Dans le récent dossier de l’Apec « Industrie : évolution et tendances sur le marché de l’emploi cadre » (mars 2013), on peut voir un histogramme très étonnant. En 2007, la proportion de cadres recrutés pour faire de la R&D serait brutalement passée et de façon pérenne de quelques % à plus de 20% des embauches (voir la figure ci-dessous). Très curieusement à la même époque la dépense en R&D des entreprises a stagné (lire ici par exemple).
Une évolution aussi rapide paraît invraisemblable. Il ne semble pas que l’Apec ait changé sa méthode de classement des fonctions en 2007. Alors n’y aurait-il pas eu une fraude généralisée aux déclarations d’embauche pour bénéficier du Crédit Impôt Recherche ? (rappelons que la période incriminée correspondait à une réforme majeure du CIR, avec un triplement de son volume, des procédures administratives allégées et des conditions d’octroi qui ont été étendues).
Ce billet a été co-écrit par François et Rachel, sur une proposition de François.
54 commentaires
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25 mai 2013 à 23:31
Jojo
Est-ce possible ? Et Valérie qui tirait une telle fierté du succès du CIR !
26 mai 2013 à 00:05
Petit Cerveau
Rachel, François, c’est très intéressant (et courageux).
26 mai 2013 à 00:13
FBLR
1) recruter un docteur
2) prétendre qu’il est affecté à des tâches de R&D
c’est simplement impossible à vérifier.
Ou alors il va falloir recruter massivement.
Le CIR a été la meilleure revalorisation possible des docteurs, dont tout le monde parle dans ce blog de manière éthéré sans voir que les politiques ne pouvaient pas faire mieux que ce dispositif.
Bien sûr, c’est une distorsion énorme de concurrence entre les entreprises, qu’elles soient ou non capables de chasser cette subvention déguisée.
26 mai 2013 à 01:05
Dan- visseur chasseur d'aubaines
Chaque mesure de ce type génère des effets d’aubaine plus ou moins subtils. Là, il semble que les entreprises aient fait fort. Comme toujours, ce serait intéressant de segmenter par domaine de recherche.
Les heures supplémentaires dégrevées ont permis d’attribuer des primes pas chères et des augmentations déguisées. Ce qui est le plus drôle, c’est que les effets pervers sont totalement prévisibles pour quiconque a déjà mis les pieds dans une entreprise.
26 mai 2013 à 01:09
FBLR
@Dan
« … quiconque a déjà mis les pieds dans une entreprise. »
Oups, ça va pas le faire avec les politiques à la française…
26 mai 2013 à 08:10
DM
Pour le CIR, je ne sais pas, en revanche, sur l’ANR, il est pour moi clair que certaines grandes entreprises gonflent leurs frais (sans pour autant faire nécessairement beaucoup de travail).
26 mai 2013 à 09:40
Rachel
Il y a vraiment des gros paquets d’argent en jeu (pris sur le budget du MESR), alors pourquoi se priver ? « Cette explosion du nombre d’entreprises déclarant investir en R & D reflète-t-elle vraiment la réalité, ou assiste-t-on là à une périlleuse course à l’optimisation fiscale, poussée par des officines opportunistes aux pratiques parfois douteuses ? ». http://blog.usinenouvelle.com/innovation/financement/la-reforme-du-credit-impot-recherche-a-t-elle-cree-une-bulle/
Rapport du sénat 2012: « Crédit d’impôt recherche : supprimer l’effet d’aubaine pour les grandes entreprises, réorienter le dispositif vers les PME »
http://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-677-notice.html
Un autre rapport sur le CIR: http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2012/69/5/CIR_233695.pdf
26 mai 2013 à 09:47
Jojo
@FBLR : Il n’y a aucune nécessité d’embaucher des docteurs pour accéder au CIR. Ca n’a rien revalorisé du tout. On a juste renommé quelques trucs existants déjà dans les entreprises.
De nombreux collectifs appelés ici nonistes, formés d’universitaires qui n’ont jamais mis les pieds dans une entreprise (on le leur reproche assez), avaient parfaitement vu venir. Je ne crois pas nos politiques et leurs conseillers moins clairvoyants.
26 mai 2013 à 10:25
Rachel
@Jojo a parfaitement raison. Je pense que nos politique set conseillers savent parfaitement que le CIR est surtout un moyen facile pour nos entreprises d’aller ponctionner des subventions publiques (ici sous la forme de crédit d’impôt). D’ailleurs on entend souvent dire que les services de R&D se sont reconfigurés en chasseurs de subventions (et donc n’ont plus trop le temps de faire cette R&D). Certains disent aussi que le CIR a permis à certaines entreprises d’éviter la fermeture durant cette période de crise financière.
