si l’université est quelques chose de plus qu’un simple endroit où on va en cours – accessoirement à la bibliothèque -, comme actuellement. En effet, il n’y aura peu d’effet pour les étudiants que d’avoir les médecines et les juristes avec les littéraires et les STAPS sur le même campus. Comme rappelé par Dan, les étudiants se « mélangent » peu. Pour cela, il faudra que les campus universitaires deviennent des lieux de vie, des villes en miniature ; alors seulement l’idée d’une pluridisciplinarité, d’un échange entre les différentes disciplines de l’université pourra prendre forme.
Pour l’instant, les campus sont éclatés aux quatre coins des agglomérations, abritent des bâtiments en vieux béton gris et moche, les logements universitaires sont également très éloignés et il n’y a *rien* sur le campus. Je rappelle que la BU ferme le samedi après-midi et que lorsque j’ai besoin d’argent liquide, je dois retourner au centre-ville.
24 septembre 2013 à 19:06
Rachel
1) Le niveau inférieur ne peut pas prendre de décision ? je ne suis pas du tout d’accord. Au contraire c’est lui qui décide de tout, au final (car c’est lui le moteur, qui rassemble 95% des forces vives): c’est lui qui décide quelle science il faut faire (c’est lui qui monte les projets). C’est lui qui décide quelle formation il faut mettre en place, qu’il faut faire évoluer. Il est source de proposition. Mon niveau intermédiaire décide si oui ou non il faut alimenter (en particulier en moyen humains car des sous y’en a pas beaucoup à discuter). Ce n’est pas le niveau intermédiaire qui dit aux opérateurs quoi faire de leur journée.
2) Y’a pas de conflits dans les PME ou les écoles d’ingénieurs ? Je pense qu’à ce niveau c’est pareil partout pour les sous, les promotions, les moyens humains, etc … Mon niveau intermédiaire permet une sorte d’arbitrage, car il n’est ni trop grand (pour garder de la compétence dans les décisions), ni trop petit (pour éviter trop de dérive arbitraire). Bref je ne vois là que des avantages.
3) Quant au fonctionnement démocratique, là c’est à chacun de juger mais personnellement je pense qu’un système démocratique n’est pas forcement pire qu’un autre. Bien entendu il y a des groupes de pressions, des intrigues, des gens mal intentionnés etc … mais le système démocratique a un gros avantage quand il est adjoint une transparence des débats : une forme d’auto-régulation que l’on ne pourra pas avoir dans les petites grandes écoles ou les PME.
Enfin ‘mon’ système n’est pas le mien. C’est celui qui fonctionne dans beaucoup d’endroits, y compris hors université. Ce n’est pas un monde qui n’existe pas, c’est celui que l’on doit construire à l’université en France.
@Etudiant, ils doivent se marrer comme des baleines à la ‘Catho’. Ceci dit, ils auraient gros à perdre si vraiment l’université de Lille se fait. Fragmentée, l’université publique ne pèse rien car elle disperse ses forces et au final n’a pas les capacités de lobbying auprès des politiques.
Pour les questions logistiques, on fait ce qu’on peut. Il me parait essentiel que mon niveau intermédaire soit le plus mono-site que possible. Pou rle reste, cela sera impossible (à Lille ou ailleurs).
24 septembre 2013 à 21:56
Damien
@Rachel
La discussion entre Dan et Rachel me semble un peu surréaliste. L’étude des universités étrangères montre qu’il existe de très grosses universités pluridisciplinaires qui ont l’air de plutôt bien se porter. Et dans pas mal de pays la pluridisciplinarité est la règle (même dans des structures plus petites) et non l’exception.
Il me semble assez clair aussi, à lire Rachel, que le modèle qu’elle défend n’est absolument pas « jacobin » mais au contraire plutôt décentralisé. Il est juste malheureux que ce ne soit pas celui de l’université actuelle, non parce que les universitaires veulent de la « démocratie », mais pour des raisons historiques.
@étudiant
Vous avez en partie raison : en l’absence de campus unifié, les échanges interdisciplinaires sont rares, en enseignement comme en recherche. D’un autre côté, même dans un petit campus unifié, les contacts ne sont pas exceptionnels (l’ENS est un bon exemple : il y a certes des échanges entre littéraires et scientifiques, mais d’un point de vue professionnel il me semble qu’on est loin du brassage généralisé). Mais une structure commune a l’avantage de ne pas décourager ces contacts (alors que ceux-ci le sont dans des universités séparées). Et une structure décentralisée l’avantage de ne pas les forcer…
24 septembre 2013 à 23:28
FBLR
Pourquoi vouloir toujours être gros ?
