Dans le billet précédent, nous discutions de la démocratie à l’université. Qui décide des grandes orientations scientifiques et pédagogiques ? Il existe de nombreux modes de fonctionnement de par le monde, pas très évident de savoir lequel serait le meilleur. Certes en France il y a un très fort pilotage étatique par le ministère, mais les universités, maintenant autonomes, ont certainement quelques marges de libertés. Elles peuvent aussi avoir quelques volontés de vision partagée et collaborative.

Pour aider à y voir plus clair, rien de mieux que de prendre un cas d’étude (ici très fictif). Imaginons un conseil de représentants qui serait constitué par des enseignants-chercheurs, des étudiants, des représentants des mondes politique, économique et social. Personne n’aurait la majorité absolue. Ce type de conseil pourrait exister à l’échelle d’une université et à une échelle nationale. Pour notre exercice, prenons un conseil national dont l’objectif serait de donner un avis au gouvernement sur des dossiers concernant l’évolution de l’ESR en France. Imaginons aussi que cette assemblée consultative serait écoutée par le gouvernement (j’ai bien précisé que le cas d’étude est un peu virtuel).

Prenons maintenant un gros dossier difficile, comme par exemple la rénovation du cycle licence à l’université (c’est juste un exemple). Imaginons également que pour ce dossier épineux, il n’y a pas de consensus. Résumons très schématiquement les positions des uns et des autres (1) les représentants du monde politique et économique veulent épurer l’offre de formation des universités, qu’ils trouvent pléthorique et illisible. Ils veulent aussi que les universités suivent un référentiel national de compétences et que les licences soient plus professionnalisantes. (2) les étudiants sont assez d’accord avec ça, ils veulent également des examens plus faciles, la suppression des notes éliminatoires, le maintien des sessions de rattrapage, des compensations, bref qu’on donne la licence à tout étudiant inscrit, ainsi que des frites plus souvent au RU (3) les universitaires ne veulent rien, ils trouvent que la licence, elle est très bien comme elle est.

Après quelques discussions, il est l’heure du vote : quelle orientation choisir ? Les étudiants font alliance avec les représentants du monde politique, économique et social. Ils votent pour cette « nouvelle licence ». Les universitaires votent contre, mais sont mis en minorité par les financeurs et les usagers. Ils se voient donc dans l’obligation d’appliquer un nouveau décret, contre leur volonté.

Heureusement tout cela n’est qu’une réflexion très fictive, ça ne peut pas arriver en France étant donné que les universités sont maintenant autonomes, libres et responsables. D’ailleurs le président Sarkozy s’y est engagé en 2007 : « Je donnerai aux universités volontaires une réelle autonomie leur permettant d’organiser librement leurs filières d’enseignement, de recruter leurs élèves et leurs enseignants » (promesse de campagne du 15 mars 2007).