Compte tenu du bilan très mitigé du CIR, je pense qu’il pourrait être supprimé. L’équivalent du budget serait reversé (par exemple) à l’ANR, ce qui équivaudrait à multiplier son budget par 5, environ. Dans l’ANR, il y aurait alors des programmes de R&D industrielle avec interfaces avec le monde académique, des programmes scientifiques fléchés pilotés par les académiques avec partenaires industriels et enfin des programmes académiques blancs (avec un budget qui permettrait au minimum un taux d’acceptation de 30 %).
26 mai 2013 à 10:51
DM
@Rachel: Je vous encourage à écrire cela dans une tribune à un grand journal. :-)
26 mai 2013 à 11:09
MCF27 (de Marseille)
@DM: eh oui, en plus cela serait enfin l’occasion, peut-être, de connaître la véritable identité de Rachel ;-)
26 mai 2013 à 11:10
Cobalt
« Il n’y a aucune nécessité d’embaucher des docteurs pour accéder au CIR. »
Et c’est bien cela le problème. Comment peut-on prétendre investir dans la recherche et l’innovation en ne recrutant que des ingénieurs dont la plupart ont été totalement formatés par les GE?
Et comment croire que les grandes entreprises ont besoin de subvention publiques pour faire de la recherche. Quand je vois les bénéfices réalisés par les labos pharmaceutiques et les sommes englouties dans les opérations de fusion-acquisitions, je pense plutôt que ces entreprises qui bénéficient des résultats la recherche fondamentale devraient participer plus à son financement.
26 mai 2013 à 11:14
DM
@MCF27: Mon propos n’est pas là. Je me suis dévoué récemment pour dire tout haut ce que pensaient plein de collègues (à savoir: il faut distinguer les pratiques et les besoins par disciplines, pourquoi sont-ce toujours des profs de droit, de philo et de littérature qui prétendent parler en notre nom), mais je me suis fait critiquer par au moins un collègue, qui m’a dit que j’aurais plutôt dû proposer . Je lui ai suggéré d’envoyer lui aussi une tribune… il n’en a bien entendu rien fait.
Tant que nous râlons chacun dans notre coin ou sur des blogs confidentiels, nous laissons le champ public aux autres…
26 mai 2013 à 11:17
jako
@Rachel: vous auriez pu écrire votre chronique sur SLU! Deviendriez-vous « noniste »?
26 mai 2013 à 11:20
MCF27 (de Marseille)
@DM: il y avait un clin d’oeil en passant certes mais je vous rejoins totalement. En plus, même si on peut parfois avoir envie d’aller plus loin que la ralerie ordinaire, ça reste compliqué par ce manque de temps nécessaire à une connaissance approfondie et exemplaire des dossiers. Et donc Rachel me semble tout à fait légitime dans cette optique.
26 mai 2013 à 11:53
Y a-t-il eu une fraude généralisée des entreprises pour bénéficier du crédit impôt recherche (CIR) ? | Humanitudes
[…] https://rachelgliese.wordpress.com/2013/05/25/y-a-t-il-eu-une-fraude-generalisee-des-entreprises-pour… […]
26 mai 2013 à 12:08
FBLR
1) pour avoir le droit de créer une aide aux entreprises qui passent les fourches caudines de Bruxelles, il faut que celle-ci soit étiquettée « Recherche » ou « Innovation » (et oui… on a tout à fait le droit de nationaliser une entreprise dans le cadre européen si et seulement s’il existe un gain de production à la clé que le marché ne permet pas d’avoir)
2) je crois bien que le CIR a entraîné un surcroît d’embauche de docteur. Ne pas oublier que l’Etat *vous paie* pour pouvoir embaucher un docteur (c’est assez rentable). Attention, c’est corrélativement aux autres classes de diplômes, et vu qu’il y a eu une augmentation du chômage…
3) il est clair que les tâches orientée « R&D » ne sont bien souvent que des optimisations de process, et surtout, lié à des projets déjà en cours.
4) à l’époque où j’étais chef d’entreprise, j’ai en effet été approché par ce type d’officines, et je confirme qu’elles sont très actives. Pour information, le CIR a majoritairement servi aux banques et assurances.
5) le contrôle est totalement impossible à mettre en place… notamment si le dispositif atteint sa cible (les nombreuses de PME en lancement avec des idées
6) Vous l’avez bien compris le but du CIR n’était que de baisser le coût du travail, tout en affichant une politique volontariste au niveau R&D.