Princeton, 7912 étudiants tout compris (L1 -> Thèse)
http://www.princeton.edu/main/about/facts/
Autre question ?
24 septembre 2013 à 23:32
FBLR
@etudiant inquiet
Princeton: 180 bâtiments différents.
Le campus est peut-être « unique », mais croire qu’il y a des mélanges entre sciences et humanités pour ceux qui l’ont visité, c’est une blague.
25 septembre 2013 à 00:19
étudiant inquiet
@FBLR, Princeton est située dans une toute petite ville, les contacts y sont donc quasi-obligatoires, malgré l’immensité du campus. De plus, avec leurs licences en quatre ans, les étudiants américains peuvent choisir plusieurs disciplines complètement opposées pendant leur cursus et découvrir autre chose que la discipline inscrite sur leur diplôme final.
J’ajouterais que Princeton est une fac privée, qui se finance grâce au mécénat, aux frais d’inscription et à un énorme endowment, trois choses qui n’existent pas en France ; la comparaison me paraît difficile. C’est pour cela que je citais Berkeley, grosse fac publique de 35K étudiants située dans une métropole et qui semble bien fonctionner, malgré la proximité de Stanford. Comment font-ils pour s’organiser ?
25 septembre 2013 à 00:36
FBLR
@Etudiant Inquiet
Peut-être pourrait-on permettre la réalisation de fondation où les excédents dégagés, les dons des anciens pourraient être accumulés et bien gérés ? Qui sait, ça augmenterait même peut-être l’indépendance des chercheurs embauchés ? Bref.
Je fais de la provoc avec Princeton, mais c’est juste pour rappeler que non, la taille est loin d’être le critère le plus important de visibilité.
Quant à la différence publique/privée pour les univs américaines, vu le foisonnement des systèmes de bourses, c’est vraiment délicat de le regarder avec notre tropisme français.
25 septembre 2013 à 09:19
Damien
@FBLR
« Pourquoi vouloir toujours être gros ? »
Et pourquoi pas, dès lors que c’est plus cohérent ?
« Princeton, 7912 étudiants tout compris »
et Rutgers, 59000. So what? Découper pour le plaisir de découper n’a aucun intérêt. Et bizarrement, découper disciplinairement ne semble pas non plus une bonne idée (Princeton est généraliste).
25 septembre 2013 à 09:25
Damien
@FBLR
« Je fais de la provoc avec Princeton, mais c’est juste pour rappeler que non, la taille est loin d’être le critère le plus important de visibilité. »
Mais le but premier n’est pas que nos universités soient visibles, le but premier est qu’elles fonctionnent bien (en formation et recherche). Ce ne sont pas quelques petites universités d’élite ultra-visibles qui font l’essentiel de l’enseignement supérieur aux USA.
25 septembre 2013 à 15:37
Sirius
C’est une configuration qui se présente dans plusieurs régions.
A Lille, il est clair que les élus socialistes de la région portent une lourde responsabilité, ayant voulu imposer une université régionale (fusion des 6 universités) à un moment où la fusion des 3 universités lilloises était envisageable.
L’attitude du Président de Lille 2 est d’une médiocrité totale.
L’intérêt de Lille et de la région est de favoriser la fusion des trois universités lilloises, sans rendre ingouvernable l’Université de Lille qui en résulterait par l’addition des trois universités périphériques.
25 septembre 2013 à 16:56
Georges Henry
Je me souviens d’un lundi à 16 heures dans mon université de province, attaquant la correction d’un paquet de copies, et ayant brusquement une envie de chocolat consolateur. Impossible de trouver un distributeur à proximité. Prendre ma voiture et faire 3 km n’a rien donné, dans ce quartier l’université n’a en rien stimulé la consommation et les commercants ferment le lundi. Toutes les universités d’Amérique du Nord ont leur quartier animé, avec des restaurants et bistrots de diverses sortes, des boutiques à Tshirts, un marchand de journaux, une librairie. L’autonomie nouvelle des universités françaises va t-elle enfin permettre davantage d’activités mercantiles sur le campus ou dans ses abords? Il semble que les investisseurs soit frileux et que les étudiants soient fauchés -ou radins: acheter un livre? vous n’y pensez pas, les cours et les polycopiés c’est pourquoi faire? Les transformations des mentalités dans ce domaine me paraissent très très lentes.