7) Cet argent ne pourrait pas être « transféré » si facilement: en le supprimant, il y aurait une augmentation du coût du travail pour les entreprises en question, ce qui se traduirait par une baisse d’emploi au sein des entreprises, donc une perte de rentrée fiscale sèche pour l’Etat et l’aggravation de la balance commerciale (toussa, toussa…)
26 mai 2013 à 12:18
Rachel
Le billet pose avant tout une question. Je crois que les réponses seront certainement différentes selon qu’on est du monde académique ou du monde industriel. Pour ma part, et ça n’engage que moi, je ne comprends pas cette méthode de distribution d’argent publique sous forme de d’effet d’aubaine massif sans grande contrepartie. Quand je pense que nous, du monde académique, on est contrôlé sans arrêt sur la moindre dépense et qu’on nous demande tout le temps des comptes sur l’argent perçue, je trouverais normal qu’il en soit de même pour les entreprises sur l’argent public. Cette suspicion de fraude massive est déjà largement discutée sur la toile et dans des rapports très officiels. Peut-être que l’administration du contrôle fiscal fait (ou va faire) son travail et va enquêter et opérer à des redressements en cas de fraude avérée ?
Je ne vais pas écrire de « tribune anti-CIR », d’autres l’ont fait avant moi. Je ne connais pas trop le dossier CIR et par ailleurs je préfère rester dans la tartufferie confidentielle de mon blogue (ce qui me permet de rester anonymous !).
Par contre, ce que je peux faire, c’est développer un peu mon précédent commentaire dans un futur billet, si ça intéresse des gens. Supprimons le CIR et imaginons ce qu’on pourrait de cet argent … (pour dimensionner le problème, le CIR c’est environ 5 milliards d’euros/an, le CNRS fonctionnement (hors salaire) c’est environ 1 milliard/an ; l’ANR = 800 millions/an).
26 mai 2013 à 12:31
FBLR
@tous
Dans la première mouture, recruter un docteur permettait de *gagner* de l’argent avec le CIR, pas simplement d’économiser des charges, i.e. son salaire est pris en charge par l’Etat.
Donc, non, il y a bien eu une très grande différence entre le recrutement d’un simple ingénieur (GE ou non) et un docteur.
Sinon, je vous invite à regarder les modalités de calcul qui différencie très clairement les cas:
Cliquer pour accéder à CIR-03-12_vweb_212586.pdf
Maintenant, un docteur qui implémente des formules mathématiques dans une banque, est-ce de la recherche & développement ? C’est plutôt ça le vrai problème, un effet d’aubaine.
26 mai 2013 à 12:34
FBLR
Visiblement, c’est toujours le cas:
P.19:
« Dans le cas particulier du « jeune docteur », les dépenses de fonctionnement sont fixées forfaitairement à 200% des dépenses de personnel (calculés sur la base du salaire non doublé). Comme l’ensemble des dispositions relative à l’embauche de “jeunes docteurs”, la majoration n’a lieu qu’à certaines conditions. Elle n’a lieu que pendant les vingt-quatre premiers mois suivant leur premier recrutement, à la double condition que le contrat de travail soit à durée indéterminée et que l’effectif salarié total de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente. »
200% couvre largement les cotisations, sauf à vouloir payer le docteur plus de 50000€ nets par an, l’entreprise *GAGNE* de l’argent. Avant, il n’y avait pas de conditions de temps, désormais une limite de 24 mois a été instauré semble-t-il.
26 mai 2013 à 12:54
DM
@rachel: Je crois, chère collègue, que vous commettez une erreur courante chez les scientifiques qui reportent sur le débat public les exigences qui s’appliquent aux publications scientifiques.
Vous dites que vous ne direz rien parce que vous ne maîtrisez pas à fond le dossier. Mais est-ce que les parlementaires ou les « intellectuels » qui s’expriment en ce moment savent à fond de quoi ils parlent ? Dans certains cas, oui, mais dans de nombreux cas, on peut réellement en douter vu les énormités et autres affirmations sans fond qui sont avancées.
Je ne pousse évidemment pas à faire comme eux et à parler de ce que l’on ne connaît pas et à affirmer ce qu’on est incapable d’étayer. Il me semble, cependant, que votre discours n’est pas d’affirmer qu’il y a fraude, mais de dire que les informations à notre disposition permettent d’avoir des doutes raisonnables sur la bonne utilisation du CIR ; or, en période de rigueur, il serait bon de ne pas avoir des milliards de budget dépensés on ne sait trop pour quoi.
26 mai 2013 à 13:23
étudiant inquiet
On pourrait certainement faire la même remarque pour chaque subvention/exonération de charges/crédit d’impôt/niche fiscale… Supprimer le CIR, c’est un peu comme ouvrir la boîte de Pandore de la fiscalité française. Ça ne se fera jamais.
26 mai 2013 à 13:49
FBLR
@Etudiant Inquiet
Plus précisément: ce sera toujours un argument de campagne (cf. Hollande depuis mi 2011 !), mais jamais une réalité politique: trop de lobbys surpuissants derrière (ex: l’industrie pharmaceutique…)
26 mai 2013 à 14:17
Jojo
Rachel, malheureusement, je doute qu’il y ait la moindre fraude, donc la moindre sanction. Il s’agit d’optimisation…
26 mai 2013 à 14:28
François
@ Cobalt
» Comment peut-on prétendre investir dans la recherche et l’innovation en ne recrutant que des ingénieurs dont la plupart ont été totalement formatés par les GE? »
Cobalt, ce n’est pas très constructif de vouloir rallumer inutilement des guerres de religion. On parle ici de recherche et d’innovation industrielles. Chaque mode de formation a son « formatage » (à mon avis plutôt partiel que « total » comme vous le dites), qui présente des avantages et des inconvénients. Je vous renvoie à l’étude http://thesa.inist.fr/docs/RdoctoratSHS.pdf d’où j’extrais les 2 conclusions suivantes :
« C’est l’ampleur des moyens consacrés à la R&D qui influe sur la production de l’innovation. »
« Il n’apparaît pas de différence significative entre productivité dans les fonctions de chercheur entre docteurs hors santé, ingénieurs et titulaires d’une maîtrise ou moins (sauf master et agrégation, de productivité plus faible, situation à laquelle l’étude tente de donner une explication). »
L’important n’est pas de savoir si les sociétés ont recruté depuis 2007 pour leur R&D des docteurs ou des ingénieurs, mais de vérifier que les personnes recrutées travaillent effectivement dans des services de R&D et y bénéficient de budgets satisfaisants.
26 mai 2013 à 15:21
Rachel
@DM, à votre avis, comment serait perçue une tribune écrite par un universitaire qui milite pour la suppression du CIR et sa réorientation sur des « vraies » actions de recherche (donc académique) ? On en trouve déjà beaucoup sur la toile. Le mieux serait qu’un journaliste prenne le sujet en main, fasse son boulot d’enquête et nous donne de façon neutre les éléments factuels. Après 5 années de subventions très massives, il serait temps de savoir si nos entreprises ont vraiment utilisé l’argent du CIR pour développer leur R&D. A ma connaissance, la R&D privée est toujours aussi terne (mais je peux me tromper). Si au minimum ça a permis d’embaucher des docteurs, alors tout n’a pas été perdu …
@Coblat, j’en avais fait un billet ici : il y a peu de docteurs dans la R&D privée. https://rachelgliese.wordpress.com/2011/03/08/des-ingenieurs-en-mal-d%E2%80%99innovation-vont-ils-oser-le-doctorat/
@François, la guerre a été rallumée ces derniers jours et je compte bien revenir ici sur le sujet. http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article6107
Puisque vous parlez de budget, la courbe qui est montrée dans le billet (une forte augmentation d’embauches pour des activités de R&D) ne corrèle pas du tout avec la courbe des investissements de R&D. Que peut-on en conclure ? on embauche massivement des gens dans la R&D mais on ne leur donne pas de moyens pour bosser ?
26 mai 2013 à 16:18
François
@ Rachel « on embauche massivement des gens dans la R&D mais on ne leur donne pas de moyens pour bosser ? »
Certainement pas. La plupart des entreprises n’ont pas l’habitude de payer leurs salariés à ne rien faire.
Je pense qu’on qualifié de R&D éligible au CIR des travaux qui ne sont pas de la vraie R&D. On présente par exemple comme étant de la R&D des développements spécifiques demandés par un client qui ne seront pas réutilisables pour d’autres.
Quant à l’article que vous citez http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article6107 je l’avais lu sur le Monde et m’apprêtais à demander à son auteur quelles étaient ses sources pour affirmer : » Moins de 2 % des cadres du public sont titulaires d’un doctorat, contre 35 % aux États-Unis ou en Allemagne » qui me paraît peu vraisemblable, en particulier pour les États-Unis.