25 septembre 2013 à 19:34
Rachel
Quand on discute de fusion d’universités en France, inévitablement l’exemple de la petite (par la taille) université américaine bien classée dans Shanghai revient invariablement. Et on oublie, bien entendu, de préciser qu’on mélange un peu les choux et les carottes, entre structures élitistes ultrasélectives et des structures d’enseignement de masse qui ont interdiction de sélectionner. Avant toute considération de taille, le but est pour un territoire (un site) avant tout de construire des choses cohérentes qui sont l’essence même de l’université, c’est-à-dire une structure pluridisciplinaire réunifiée.
Sur la toile, j’ai pu lire que Martine Aubry aurait déclaré que « la faculté catholique de Lille était le plus beau fleuron universitaire de Lille » (peut-être des mauvaises langues, je n’en sais rien). Pour connaitre un peu la ville, je ne peux qu’être d’accord: y’a pas photos, les bâtiments sont nettement plus classieux à la ‘Catho’.
25 septembre 2013 à 23:18
FBLR
@Rachel
Non, je prends cet exemple car j’y ai passé du temps, c’est tout. Et c’est rigolo car c’est un contre-exemple protéiforme (plein de bâtiments, surface très grande, finalement assez peu d’élèves).
@Georges Henry
Chose rarement dite. Si les campus américains sont aussi bien achalandés avec des tas de jolies boutiques, c’est aussi parce que les universités les subventionnent (pour faire venir des étudiants riches).
Lorsque l’on regarde la part pure réservée à Ens & Rech, en réalité le montant est bien souvent à peine supérieur à ce qui se fait par ici (j’exclue bien sûr le sport qui fait partie des postes faisant exploser les budgets). Les vrais sujets deviennent alors la part étatisée ou non des dépenses, et les frais annexes liées à la compétition entre établissements.
Pour finir, pour que les universités puissent devenir des lieux de passage, il faudrait justement les intégrer pleinement dans la ville, comme ce qui est fait à UPenn par exemple. Et surtout offrir des services (notamment administratifs et de biblio universitaires) qui ne soient pas concentrés entre 10h et 15h13 avec une pause d’une heure le midi.
28 septembre 2013 à 09:16
jako
@Rachel : Il y a plein de gens qui bossent dans un même domaine et qui ne se parlent pas et qui sans doute ne se parleront jamais, car le domaine est immense et structuré en sous-domaines hyper-spécialisés. Alors suffit-il de créer des mastodontes pour que des mecs qui n’ont rien à se dire du jour au lendemain se mettent à bosser ensemble? Encore une fois il en est de ces mastodontes universitaires comme des barres HLM: on crée des machins invivables que tous les fortunés ou les plus chanceux fuiront ; ne resteront que les miséreux qui n’auront pas eu d’autre choix que de rester, et auxquels on servira la soupe populaire (car rappelons qu’il n’y a plus de fric dans les caisses…). Pourquoi le gigantisme universitaire donnerait-il de meilleurs résultats que le gigantisme urbanistique ? Et puis on critique régulièrement sur ce blog ces privilégiés de profs qui vivent sur une autre planète et qui passent leur temps à défendre leur rente de situation et leur pré carré : or, ceux qui font en ce moment les frais de ces restructurations et réorganisations en termes de surcharge de travail, d’épuisement et de burn out, ce ne sont pas les profs de rang A : ce sont en premier lieu les (B)IATOS (on s’étonnera ensuite de la « défiance de la base »…). Il est vrai que les petites secrétaires insignifiantes ou les petites techniciennes, elles ne font pas de « l’excellence », elles n’explosent pas leur H-index, elles ne déposent pas de brevets et donc on n’en a rien à secouer…. Et puis elles ont la lumière et le chauffage, comme disait l’autre âne, et c’est bien connu qu’elles ne foutent rien…
@Damien : « le but premier n’est pas que nos universités soient visibles, le but premier est qu’elles fonctionnent bien » : ouais mais ça c’est le discours (sans aucun doute sensé) du chercheur de base. C’est oublier l’enfer de l’administration à la française, sans parler de ceux (dans les ministères ou les hautes sphères de l’ESR) dont les dents raclent le sol et qui sont prêts à toutes les compromissions pour booster leur « carrière » ou avoir les faveurs du prince… Et puis la visibilité internationale et le « ranking », c’est exactement l’alpha et l’oméga de certains :
http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/pierre-gohar-directeur-delegue-a-l-innovation-de-saclay-nous-visons-le-top-10-des-campus-internationaux-d-ici-dix-ans.html
P.S. On pensait le « mariage forcé » une pratique d’un autre âge : ben non ; dans l’Université française, c’est bel et bien en vigueur…
http://blog.educpros.fr/pierredubois/2013/09/24/la-fusion-combattue-a-paris-3/
D’aucuns diront sans doute que les « mariages », ça relève de la « stratégie » et que ça ne concerne pas les gueux de base…