Petit calcul sur un coin de table : d’après l’article, il y aurait 13 000 recrutements par an de ces fameux cadres du public en France. Si on extrapole à l’échelle américaine (5 fois plus d’habitants) ceci correspondrait à 65 000 recrutments par an dont 35% de docteurs, soit 23 000 par an. Or la production américaine de PhD stricto sensu (hors des « Educational Doctorates » et autres faux doctorats) n’est que de 50 000 par an …
26 mai 2013 à 16:29
FBLR
@François
il y a fort à parier, comme d’habitude, que l’on comptablise les « MBA en public management » dans la catégorie « doctorat ».
Autant comptabiliser le « M2 affaires publiques » de Sc. Po en doctorat et le tour sera joué…
(on obtiendra même plus de 80% comme ça)
26 mai 2013 à 16:56
DM
@Rachel: Ça serait perçu comme pro domo, mais y a-t-il vraiment beaucoup de tribunes qui ne le soient pas?
26 mai 2013 à 18:06
Jojo
Rachel, une autre possibilité serait de piquer une de ces vidéos de clients de Virgin les jours de super-promo et de la retitrer « entrepreneurs découvrant les nouveaux critères du CIR en 2007 ! ». Si ça se trouve, ça fait le buzz.
26 mai 2013 à 18:09
FBLR
Pour revenir sur cette affaire de « non-avantage » aux jeunes docteurs (apparemment tout le monde ne connaît pas bien ce dossier), voilà le document spécialement réalisé:
Cliquer pour accéder à CIRjchercheurs_40169.pdf
Et voilà le « coût » d’un jeune docteur (l’état vous *PAIE* pour l’embaucher):
Donc, oui, il y a eu une politique très volontariste de placement des jeunes docteurs dans les entreprises, même si cela ne s’est pas couronné de succès.
26 mai 2013 à 18:34
Petit Cerveau
Francois, je crois que 13.000 est l’effectif total de la fonction publique (« Les hauts fonctionnaires, à peine 12 000 personnes réparties dans treize corps, ont tous leurs associations, elles-mêmes fédérées dans un groupe appelé G16. »), pas le flux annuel de recrutement.
26 mai 2013 à 19:58
François
Merci Petit Cerveau de cette remarque.
En fait les chiffres donnés par l’article sont incohérents :
au début : » les hauts fonctionnaires, à peine 12 000 personnes réparties dans treize corps, … » (stock)
dans la suite : » … fonction publique : à peine 300 titulaires de doctorats l’intègrent chaque année sur 13 000 diplômés » (flux)
ce qui m’amène à me demander si le chiffre de 35% de docteurs dans la haute fonction publique américaine est exact (je suis particulièrement surpris par le fait que l’article donne des chiffres équivalents pour l’Allemagne et les États-Unis).
Je vais essayer de faire réagir les auteures de l’article.
26 mai 2013 à 21:36
Rachel
@François, si les chiffres sont faux, alors il serait bien d’essayer d’avoir les vrais (s’ils existent). (c’est vous le spécialiste des chiffres !).
Par ailleurs il serait bien de savoir également si les rares docteurs présents dans la haute fonction publique le sont grâce à leur titre de docteur ou bien grâce à leur appartenance au G16 ? (car on peut être les deux).
A propos de cette affaire, on pourra lire avec intérêt le lien suivant (voir surtout l’extrait d’un échange entre un internaute et la ministre : http://blog.educpros.fr/doctrix/2013/05/24/la-reconnaissance-du-doctorat-dans-la-haute-fonction-publique/ . A noter que la ministre a bien défendu cette reconnaissance du docteur mais s’est pris au dernier moment une belle savonnette de la part du gouvernement.
Je trouve cette histoire très surprenante. C’est un très mauvais signal envoyé aux universitaires de la part du gouvernement et un renoncement d’une « promesse » de campagne. La toile semble s’être emparée du problème et j’espère que ça va monter en mayonnaise.
26 mai 2013 à 21:43
DM
@Rachel: Si l’on compte les corps comme Mines, Ponts, Télécom: il y a une partie des « corpsards » qui font des doctorats (et qui d’ailleurs finissent parfois ensuite détachés comme chercheurs ou enseignants-chercheurs… j’ignore si on les compte encore dans leur corps d’origine pour les statistiques que vous avez).
26 mai 2013 à 21:47
FBLR
@Rachel
Quel est le périmètre exact du « G16 » ?
Car s’agissant de la haute fonction publique, il y a:
– Polytechnique (corps techniques)
– Sciences Po Paris (et quelques concurrents récupérant des miettes pour les corps administratifs)
26 mai 2013 à 21:53
Rachel
Bon sang, j’en reviens pas. Quelqu’un peut-il m’expliquer la position du gouvernement ? Et pourquoi il se réveille si tard ?
@FBLR, le G16 c’est X et ENA. Ils ont un site woueb http://www.hautefonctionpublique.org/g16/index.html
26 mai 2013 à 22:05
FBLR
@Rachel
Ce n’est pas X et ENA, justement, c’est ce que je voulais savoir.
Merci pour le lien vers le site :-)
26 mai 2013 à 22:12
Rachel
FBLR, vous avez raison, ce n’est pas X et ENA. Je précise: le G16 « regroupe les associations et syndicats représentant les corps de hauts fonctionnaires « administrants », soit environ 8 000 hauts fonctionnaires recrutés pour une large part d’entre eux à la sortie de l’Ecole Polytechnique et de l’Ecole Nationale d’Administration ».
26 mai 2013 à 22:50
FBLR
@Rachel
Loin de moi l’idée de « pinailler », mais l’ENA et l’X ne sont pas dans la même catégorie: tous les X n’obtiennent pas de corps d’état (il y a un concours après le concours: le classement de sortie), alors que l’ENA est déjà l’arrivée dans la haute fonction publique (tout comme l’ENM ou l’INET, etc…). C’est pour ça que je pense qu’il est plus utile de se poser la question d’où viennent les gens qui sont recrutés dans les corps (donc ce qui permet d’arriver à l’ENA, etc…).
26 mai 2013 à 23:23
Jojo
@Rachel : merci pour ce lien, exactement ce que je cherchais.
Il s’avère que j’ai suivi ce chat en direct, et la réponse de Fioraso à cette question (reconnaissance du doctorat dans la haute fonction publique) a été éditée dans le compte-rendu du Monde : http://www.lemonde.fr/enseignement-superieur/article/2013/05/24/genevieve-fioraso-le-gouvernement-est-defavorable-a-la-fin-de-la-gratuite-pour-les-prepas_3417035_1473692.html .
En effet, j’ai bondi quand j’ai lu « les grands corps ne sont pas prêts comme cela par la loi à diminuer leurs contingents ». Ben oui, quoi, merde, ce n’est quand même pas le législateur élu par le peuple qui va dire quoi faire aux grands corps…
Quand je suis revenu de ma sidération et que j’ai voulu retrouver cette phrase assez incroyable dans le compte-rendu, j’ai seulement trouvé « les grands corps ne sont pas prêts à diminuer leurs contingents ».
Grâce à votre lien, je sais que je n’ai pas rêvé. Merci !
26 mai 2013 à 23:25
François
@ Rachel. » Par ailleurs il serait bien de savoir également si les rares docteurs présents dans la haute fonction publique le sont grâce à leur titre de docteur ou bien grâce à leur appartenance au G16 « .
En général :
– pour les corps techniques le doctorat s’obtient après avoir été sélectionné par le corps parmi les élèves de certaines écoles (X, Ulm, Mines, …)
– pour les corps administratifs, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de docteurs (n’oublions pas qu’en France la proportion de docteurs non-scientifiques par rapport au total des docteurs est l’une des plus basses du monde). Il peut y avoir entrée de docteurs qui auraient été reçus au concours de l’ENA réservé aux fonctionnaires (car de façon paradoxale l’ENA est l’une des rares écoles françaises à offrir une véritable 2ème chance, à condition de passer quelques années dans la fonction publique).
A mon avis, si se développe une forte pression pour que le taux de docteurs dans la haute fonction publique rattrape le taux d’autres pays, les corps technique vont systématiquement inclure le doctorat dans la formation de leurs débutants, ce qui est relativement facile (il suffit de leur donner un premier emploi de type CIFRE sur un des problèmes qui se posent au corps).
Pour les corps administratifs, la situation est plus délicate car je ne vois pas trop leurs membres entreprendre des thèses après leur sortie de l’ENA …
26 mai 2013 à 23:34
FBLR
@François
de ce que je sais, il y a par exemple un pourcentage cible de docteurs au CEGIET, et il semblerait que ce soit le cas pour tous les grands corps.
Mais dans tous les cas c’est une situation un peu malsaine: les élèves en question n’ont en effet aucun problème pour torcher leur thèse, mais en cas de poursuite dans le monde de la recherche, ceux-ci arrivent à un niveau de rémunération correspondant à la fin de carrière d’un EC…
26 mai 2013 à 23:40
Rachel
Jojo, à votre service et en retour merci pour le lien sur l’échange complet.
J’ai repéré trois choses très étonnantes en termes de position du gouvernement, qui a taclé le travail assez consensuel de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (1) défavorable à la fin de la gratuité des prépas (2) le refus de cotutelle du MESR au grand bazar ministérielle des formations du supérieur (3) veut imposer un texte qui n’engage à rien sur le doctorat et ses conditions d’accès aux concours de la fonction publique.
Pas digne d’un gouvernement socialiste.
26 mai 2013 à 23:48
Petit Cerveau
FBLR, ils ne sont pas obligés d’aller à l’université, ils peuvent faire de la recherche dans des départements liés à l’école d’application du corps concerné.
27 mai 2013 à 00:02
FBLR
@Petit Cerveau
C’est justement mon point. Dans ce cas ils sont en « position d’activité » ce qui permet de garder la rémunération de corpsard (soit 4000€/mois nets début de carrière 7000€ fin). Et dans ces labos se trouvent des chercheurs « normaux » en tout cas en termes de rémunération.
Tant d’histoires où se cotoyaient des smicards+ avec des listes de publis longues comme le bras (ATER, MCF ou CR2) et un corpsard payé 2 fois plus sans encore avoir eu sa thèse m’ont déjà bien incommodé.
Dommage que toutes ces règles ne soient pas clairement mises sur la table en amont…
27 mai 2013 à 09:29
DM
@FBLR: Attention, ENA ça peut vouloir dire en sortie se retrouver juge de tribunal administratif à Trifouilly-les-Oies, non?
Sinon je confirme que les grands corps en sortie de l’X c’est une minorité (mais ça conditionne en partie la forme de l’enseignement et des examens à l’X car il faut pouvoir faire un classement). Les corps se sont par ailleurs ouvert aux autres ENS.
@Jojo: Moi aussi cela me fait halluciner, mais… le président est énarque!
27 mai 2013 à 09:31
DM
@FBLR:
Il semble aussi que pour les Mines-Télécom il y ait des postes d’accueil à l’INRIA, sans passer le concours CR. J’ignore comment ils sont payés.
Sinon, des gens des Mines il y en a au CEA. J’en connais même un qui est détaché comme PR.
27 mai 2013 à 12:02
Astronaute en transit
Je saisis ce débat après avoir rempli ma déclaration d’impôts… tout à fait excellent pour l’estomac!
En fait je ne suis pas sûr de saisir les positions défendues: pense-t-on vraiment que la suppression du Crédit Impôt Recherche va permettre une meilleure utilisation de « l’argent public » (dont on peut rappeler qu’il a d’abord été contribué par des personnes privées, qui peuvent aussi légitimement que des fonctionnaires estimer avoir droit à une subvention?)?
Il y a des gaspillages, ce qui n’est franchement pas une nouvelle dans ce pays (quoique ce ne sont pas des personnes privées, encore, qui exercent les tâches de l’administration et distribuent « l’argent public »). Saura-t-on donc trouver la bonne solution? On semble demander ici, une suppression pure et simple plutôt que de meilleurs contrôles ainsi que des aménagements pour renforcer l’efficacité et éliminer les abus. Naturellement, ma préférence irait plutôt à la seconde option.
J’ai certes longuement entendu sur Gaia et ailleurs la complainte des malheureux qui manquent de fonds pour leurs labos, leurs publications, leurs expériences, leurs recrutements de chercheurs aussi bien que d’étudiants pour continuer à faire tourner la machine. Il me semble que beaucoup d’entreprises grandes ou petites (ne pas oublier que les grandes sous-traitent beaucoup, ce qui a aussi des effets d’entrainement) peuvent faire la même complainte. pour ma part, je n’ai pas exercé dans la précarité pendant dix ans à cause du Crédit Impôt Recherche ou d’une « mauvaise utilisation de l’argent public » (un peu, quand même, d’accord) mais à cause du monopole de fait dans l’exercice du métier par des fonctionnaires dans mes disciplines. Peut-être me recylerai-je donc vers une de ces entreprises qui semblent indûment percevoir de l' »argent public » qu’elles ont peut-être elles-mêmes généreusement contribué au Trésor sous les coups de trique de l’administration, du gouvernement et des médias, jamais en reste (et bénéficiaires d’une somptueuse niche fiscale via la carte de presse).
27 mai 2013 à 16:12
DM
@Astronaute en transit: (Ce qui suit est largement pifométrique)
Reformulons la question autrement. Le CIR revient à avantager *certains* types d’entreprises, c’est-à-dire (1) celles qui font de la R&D (2) celles qui arrivent à faire passer ce qu’elles font pour de la R&D; car ce que l’on dégrève des uns, cela revient à le faire financer par les autres.
Sur le point (1), vous me direz que de toute façon on a en France la manie de subventionner des secteurs d’activité entiers via des niches fiscales ou des subventions directes, de sorte que le CIR n’en est qu’une parmi d’autres. De fait, on peut penser que ce dont a besoin l’économie française c’est d’une montée en gamme et qu’il faut encourager les entreprises high-tech. Mais bon, on peut aussi interpréter le CIR comme « la PME qui fait de la mécanique de base paye pour la start-up qui produit des codes de trading pour les grandes banques », avec toutes les questions d’intérêt sociétal derrière.
Le point (2) favorise les spécialistes, ceux qui ont des services dédiés à l’écriture de propositions et de rapports. Je ne pense pas que des contrôles supplémentaires les dissuaderont, sauf à devenir prohibitifs pour les PME.
Enfin, votre rengaine anti-fonctionnaires. Si j’ai bien compris, vous étiez en SHS, voire en sciences politiques, dans un établissement connu pour sa tendance à s’affranchir des règles usuelles du fonctionnement universitaire. Vous en concluez que tous les problèmes viennent des fonctionnaires. D’autres pourront en conclure que la maladie est locale à votre discipline, voire questionner l’existence du dit établissement. ;-)
27 mai 2013 à 18:05
Astronaute en transit
@ DM, j’apprécie mieux la façon dont vous formulez la question: elle fait ressortir les problèmes qui surgissent dans l’utilisation du CIR, qui sont indéniables. Puisqu’on les identifie bien, est-ce que cela passe par une suppression du CIR, considéré en principe comme mauvais? C’est là que je m’interroge. Au fond, peut-être est-ce là l’occasion de faire de la destruction créatrice schumpétérienne, démolir le CIR et attendre que ce gouvernement promette, évidemment, de faire mieux que le précédent (mon ancien café de la Place du Trocadéro en sait quelque chose!)
Oui, ma rengaine anti-fonctionnaires! Ce qu’il y a de chou avec elle, c’est qu’elle ne laisse jamais indifférent. Elle est grosse comme le bras et abonde en caricatures et généralisations qui font sortir de leurs gonds un peu tous les types de personnages que l’on croise sur Gaia. Si je n’existais pas, il faudrait m’inventer, voyons! Évidemment qu’on peut tout balayer d’un revers de la main, de toutes façon j’étais en SHS, et de toutes façons j’étais dans l’ « établissement connu pour sa tendance à s’affranchir des règles usuelles du fonctionnement universitaire » qu’il faudrait supprimer tiens comme ça on n’aura plus d’aigris de mon genre pour empêcher de « fonctionner » en rond.
Mis à part ça, je crois difficile d’éviter l’évocation de ces questions quand on débat d’un système d’enseignement supérieur et de recherche aussi massivement dans la main du secteur public que le français. De tels secteurs existent aussi à l’étranger, et je n’ai d’ailleurs rien contre, la question est, fonctionnent-ils tous de façon aussi bancale?
27 mai 2013 à 21:37
FBLR
@DM
Avec la fusion des corps, et la fusion du concours de recrutement dans les grands corps, les ENS ont *perdu* des places. (schématiquement, là où il y avait 1 place par ENS, soit 3, il n’y en a plus qu’1 ou 2 => arnaque).
Les X sont d’excellents négociateurs, cf. les quotas qu’ils arrivent à entretenir, du type « ouverture d’une place au tour extérieur – celui *éventuellement* ouvert spécifiquement aux docteurs, ndla – si 20 polytechniciens admis dans le corps, et « 1 normalien (Ulm-Lyon-Cachan-Ker Lann) pour 5 X » : règle en vigueur au CCA avant la fusion avec les Mines.
Bref, sur une promotion de 25 recrutés, il y aura 20X, 3 ou 4 normaliens, 1 grande école et peut-être un docteur.
Comme toujours, le diable est dans les détails, et les discours mielleux ne servent à rien.
7 juin 2013 à 07:35
Y a-t-il eu une fraude généralis&...
[…] Dans le récent dossier de l’Apec « Industrie : évolution et tendances sur le marché de l’emploi cadre » (mars 2013), on peut voir un histogramme très étonnant. En 2007, la proportion de cadres recr… […]
26 juin 2013 à 14:12
Y a-t-il eu une fraude généralis&...
[…] Dans le récent dossier de l’Apec « Industrie : évolution et tendances sur le marché de l’emploi cadre » (mars 2013), on peut voir un histogramme très étonnant. En 2007, la proportion de cadres recrutés pour faire de la R&D serait brutalement passée et de façon pérenne de quelques % à plus de 20% des embauches (voir la figure ci-dessous). Très curieusement à la même époque la dépense en R&D des entreprises a stagné. (…) – Blog Gaïa Universitas, 25/05/2013 […]